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Économie - Syrie

Damas veut sauver la livre en freinant les importations

Confronté à la dégradation graduelle de sa monnaie, qui a perdu 80 % de sa valeur par rapport au dollar en quatre ans, le gouvernement syrien tente d'enrayer la demande de devises des importateurs. Une stratégie compromise par l'effondrement de la production nationale censée être substituée aux importations.

Les autorités syriennes ont récemment décidé de freiner les importations et de favoriser les exportations pour enrayer la pénurie croissante de devises, une gageure dans une économie ravagée par la guerre et sous le coup d'un embargo occidental.
« Il y a un mois, j'ai été informé par un SMS du ministère des Finances qu'en raison du tarissement des devises, je ne bénéficierai plus pour mes importations d'un taux préférentiel pour l'achat de dollars de la part de la Banque centrale », explique à l'AFP un importateur de biens de consommation.
En Syrie, tout importateur doit obtenir du ministère de l'Économie une licence temporaire. Puis il peut demander à la Banque centrale des devises à un taux préférentiel. En cas de refus, il doit se débrouiller pour financer ses achats en acquérant des devises sur le marché parallèle ou à l'étranger.

Secret sur les réserves
Selon un responsable du ministère de l'Économie, cité par le quotidien al-Watan, les deux tiers des licences d'importations ont concerné au dernier trimestre 2014 des produits nécessaires à l'industrie, notamment le carburant, des produits agricoles comme le sucre, le riz ou la farine et des médicaments. Ces licences demandées se montaient à 2,7 milliards de dollars de biens, mais uniquement 1,2 milliard d'importations ont été autorisées, dont 13 % financées avec l'aide de la Banque centrale.
Le montant de réserves de devises de la Banque centrale est un mystère. « Le secret est bien gardé. Seule certitude : la livre syrienne a perdu 80 % de sa valeur par rapport au dollar en quatre ans », note Iyad Mohammad, trésorier de la Fédération syrienne des exportateurs.
Pour enrayer cette dégringolade, « il a été décidé d'accroître les exportations et de limiter les importations », a déclaré à l'AFP Farès Shehabi, président de la Fédération syrienne des Chambres d'industrie. « Ce que nous pouvons produire ici ne sera plus importé. Nous pouvons fournir le marché avec beaucoup de produits », a-t-il assuré.
Ces propos semblent bien trop optimistes. Même si la production industrielle a connu un rebond de 16 % en 2014, elle a néanmoins subi un déclin vertigineux et ne représente plus que moins d'un quart de sa valeur de 2010, selon le SCPR. L'autre gros secteur est l'agriculture, mais, là aussi, la production s'est contractée de 31,9 % en 2013 par rapport à 2012.

L'Irak, premier client
« Avec une industrie solide, il y aura des exportations importantes et donc des devises », assure Mazen Hammour, secrétaire général de la Fédération des exportateurs. « Le pays n'a pas besoin d'importer des produits de luxe, comme des ananas ou des fromages français. On doit importer des matières premières nécessaires à l'industrie afin de produire une marchandise de qualité digne d'être exportée », dit-il.
Mais les exportations sont entravées par un embargo concernant notamment le pétrole et le gaz, les produits financiers, les transports, imposé par les pays occidentaux. En 2014, les exportations ont atteint 1,8 milliard de dollars contre 11,3 milliards en 2010, selon le journal progouvernemental al-Watan. Et le ratio entre exportations et importations s'est nettement détérioré, de 82,7 % en 2010 à 29,7 % en 2014.
En raison de l'embargo et de la perte des champs pétroliers au profit des jihadistes du groupe État islamique (EI), la Syrie exporte surtout des produits agricoles et agroalimentaires, du textile et du cuir, des médicaments, des fleurs et de la céramique. L'Irak absorbe désormais la majorité des exportations, devant le Liban. Et l'argent ouvre toutes les routes. Pour l'Irak, les produits passent par le poste-frontière d'al-Tanef, dans le désert. « Puis le transitaire irakien se débrouille avec l'EI », explique M. Mohammad. Pour les pays du Golfe, les produits sont souvent exportés via la Jordanie.
Avec la crise, les commerçants syriens ont réactivé les réseaux secrets mis en place à l'époque de Hafez el-Assad, mais en sens inverse. À l'époque, il s'agissait de faire rentrer clandestinement des produits étrangers en Syrie.
Les quatre ans de guerre civile ont coûté plus de 202 milliards de dollars à la Syrie, selon le rapport annuel du Syrian Center for Policy Research (SCPR), une ONG syrienne qui travaille pour l'ONU.

Sammy KETZ et Rim HADDAD/AFP

Les autorités syriennes ont récemment décidé de freiner les importations et de favoriser les exportations pour enrayer la pénurie croissante de devises, une gageure dans une économie ravagée par la guerre et sous le coup d'un embargo occidental.« Il y a un mois, j'ai été informé par un SMS du ministère des Finances qu'en raison du tarissement des devises, je ne bénéficierai plus...

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