Rechercher
Rechercher

Culture - Clôture Bipod 2015

« Flightless » d’Élias Aguirre, un homme-oiseau au vol cassé

Hier soir, pour le dernier maillon du festival de danse Bipod, après sept performances (bonjour Salomé et ses sept voiles !) où les corps ont fait vibrer et planer les spectateurs, la voix était au vol brisé d'Icare. Avec « Flightless » de l'Espagnol Élias Aguirre, battement d'ailes en solo, un peu décevant, dans un « Madina » à moitié vide.

Élias Aguirre, créateur et chorégraphe. Photo DR


Pour de vastes espaces, sans limites ni frontières, pour la plus haute des solitudes et un onirisme un peu baroque, une scène en blanc. Scène nue et habitée des chants et des cris des oiseaux dans des marécages et des forêts, lointains et invisibles. Décor sonore propice à un imaginaire sans retenue. Mais suffira-t-il pour que l'envol d'un oiseau empêtré dans ses pattes et plumages soit possible ?
Sous le rai de lumière, Élias Aguirre, créateur et chorégraphe, pique du côté de l'ornithologie pour ces images fugaces et fugitives où un oiseau échoué dans les rets des spots batifole et tente de se dresser sur ses pattes devant les spectateurs. Un homme-oiseau, sur fond de partition entre bruitages de fond de bois et musique rythmée comme des coups de boutoir, traverse les arbres et les frondaisons comme un fantôme insaisissable... Belle séquence avec projection sur grand écran.


Un danseur – en jeans moulant, torse nu, chemise près du corps, marcel dévoilant des épaules musclées, canadienne noire à capuche, cheveux soyeux – entre dans la peau d'un oiseau déployant des efforts intenses pour voler. Pour cela, des gestes de volatile aux aguets, traqué, inquiet ou simplement méditatif, contemplatif.
Un oiseau sautillant, clopinant, tournant sa petite tête en mouvements mesurés, dubitatifs. Un oiseau aux ailes qui n'aident pas à prendre le vol, à ras des herbes des prairies, comme absorbé dans un monde parallèle qui évolue, désespérément ou avec une certaine petite grâce, sur les planches. Pour trouver son équilibre, sa nature, sa voie et sa voix. En canard maladroit, estropié, à la fois émouvant et courageux, avec des velléités de force, de bravoure, de conquête de liberté absolue.


Expressions variées, captées avec un regard de scientifique, pour traduire les mouvements d'un volatile privé d'un vol plané au firmament... Pour dire tout cela, pour incarner tout cela, un corps saisi de confusion, de transes et de syncopes, tel un épileptique en prise avec ses crises, ses hantises, ses obsessions, ses visions, ses métamorphoses, qui sans être « kafkaiennes » invitent quand même, sans être aussi sérieusement canalisées, à un certain questionnement, une certaine réflexion.
Usant de tous les langages de la danse contemporaine, dans ses frétillements, ses audaces, ses culbutes, ses embardées, ses dérives, ses nervosités, ses gestes martelés ou brusques, ses accessoires d'absurde ionesciens ou beckettiens, ce « one man show » avance, en toute simplicité mais aussi avec une certaine emphase et sophistication de propos, en images brèves, concises, mobiles, éloquentes et grandiloquentes.
Images surprenantes, inquiétantes, peu familières, délibérément hors du rang, pour retrouver un état de nature. Comme ces oiseaux qui voudraient sillonner le ciel de leur vol libre, libéré, porteur d'espoir et d'une vie entre nuages et firmament.


Une fois de plus, la danse, comme un oiseau sur la branche, est non seulement l'art de mouvoir le corps, mime ou pantomime, mais aussi exploration et regard aux horizons les plus imprévisibles...

 

Pour mémoire

« Sweat Baby Sweat », un éperdu corps-à-corps amoureux

« Gerro, Minos and him », comme Dieu les a créés

Quand il danse, il devient quatre hommes

L'insoutenable légèreté du corps

 

 

Pour de vastes espaces, sans limites ni frontières, pour la plus haute des solitudes et un onirisme un peu baroque, une scène en blanc. Scène nue et habitée des chants et des cris des oiseaux dans des marécages et des forêts, lointains et invisibles. Décor sonore propice à un imaginaire sans retenue. Mais suffira-t-il pour que l'envol d'un oiseau empêtré dans ses pattes et plumages soit...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut