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Économie - Interview

« Il reste beaucoup à faire pour lutter contre le blanchiment d’argent »

Le cabinet d'avocats Justicia a participé jeudi à une conférence portant sur la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Son fondateur, Me Paul Morcos, revient pour « L'Orient-Le Jour » sur les principaux enjeux soulevés par ces questions.

Dans quelle mesure la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme vont de pair ?
Alors que le blanchiment de capitaux a pour objet de dissimuler leur origine illicite, le financement du terrorisme vise à en dissimuler la destination ; ce sont donc deux logiques différentes mais étroitement liées. Des organisations terroristes comme le groupe État islamique (EI) se financent à travers des dons en espèces, en prélevant des impôts sur les populations qu'ils contrôlent, en s'adonnant à la contrebande de pétrole, etc. Le recyclage de ces fonds dans l'économie réelle passe essentiellement par le secteur financier. Or, la numérisation des transferts de fonds a contribué à l'accélération du financement du terrorisme dans la mesure où ces groupes recourent souvent à des prête-noms qui n'ont même plus besoin d'être physiquement présents pour procéder à des virements bancaires.
Au-delà de ses enjeux moraux, la lutte contre ces pratiques obéit aussi à une logique purement instrumentale dans la mesure où cet argent sale circulant dans le circuit financier ne sert pas à financer l'économie réelle. Les dépôts provenant de la criminalité ne restent pas longtemps dans les bilans des banques et donnent des indicateurs trompeurs sur la monnaie en circulation et la croissance économique.

Quelles autres activités illicites sont susceptibles d'avoir recours au blanchiment de fonds ?
La corruption endémique qui règne au sein de l'administration publique constitue autre grand pourvoyeur d'argent sale. Si le secret bancaire ne facilitait pas le dépôt de ces fonds dans les banques, la corruption pourrait être plus facilement enrayée. Le fait que fonctionnaires corrompus déposent des quantités d'argent bien plus importantes que leurs revenus devrait pouvoir susciter la suspicion des banques et des questions précises sur l'origine de ces fonds.
De même la lutte contre le blanchiment suppose de contrôler les fonds générés par des activités illégales comme la prostitution, le trafic de drogue ou l'évasion fiscale ; ou l'ensemble des méthodes pour le recycler comme l'achat d'œuvres d'art ou les transferts de fonds effectués hors du système bancaire.

La régulation du secteur bancaire vous paraît-elle suffisante en la matière ? Quels aspects de la législation doivent être revus ?
Les banques libanaises ont intérêt à lutter efficacement contre ces pratiques, notamment parce qu'elles craignent d'être sanctionnées par les organismes internationaux ou américains, comme en témoigne l'affaire de la Lebanese Canadian Bank – en cours de liquidation pour avoir été accusée d'être au cœur d'un réseau international de blanchiment de fonds à destination du Hezbollah. La Banque du Liban et l'Association des banques ont d'ailleurs consenti à de réels efforts pour adopter des mesures de prudence contre les dépôts provenant de réseaux criminels et de la corruption. Leurs investissements dans des recrutements de spécialistes en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et dans l'installation de mécanismes informatiques pour mettre en application les mécanismes antiblanchiment sont considérables.
Mais il reste beaucoup à faire. Nous avons par exemple évoqué la nécessité de rationaliser l'échange d'informations entre les différents corps de métier entourant le secteur financier. Je pense notamment aux syndicats d'experts-comptables et à tous les métiers juridiques et parajuridiques, parmi lesquels les notaires, qui pourraient jouer un rôle important.
Quant au volet législatif, il est tributaire de la paralysie actuelle de l'activité parlementaire. Trois projets de loi attendent ainsi d'être adoptés pour mettre le Liban en conformité avec les nouvelles normes internationales de lutte contre le blanchiment et l'évasion fiscale. Le premier vise à amender la loi 318 de 2001, qui institue une Commission spéciale d'investigation (CSI) chargée de débusquer les transactions financières suspectes en levant éventuellement le secret bancaire. Cet amendement définit le blanchiment comme un crime en soi, qui inclut le financement des organisations terroristes, la corruption ou encore le trafic d'influence. Le deuxième projet de loi porte sur l'obligation de déclarer aux douanes tout argent transporté en numéraire qui dépasse 20 000 dollars. Le troisième texte s'inscrit dans le cadre des nouvelles normes mondiales sur l'échange d'informations fiscales instaurées par l'OCDE. S'il est adopté, un pays tiers pourra demander au Liban de lever le secret bancaire concernant une personne physique ou morale, au cas où des soupçons sérieux d'évasion fiscale – assimilée au blanchiment – pèsent sur elle.

Dans quelle mesure la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme vont de pair ?Alors que le blanchiment de capitaux a pour objet de dissimuler leur origine illicite, le financement du terrorisme vise à en dissimuler la destination ; ce sont donc deux logiques différentes mais étroitement liées. Des organisations terroristes comme le groupe État islamique (EI) se...

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LE BLANCHIMENT D'ARGENT NE S'ARRÊTERA JAMAIS ! LES "BLANCHISSEURS" ONT LEURS PROPRES CANAUX. LES LOIS ET LES RÈGLES SONT MALHEUREUSEMENT APPLIQUÉES UNIQUEMENT SUR CEUX QUI SONT LÉGAUX... DONC CADUQUES !!!

LA LIBRE EXPRESSION

07 h 43, le 16 mai 2015

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Commentaires (1)

  • LE BLANCHIMENT D'ARGENT NE S'ARRÊTERA JAMAIS ! LES "BLANCHISSEURS" ONT LEURS PROPRES CANAUX. LES LOIS ET LES RÈGLES SONT MALHEUREUSEMENT APPLIQUÉES UNIQUEMENT SUR CEUX QUI SONT LÉGAUX... DONC CADUQUES !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 43, le 16 mai 2015

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