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Diaspora - Colloque

« Vous ne pouvez pas savoir combien nous aimons le Liban »

Des Libanais de tous bords et des Américains se sont retrouvés à Washington pour assister au symposium organisé par l'Association internationale pour la sauvegarde de Tyr (AIST) à la prestigieuse Bibliothèque du Congrès.

Réception à l’ambassade du Liban à Washington avec, de droite à gauche, l’ambassadeur Antoine Chedid, Maha Chalabi, Rosarita Tawil et Naji Farah.

Forger une autre idée du Liban, et dans un lieu non des moindres : tel est le tour de force que vient de réaliser à Washington la Fondation pour la sauvegarde de Tyr, présidée par Maha el-Khalil Chalabi, avec l'organisation de la Journée de Tyr à la Bibliothèque du Congrès, abolissant ainsi la distance géographique entre la cité phénicienne et Washington.
Le 3 juin aura constitué ainsi un tournant pour le Liban, dont une nouvelle image, à partir de la capitale des États-Unis, est en train de se constituer dans l'imaginaire du peuple américain. Il en émane un même message qui résonne fort: «Vous ne pouvez pas savoir combien nous aimons le Liban. Nous espérons que les conflits se calmeront dans la région pour venir chez vous. »
L'Association internationale pour la sauvegarde de Tyr veille sur la protection du patrimoine historique et archéologique de la ville depuis 1983, date de sa création à Paris, alors que Camille Aboussouan était ambassadeur du Liban à l'Unesco.

Les « amis de Tyr » aux États-Unis
Maha Chalabi a toujours su s'accompagner de personnes influentes partout dans le monde, ce qui est le cas pour Washington avec Charles Boustany, membre du Congrès américain d'origine libanaise, et Esther Coopersmith, présidente honoraire du Comité américain de l'association, qui a reçu à dîner tous les amis de Tyr au lendemain du séminaire, dans sa belle résidence.
C'est là que se sont retrouvés tous les participants venus de divers pays, le groupe des Amis de Tyr qui séjournaient à l'hôtel Dupont Circle. Parmi eux, des professeurs éminents qui ont pris la parole au symposium à la Bibliothèque du Congrès, qui comportait trois tables rondes : Tyr berceau de la civilisation, Le commerce et les échanges phéniciens et Tyr dans la Bible et l'art.
L'ambassadeur du Liban aux États-Unis, Antoine Chedid, et son épouse Nicole avaient organisé la veille une grande réception en leur domicile au cœur de Washington. Une tournée de la capitale américaine a d'ailleurs été organisée pour des personnes ayant fait le voyage. Nommée en hommage au premier président des États-Unis, George Washington, cette ville de 700 000 habitants avait été conçue en 1790 pour devenir la capitale fédérale du pays. Elle se trouve dans le district de Columbia, et elle a été construite suivant le plan de l'ingénieur franco-américain Pierre Charles L'Enfant.
Washington, siège de nombreuses institutions prestigieuses, diffère de la plupart des autres villes américaines, car la construction de gratte-ciel y est interdite : son urbanisme est marqué par une faible hauteur et un héritage de l'architecture coloniale.

Une ouverture en direction de l'Amérique latine
L'une des présences remarquées à cet événement aura été celle de trois Libano-Mexicains, qui s'intéressent au développement de la Fondation Tyr en Amérique latine : Badhia Yunes, âgée de 19 ans, venue de Puebla pour poursuivre ses études à Washington, et férue de culture libanaise comme nombre de ses compatriotes, et Alfredo Alam, industriel et ancien président du Club libanais de Puebla. Ce dernier était tout content de se retrouver là après avoir visité Tyr deux semaines auparavant, au cours d'un séjour au Liban.
Habib Chamoun, professeur à Houston et auteur du livre à succès Négocier comme les Phéniciens, était également présent à cette conférence. Il avait présenté son livre à Paris il y a quatre ans lors d'un dîner-débat de l'association RJLiban, qui avait reçu à maintes reprises Maha Chalabi pour parler de Tyr. Le voyage de retour aux sources RJLiban prévu dans un mois au Liban (organisé en faveur de jeunes d'origine libanaise, désireux de connaître la terre de leurs ancêtres) a retenu l'attention de la communauté libanaise ainsi que des journalistes américains qui couvraient l'événement. Il s'en est suivi une interview télévisée diffusée sur la chaîne ENC News and Network, réalisée par Jan Duplain et Eric Hill dans la résidence de Esther Coopersmith, durant laquelle Rosarita Tawil, habillée par le styliste Rani Zakhem, a évoqué les projets qui attendent les jeunes Libano-Américains.
Autre invité de marque : le jeune Jeffrey Gonano, venu avec sa compagne Gloria de Pennsylvanie, d'où il avait participé il y a deux ans, à l'instar de milliers d'autres personnes du monde entier, mais en grande majorité américains, à la tombola lancée par la Fondation Tyr, « 1 Picasso pour 100 euros ». Heureux gagnant du concours et curieux de découvrir ce pays, il a déjà réservé ses prochaines vacances au Liban.
Étaient également présents à cet événement Joseph Bahout, chercheur au département Moyen-Orient à Carnegie, ainsi que Zeinab Karaké et son époux Victor Shalhoub, originaires de Nabatiyé, dont deux des filles vont effectuer le voyage au Liban cet été.

