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Liban - Décryptage

Entre l’empire des mollahs et le royaume des wahhabites, la confrontation se précise

Les réactions violentes au dernier discours du secrétaire général du Hezbollah montrent l'ampleur des divisions internes et la gravité de la situation régionale. Désormais, les choses ont le mérite d'être claires : la confrontation est directe entre les houthis et les Saoudiens, et, malgré les tentatives iraniennes de garder les divergences dans les limites politiques et non confessionnelles, le conflit entre sunnites et chiites pourrait se préciser à travers cette nouvelle arène de combat et déchirer le monde arabo-musulman dans son ensemble.
Les milieux proches du Hezbollah ont beau rappeler que bien avant sayyed Hassan Nasrallah, le leader arabe mythique Gamal Abdel Nasser avait dans les années 60 dénoncé violemment les manœuvres des Saoudiens au Yémen (qui, à l'époque appuyaient les houthis, il faut bien le préciser), il n'en reste pas moins qu'aujourd'hui, les Saoudiens se veulent le fer de lance et l'âme d'un « réveil sunnite », puisqu'ils ont sollicité le soutien du Pakistan et de la Turquie qui ne sont pas des pays arabes, face à « l'hégémonie iranienne » qui étend son influence dans la région. Selon une source diplomatique arabe basée à Beyrouth, les Saoudiens avaient depuis quelque temps déjà commencé à préparer la formation d'une coalition « sunnite » pour contrer et défaire « l'Empire perse ». Ils en avaient parlé dans certaines capitales arabes, notamment à Abou Dhabi, au Caire et à Amman. D'ailleurs, une telle coalition ne peut pas être formée en 48 heures et elle n'est donc pas une riposte à la prise d'Aden par les houthis, comme cela a été dit. La source diplomatique arabe révèle ainsi que l'objectif de la création de cette coalition sunnite (dont le nom a été modifié par le sommet arabe de Charm el-Cheikh pour devenir « la force arabe commune ») est de commencer par frapper au Yémen en riposte « au coup d'État des houthis », en prélude à des frappes contre le régime syrien, dont la chute reste la grande obsession des Saoudiens. Toujours selon la même source, les avions de la coalition ont frappé sauvagement au Yémen des cibles civiles, espérant solliciter une réponse des houthis à l'intérieur du territoire saoudien pour polariser autour d'eux un vaste élan de sympathie arabo-sunnite qui leur permettrait d'agir en toute liberté là où ils le jugent bon, pour leurs intérêts et ceux « du monde sunnite ».


Mais ayant été à bonne école, les combattants houthis ont eu l'intelligence de ne pas riposter en Arabie. Jusqu'à présent, ils semblent avoir compris le piège qui leur a été tendu et ils ont choisi de répondre en poursuivant leur avancée sur le terrain dans le Sud, qui devrait leur permettre une percée stratégique sur la mer via le détroit de Bab el-Mandeb. Ils cherchent ainsi à imposer leur influence sur l'ensemble du territoire yéménite, exception faite de la zone contrôlée par les combattants d'el-Qaëda (pour l'instant en tout cas), lesquels sont aussi épargnés par les frappes de la coalition. En même temps, ils cherchent à gagner la sympathie de la population qui a un lourd contentieux avec les Saoudiens qui remonte à plusieurs décennies. De plus, les Yéménites étant un peuple assez pauvre, ils n'ont pas vraiment grand-chose à perdre avec les bombardements aériens qui visent leurs infrastructures déjà assez limitées.


Enfin, les dernières guerres dans la région ont montré que les bombardements aériens ne peuvent pas suffire pour remporter une victoire sur le terrain, que ce soit au Liban, à Gaza et même en Irak. Pour toutes ces raisons, la source diplomatique arabe estime que les Saoudiens risquent de s'enliser dans le bourbier yéménite et d'être au final contraints de lancer une offensive terrestre, sachant qu'en 2011, des combats féroces ont éclaté entre les houthis et les Saoudiens et qu'à ce moment-là, les houthis avaient réussi à occuper une quarantaine de villages saoudiens, dont ils se sont retirés par la suite.


Il est donc clair que les houthis sont bien entraînés et équipés et selon des estimations militaires, ils pourraient aligner près de 100 000 combattants si le besoin s'en fait sentir, sans parler d'une partie non négligeable de l'armée yéménite qui se bat à leurs côtés. Les Saoudiens, qui préparaient cette initiative pour éliminer l'influence iranienne au Yémen et après avoir créé ce précédent, pouvoir se tourner contre le régime syrien, tout en entraînant « l'empire des mollahs » dans une confrontation entre sunnites et chiites, pourraient bien se retrouver rapidement devant un choix difficile. Mais en refusant de lancer des missiles contre le territoire saoudien, les houthis montrent qu'ils veulent laisser encore une possibilité au dialogue. Tout dépendra donc de l'évolution de la situation sur le terrain.


Toujours à propos du terrain, l'armée irakienne et les forces de défense populaires ont profité du fait que tout le monde est occupé par les développements au Yémen pour reprendre Tikrit aux mains du groupe État islamique. C'est une victoire particulièrement importante parce que Tikrit est considéré comme le bastion des sunnites en Irak, alors que les forces de défense populaire sont à majorité chiite. Jusqu'à présent, une telle prise était jugée impossible en raison des dissensions confessionnelles. Mais, depuis hier, c'est fait et le comportement des forces de défense populaire à Tikrit va être suivi de près par tous ceux qui misent sur une guerre entre chiites et sunnites dans la région. Autrement dit, rien n'est encore joué et la guerre au Yémen pourrait devenir une complication de plus qui s'ajoute aux nombreux dossiers en suspens dans la région...

Les réactions violentes au dernier discours du secrétaire général du Hezbollah montrent l'ampleur des divisions internes et la gravité de la situation régionale. Désormais, les choses ont le mérite d'être claires : la confrontation est directe entre les houthis et les Saoudiens, et, malgré les tentatives iraniennes de garder les divergences dans les limites politiques et non...

commentaires (7)

CONFRONTATION À DEUX VITESSES DIFFÉRENTES !

MON CLAIR MOT A GEAGEA CENSURE

11 h 18, le 03 avril 2015

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Commentaires (7)

  • CONFRONTATION À DEUX VITESSES DIFFