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Liban - Rencontre

Henri Hélou, candidat jusqu’au bout pour favoriser le consensus et le jeu démocratique

Il a la finesse du roseau... et sa solidité. En dépit des tempêtes, des cris et des manœuvres, Henri Hélou maintient sa candidature à la présidence de la République et continue d'y croire. « Ce n'est pas pour moi une question de personne, mais de principe : je suis convaincu qu'au final, au Liban, il ne peut y avoir de solution que dans l'entente et le consensus », dit-il.
Candidat discret, mais au moins déclaré, contrairement à tant d'autres qui travaillent dans les coulisses et auprès des groupes d'influence sans afficher leur ambition, Henri Hélou explique que si, depuis un an, le blocage est total, c'est qu'il est temps de sortir du clivage politique horizontal et vertical entre le 14 Mars et le 8 Mars et alliés, qui paralyse le pays et ses institutions.


Entré effectivement dans la politique à la mort soudaine de son père, Pierre, en 2003 (qui avait tissé un réseau rare d'alliances allant de l'imam Moussa Sadr aux différentes parties chrétiennes), Henri Hélou a choisi dès le départ de se rapprocher de Walid Joumblatt et c'est ainsi qu'en 2005, il s'est retrouvé sur sa liste à Aley sans avoir rien demandé. Même chose en 2009, sans la moindre hésitation de part et d'autre. Là où certains font des pieds et des mains pour faire partie des listes dites fortes, Henri Hélou est entré naturellement et sans remous. L'entente avec Joumblatt a quand même connu une période de séparation qui a commencé le 21 janvier 2011, lorsque le leader druze avait préféré prendre ses distances avec le 14 Mars pour se rapprocher du 8, après la chute du gouvernement de Saad Hariri. À cette époque-là, Henri Hélou avait choisi de rester au sein du 14 Mars par conviction. Cela a duré quelques mois jusqu'au moment où il a senti que le 14 Mars utilisait contre le gouvernement Mikati les mêmes procédés qu'il avait dénoncés lorsque le 8 Mars les pratiquait, comme le boycottage et les protestations dans la rue. Le jeune député avait en effet retenu la leçon de son père en 1992, lorsque les chrétiens avaient boycotté les élections législatives. Pierre Hélou avait eu cette phrase qui résonne encore aujourd'hui : « Si la tenue des élections dans ces circonstances est un crime, le boycottage est un suicide. » Henri Hélou s'est donc retiré du 14 Mars sans pour autant intégrer un autre groupe.

 

(Pour mémoire : Hélou : L'entente, seul moyen de mettre fin à la vacance à Baabda)


Toutefois, juste après la chute du gouvernement Mikati, Akram Chehayeb entre en contact avec lui et lui suggère de rejoindre le bloc parlementaire dirigé par Joumblatt (qui était alors formé de sept députés), à présent que ce dernier a adopté une ligne « centriste », entre le 14 et le 8. L'idée de M. Chehayeb était donc la suivante : puisque nous avons la même approche et le même désir d'être au centre, pourquoi ne pas être ensemble ? Henri Hélou trouve l'idée séduisante et conforme à ses convictions sur le fait que seul le consensus peut constituer une solution aux problèmes du Liban. D'ailleurs, suivant son exemple, les autres députés qui s'étaient éloignés de Walid Joumblatt ont réintégré le bloc du Rassemblement démocratique qui compte aujourd'hui 11 parlementaires.


C'est d'ailleurs dans la volonté de concrétiser l'option centriste et pour sortir de l'antagonisme entre Michel Aoun et Samir Geagea qu'au cours d'une réunion d'évaluation tenue au début du mois d'avril 2014, Walid Joumblatt demande : pourquoi le Rassemblement démocratique ne présenterait-il pas un candidat à la présidence ? Le choix s'est fixé sur Henri Hélou avec toutefois deux conditions : d'abord que ce dernier accepte et ensuite qu'il ne soit pas lâché en cours de route. C'est ainsi que Henri Hélou est devenu le candidat du bloc joumblattiste, dans le but de trouver des issues à l'impasse constitutionnelle et institutionnelle dans laquelle se débat le pays.