Les Rizik et Farah, de Washington à Tyr
La relation entre Washington et Tyr est loin d'être récente : il y a cent ans, les deux frères Rizik, Ayoub et Joseph, partis de Tyr pour Washington quelques années auparavant, revenaient dans leur ville d'origine et rencontraient les deux sœurs Farah, Soraya et Geneviève, sœurs de Wadih Farah. Elles deviendront leurs épouses avec lesquelles ils établiront l'un des magasins de mode les plus prestigieux de Washington, Rizik's. Philip, fils de Soraya, rencontré lors de ce voyage, effectue régulièrement des séjours à Paris, où il avait été premier secrétaire à l'ambassade américaine, et parfois à Beyrouth.

 

Un professeur tunisien détaille « la passionnante histoire de Tyr »

 

Le professeur tunisien Mohammad Fantar, un grand ami de Tyr.

«Les Phéniciens ne se contentent pas de rêver, ils réalisent.» C'est avec cette phrase-clé que Mohammad Fantar, professeur d'histoire à l'Université de Tunis, a commencé son discours, en remerciant les organisateurs d'avoir offert aux conférenciers cet «espace sacré». Dans une intervention qui a vivement intéressé l'auditoire, il a présenté Tyr à travers la mythologie, d'une part, et les faits historiques, d'autre part. « Déjà vers 1000 avant Jésus-Christ, il y avait un historien de Beyrouth, Sanchoniaton, qui a raconté l'histoire de ceux qui s'appelaient Phéniciens ou Canaanéens », a-t-il dit.
Le professeur a poursuivi : «Ce que l'Orient a donné à la civilisation universelle, les Phéniciens ont été chargés de le transporter en Occident, jusqu'à Cadix... Aristote avait déjà, au IVe siècle av. J.-C., fait l'éloge de Carthage, fondée par la princesse Elissa de Tyr, qui a été la première démocratie de l'humanité, la reine de la Méditerranée, qui va diffuser le savoir et le savoir-faire des Phéniciens dans toute la Méditerranée
occidentale... »
Évoquant l'épisode de Zeus qui a enlevé une fille de Tyr, la princesse Europe, dont le frère Cadmos a, par la suite, introduit l'alphabet dans le monde grec, Mohammad Fantar a déclaré : « Entre la Phénicie et la Grèce, entre l'Orient et l'Occident, cette fusion va permettre une fécondité énorme dans la Méditerranée, ce qui deviendra plus tard le miracle grec... Il n'y a pas de pays méditerranéen sans une empreinte phénicienne, grâce aux constructions navales, avec des bateaux supportant la pression des vagues et coupant les eaux pour aller toujours plus loin: l'histoire est
passionnante. »
Et, continuant sur sa lancée : « On oublie tout ce qui nous est arrivé de Mésopotamie, ce pays actuellement soumis à la sauvagerie. Quand on parle de la Syrie, on pense à ces grandes métropoles de l'humanité, à Ebla (anciennement située ente Damas et Alep), dont la bibliothèque du roi contenait, au IIIe millénaire av. J.-C., 16000 tablettes manuscrites constituant un véritable trésor : si elles venaient à disparaître, l'humanité aura perdu une bonne partie d'elle-même. »
Le professeur Fantar est revenu sur la relation avec les Hébreux, « qui ont chanté les Phéniciens dans l'Ancien Testament, les architectes du roi Ahiram de Tyr qui ont construit le temple de Salomon à Jérusalem »...

Forger une autre idée du Liban, et dans un lieu non des moindres : tel est le tour de force que vient de réaliser à Washington la Fondation pour la sauvegarde de Tyr, présidée par Maha el-Khalil Chalabi, avec l'organisation de la Journée de Tyr à la Bibliothèque du Congrès, abolissant ainsi la distance géographique entre la cité phénicienne et Washington.Le 3 juin aura constitué...