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À La Une - Syrie

La fortune de Rifaat el-Assad au crible des juges français

Photo d'archives de Rifaat el-Assad datant de mai 2005. Photo AFP

Un haras, des appartements par dizaines, comment Rifaat el-Assad, en rupture de ban avec le régime de Damas a-t-il pu bâtir en France une fortune immobilière évaluée à quelque 90 millions d'euros ? Des juges français dissèquent depuis un an le patrimoine de l'oncle du président syrien.

Pour l'association Sherpa, qui entend défendre les populations victimes des crimes économiques et dont la plainte en février 2014 a déclenché l'enquête, ces biens ont été acquis par l'argent de la corruption quand Rifaat el-Assad était le bras droit de son frère aîné Hafez, alors chef de l'Etat. C'est au décès de ce dernier en 2000 que son fils Bachar lui a succédé.

"Ce n'est pas de l'argent syrien", rétorque un des avocats de Rifaat el-Assad, Me Benjamin Grundler. Son client, entendu le 30 janvier comme témoin par les enquêteurs, a invoqué un soutien financier saoudien. "Des éléments attestant de l'origine légale de la fortune de Rifaat el-Assad ont été apportés", selon Me Grundler.

Accusé d'avoir mené la sanglante répression contre les Frères musulmans et notamment l'assaut sur la ville syrienne de Hama en 1982, Rifaat el-Assad, 67 ans, tombé en disgrâce, a été contraint à l'exil deux ans plus tard.

Mitterrand a été 'très gentil'

Au faîte de sa puissance, ses frais "étaient pris en charge par le gouvernement syrien", "tout l'argent qu'(il gagnait, il le donnait) aux pauvres", selon ses propos lors de son audition rapportés à l'AFP par une source proche du dossier. Le moment du départ venu, "je n'avais rien", a-t-il insisté. "C'est François Mitterrand (l'ancien président français décédé en 1995) qui m'a demandé de venir en France", "il nous a octroyé des permis de port d'armes, des agents de sécurité. Il a été très gentil".

A Paris, Rifaat el-Assad se lance pourtant dans d'importants investissements immobiliers. C'était "pour accueillir (ses) enfants et les gens qui (l')ont suivi", se souvient le sexagénaire désormais installé à Londres, et qui a insisté sur son désintérêt pour les détails d'intendance: "Je ne sais pas par quels fonds ils ont été financés"; "je m'occupe uniquement de politique"; "on m'apporte des papiers pour signer et je signe"; "je ne sais pas payer, même le restaurant".

Le patrimoine de sa famille a été détaillé par les enquêteurs des douanes dans un rapport du 15 mai 2014 dont l'AFP a eu connaissance: "La valeur globale du patrimoine immobilier détenu en France, par M. Rifaat el-Assad et sa famille, au travers de sociétés luxembourgeoises à prépondérance immobilière est d'environ 90 millions d'euros". Sur cette somme, "52,62 millions d'euros (sont) détenus indirectement par M. Rifaat al-Assad" via des sociétés, notamment une luxembourgeoise, Sounoune.
L'inventaire comprend un haras près de Paris, deux hôtels particuliers, deux immeubles et un terrain à Paris, ainsi que des bureaux à Lyon (centre-est).

Entendus comme témoins, plusieurs enfants de Rifaat el-Assad ont également évoqué le sponsor saoudien qui "a financé notre exil depuis 30 ans". "Le haras a été donné à mon père par le prince Abdallah d'Arabie Saoudite", roi de 2005 à 2015, a ainsi affirmé Soumar el-Assad, 43 ans.
Aujourd'hui, Rifaat vit "principalement de la vente des appartements (...) et de l'aide régulière de l'Arabie Saoudite", selon Siwar, 39 ans.

Rifaat a évoqué son amitié avec Abdallah, née d'une passion commune pour la chasse. Il a raconté qu'avant son exil "à chaque fois que la Syrie avait besoin de quelque chose, on (le) missionnait pour aller demander à Abdallah": "J'ai rapporté beaucoup d'argent à la Syrie sous forme d'aide".

Spécialiste de la Syrie, l'universitaire, Fabrice Balanche, est sceptique: "L'Arabie Saoudite n'a aucun intérêt à soutenir Rifaat qui ne représente rien", a-t-il dit aux enquêteurs qui disposent du témoignage d'un ancien employé de la famille. Celui-ci a raconté comment les appartements d'un des immeubles qu'il gérait "se louaient à la semaine ou au mois", une activité qui n'aurait "jamais été déclarée", selon ses dires.
Pour Rifaat el-Assad, l'enquête qui le vise répond à des motivations politiques. "Je trouve cette histoire étrange (...) Cette affaire n'est pas à l'honneur de la France".


Nicolas GAUDICHET/AFP


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commentaires (1)

C'est un ancien membre du gang qui gouverne la Syrie depuis quarante cinq ans. Alors tout s'explique.

Halim Abou Chacra

05 h 17, le 26 avril 2015

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Commentaires (1)

  • C'est un ancien membre du gang qui gouverne la Syrie depuis quarante cinq ans. Alors tout s'explique.

    Halim Abou Chacra

    05 h 17, le 26 avril 2015

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