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Culture - Exposition

Le printemps, un peu stérile, de Randa Ali-Ahmad

L'artiste présente Plein Soleil*, une exposition lumineuse et résolument optimiste, mais pas à la hauteur de ses ambitions.

Il ne faut pas être expert pour reconnaître la signature unique d'un tableau de Randa Ali-Ahmad. Chaussée de sandales cloutées, elle foule les toiles de ses pieds, laissant sur les couleurs vives (dont elle use et abuse) ces petites empreintes si reconnaissables. Années après années, la technique reste inchangée, mais pour cette nouvelle exposition, la peinture à l'huile remplace l'acrylique. « Je voulais faire quelque chose de différent, avec plus de vie, avec des personnages joueurs (...) Les couleurs sont plus riches et nous entrons dans leur monde », affirme Randa Ali-Ahmad, qui n'avait pas utilisé cette matière depuis la fin de ses études d'art, effectuées entre Beyrouth et Los Angeles.
Dans la galerie imprégnée d'une odeur de térébenthine, les toiles exposées sont des écrins pour des personnages saisis dans l'instant. Et il ne tient qu'au spectateur d'imaginer leurs histoires. Ils se regardent, parfois se répondent et racontent ensemble un récit éphémère. Disposée au milieu de ces vingt-neuf tableaux optimistes et colorés, une voiture rouge, celle de l'artiste, ressemble à une invitation au voyage.
« Il est plus difficile de mettre un peu de joie chez les gens que de la tristesse. C'est très facile de faire pleurer quelqu'un. Dans un pays comme le nôtre, c'est important de vivre l'instant, car, avec la guerre, nous ne savions jamais ce qu'il peut arriver. C'est le côté positif : on vit chaque instant comme s'il était le dernier. » Elle s'interrompt puis, avec un sourire gêné, précise : « Mais là, je dis des choses que tout le monde sait déjà... »
Mais il manque sacrément quelque chose.
On peut se contenter d'apprécier dans cette exposition son optimisme tout printanier. On peut aussi regretter ce regard moins léger, ou simplement plus lucide, que Randa Ali-Ahmad portait sur un autre printemps, celui des révolutions, avec l'exposition Arab Spring qu'elle présentait en 2012 dans la même galerie. À cette époque, il y avait aussi florilège d'œuvres fleuries et colorées, mais elles avaient un but : montrer l'espoir au cœur d'une région qui s'embrasait.
Avec Plein Soleil, la succession des visages souriants, des paysages ensoleillés, des fleurs bourgeonnantes et des (nombreuses) bulles de savons, censées représenter la beauté du momentané, paraît juste futiles, beaucoup plus qu'optimistes. Sans autre ambition que donner à voir de la beauté (là encore, tout est relatif) et de la légèreté, cette fois stérile.
Seule la vieille décapotable écarlate rongée par la rouille, disposée au milieu de la galerie sur un tapis de fleurs qui fanent, rappelle que les instants éphémères sont l'unité de mesure du temps qui passe. Et qui abîme.

*Jusqu'au 31 mai au Karagulla Bldg (Mina el-Hosn). De 11h à 13h et 15h à 19h.

Il ne faut pas être expert pour reconnaître la signature unique d'un tableau de Randa Ali-Ahmad. Chaussée de sandales cloutées, elle foule les toiles de ses pieds, laissant sur les couleurs vives (dont elle use et abuse) ces petites empreintes si reconnaissables. Années après années, la technique reste inchangée, mais pour cette nouvelle exposition, la peinture à l'huile remplace...

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