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Liban - Interview

À travers la Finul, l’Arménie veut renforcer sa coopération militaire avec Beyrouth et Rome

« Nous sommes heureux d'aider un pays qui entretient des relations plus qu'amicales avec l'Arménie, et qui a accueilli à bras ouverts de nombreux Arméniens depuis le génocide de 1915 », a confié le ministre arménien de la Défense à « L'Orient-Le Jour ».

Le ministre arménien de la Défense a effectué une visite de trois jours au Liban.

En tournée au Liban pour trois jours, le ministre arménien de la Défense n'a pas perdu son temps. Entre sa visite auprès du contingent arménien au sein de la Finul, et ses rencontres avec le Premier ministre Tammam Salam, son homologue libanais Samir Mokbel et le commandant en chef de l'armée Jean Kahwagi, qu'il a vu hier, le général Seyran Ohanyan a trouvé le temps d'accorder une interview exclusive à L'Orient-Le Jour. L'occasion pour cet ancien guerrier, connu sous le titre de « héros du Haut-Karabakh », de revenir sur la participation de son pays aux forces onusiennes de sauvegarde de la paix au Liban-Sud.


« J'ai répondu aujourd'hui à l'invitation de mon homologue libanais, Samir Mokbel, et ma visite est spécifiquement liée à la création du contingent arménien au sein de la Finul, explique le ministre. Depuis novembre 2014, nous participons à la sauvegarde de la stabilité et de la paix le long de la ligne bleue, sous le commandement militaire de l'Italie. Nous avons déjà à notre actif des années de coopération avec le Liban et une longue expérience de relations bilatérales, sans oublier que nous avons déjà conclu un accord de coopération militaire en 2001. La collaboration au sein de la Finul est basée sur cet accord, et par notre visite, nous visons à accroître et développer cette coopération militaire, avec l'aide de l'Italie. Les négociations sont actuellement en cours à un niveau d'experts, pour trouver de nouveaux domaines de contribution. Nous avons déjà reçu la visite d'officiels libanais en Arménie sur ce plan. »
Et d'ajouter : « L'Arménie a beaucoup d'expérience en ce qui concerne la sauvegarde de la paix dans de nombreux pays du monde : en Irak sous commandement polonais, au Kosovo sous commandement grec puis américain, et en Afghanistan sous leadership allemand. La participation au sein de la Finul reste toutefois unique, car il s'agit d'un organisme mandaté par les Nations unies. Par ailleurs, nous œuvrons au sein d'un pays qui entretient des relations plus qu'amicales avec l'Arménie, depuis le génocide et l'accueil à bras ouverts par le Liban de nombreux Arméniens. La troisième particularité réside également dans le fait que nous coopérons en territoire libanais avec l'Italie, une nation à laquelle nous sommes liés par des relations historiques. »

 

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Entre Rome et Beyrouth
C'est en tout cas par une heureuse coïncidence que le général Seyran Ohanyan est arrivé samedi à Beyrouth en provenance directe de Rome, où il s'est réuni avec de nombreux responsables d'usines italiennes de fabrication d'armes et d'équipements militaires. À Rome, il a été principalement question de la mission conjointe entre les deux pays au Liban-Sud. Le président arménien Serge Sarkissian et le ministre Ohanyan s'y sont également entretenus avec leurs soldats au Liban-Sud via Skype. « Je suis content que l'Italie soit satisfaite de vos services au Liban », leur a déclaré alors M. Sarkissian depuis Rome.
« Si je devais évaluer notre participation à la Finul jusque-là, poursuit M. Ohanyan, je peux dire que nos soldats et notre pays savent s'adapter aux différentes missions et pays. Nos hommes ont pu rapidement se faire des repères sur le terrain et comprendre la situation pour adapter leur savoir-faire aux différentes épreuves, forts également de leur expérience au combat. Notre participation à la Finul est encouragée également par un important facteur : l'accueillante attitude des Libanais envers les Arméniens. »
M. Ohanyan ne cache pas en effet sa reconnaissance envers le peuple libanais pour avoir accueilli les Arméniens « comme des égaux ». Interrogé à propos d'un message qu'il aimerait adresser aux Libanais d'origine arménienne, il assure « ne pas être la personne habilitée ». « Les Arméniens portent la cause de l'Arménie et la douleur du génocide dans leur cœur et leur esprit. Pour l'occasion, j'aimerais souligner qu'un grand nombre d'activités seront effectuées pour cette centième commémoration. Elles seront toutes articulées autour du devoir de mémoire envers les victimes, du devoir de gratitude envers les pays qui nous ont soutenus durant ces 100 ans et qui ont reconnu le génocide, d'un message envoyé à la communauté internationale pour renforcer la reconnaissance internationale et éviter ainsi que ce genre de crimes ne se répète, et enfin autour de la renaissance de la nation arménienne. Une commémoration aura lieu le 24 avril, mais les activités se poursuivront durant le reste de l'année et au niveau de la diaspora. Ma présence au Liban, par exemple, vient rappeler à la communauté arménienne qu'il y a 100 ans, nous n'avions pas de quoi nous défendre et pas d'armes. Pas même le pouvoir de négocier. Aujourd'hui, les choses ont bien changé. »

 

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Une solution diplomatique au Nagorny-Karabakh
Interrogé par ailleurs sur le rapprochement entre l'Arménie et l'Iran, et sur une éventuelle influence de ce rapprochement sur le positionnement politique des partis arméniens locaux, comme le Tachnag, le général Ohanyan ne s'étend pas sur la question. « L'Arménie n'intervient pas du tout dans les affaires politiques intérieures du Liban ni dans les conflits à caractère confessionnel et religieux. Nous respectons les particularités de chaque pays et la diversité religieuse renforcée par la tolérance », assure-t-il.
Concernant enfin le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan sur le Nagorny-Karabakh qui prend de l'ampleur depuis déjà quelques jours, le ministre arménien affirme : « Nous soutenons une solution diplomatique et pacifique basée sur le dialogue, les efforts diplomatiques et le compromis, ainsi que la confiance mutuelle. » « Étant moi-même chargé des affaires d'ordre militaire, poursuit-il, j'assure que les conseils militaires d'experts devraient être pris en compte lors du règlement pacifique du conflit, et j'estime que les activités qui continuent d'être entreprises par l'Azerbaïdjan dans la région ne facilitent pas un règlement pacifique. En 2014 et en 2015, les opérations militaires entreprises par l'Azerbaïdjan ont conduit à une dégradation de la situation et provoqué des attaques répétées, ainsi qu'une multiplication de l'activité des francs-tireurs. Par expérience, nous avons compris que seules nos opérations de riposte pouvaient les calmer, surtout que nous sommes arrivés à un point où le président de l'Azerbaïdjan affirme que son pays revendique des territoires arméniens. » Et le ministre de la Défense de conclure, ironique : « Il y a quelques jours, j'étais à Rome et j'ai vu une ancienne carte géographique. J'y ai vu l'Arménie mais aucun signe de l'Azerbaïdjan. »

 

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