Henri Hélou ne considère donc nullement être un instrument entre les mains du leader druze, tout comme il ne voit pas sa candidature à la présidence comme une manœuvre politique. « Il s'agit simplement de sortir le pays des camps retranchés séparés par une ligne encore plus infranchissable que celle de Maginot, derrière laquelle se cachent les deux grands courants politiques. Je reste convaincu qu'il n'y a pas d'autre solution que le consensus, et ma candidature vise à le rappeler. »


Il rejette les accusations selon lesquelles sa candidature bloquerait l'élection et compliquerait encore plus la situation. « Notre bloc parlementaire ne compte que onze voix. Par conséquent, dit-il, nul ne peut nous accuser d'empêcher la réalisation du quorum requis, puisque, avec ou sans nous, aucune partie n'a les deux tiers des voix du Parlement. Ce n'est donc pas ce bloc ni ma candidature qui empêchent la machine de tourner, mais la division politique. »


Sa candidature est ainsi un message clair de la part du bloc pour insister sur l'importance de l'entente et pour affirmer qu'il n'est pas question de marcher avec un camp contre l'autre, indépendamment des personnes, car ce serait privilégier un vainqueur contre un vaincu, ce qui serait contraire à l'esprit du consensus. Lorsqu'on lui fait remarquer que Taëf n'était pas non plus consensuel puisqu'il y a eu à l'époque un vainqueur et un vaincu, il répond que le contexte était différent. Il y avait une guerre et il fallait trouver un moyen de l'arrêter...
Contre vents et marées et même après plus d'un an de vacance présidentielle, Henri Hélou reste donc convaincu qu'au final, il n'y aura qu'un président consensuel. Mais si les différentes parties s'entendent sur une autre personnalité consensuelle ? « Je n'ai pas de problème. L'essentiel pour moi, c'est le principe et le fait de placer les intérêts du pays au-dessus des considérations personnelles. » Dans ce cas de figure, Henri Hélou pense même maintenir sa candidature et laisser le jeu démocratique prendre son cours, même si plus de cent députés sont d'accord sur un autre candidat.


Pour Henri Hélou, l'essentiel est de ne pas être une force de blocage et c'est ainsi qu'il conçoit le rôle du bloc du Rassemblement démocratique qui veut rapprocher les camps hostiles et non les séparer. Dans ce contexte, il précise qu'il est personnellement en faveur du quorum des deux tiers pour les séances d'élection présidentielle, selon le concept de la démocratie participative qui repose sur la participation de toutes les parties aux échéances nationales. Il résume ainsi la situation : « Avec l'élection à la majorité absolue, il y a certes des élections avec un vainqueur et un vaincu. Mais avec la majorité des deux tiers, c'est le pays tout entier qui devient gagnant. »


Pourquoi n'a-t-il pas élaboré un programme et ne fait-il pas campagne auprès des blocs parlementaires ? Henri Hélou répond qu'il ne veut pas faire des programmes spectaculaires avec des promesses qui ne peuvent pas être tenues en raison de la réalité des prérogatives présidentielles et du fait que le pouvoir exécutif est essentiellement entre les mains du Conseil des ministres. Mais il a effectivement fait le tour des blocs parlementaires et des pôles chrétiens et autres pour expliquer sa candidature et ses objectifs, en misant toujours sur les points qu'il peut avoir en commun avec ses interlocuteurs, quels qu'ils soient et quel que soit le bord auquel ils appartiennent.

 

(Pour mémoire : Henry Hélou : Pas de présidentielle sans dialogue)


Derrière sa courtoisie, Henri Hélou est en effet un redoutable négociateur. Il a même suivi récemment un séminaire sur « Les négociations avancées et la résolution des conflits » qui a renforcé sa conviction que le dialogue est le moyen le plus sûr de résoudre les conflits. Mais il faut créer un contexte qui lui soit favorable et qui lui permette de réussir. Cette approche est valable dans la vie personnelle, avec le conjoint, les enfants et les collaborateurs, comme au niveau national. Henri Hélou est donc favorable à tout dialogue entre les composantes de la société libanaise. « Même si l'entente entre les pôles chrétiens se fait à mes dépens, j'y reste favorable, car il s'agit d'une responsabilité historique face aux générations futures. »


Et l'histoire, Henri Hélou s'y intéresse de près, dévorant les livres qui évoquent notamment la période de la chute de l'Empire ottoman et le partage de Sykes-Picot. Il est donc conscient que la région tout entière est aujourd'hui en ébullition. Mais cela ne justifie pas à ses yeux le fait de ne pas chercher à résoudre les problèmes des Libanais, communs à tous. Pour lui, les Libanais sont plus unis qu'ils ne le croient, pris aujourd'hui dans les tourmentes politiques. Il s'agit simplement de mettre en évidence ces points communs et de se rappeler toujours que le peuple libanais est naturellement simple et même bienveillant...

 

 

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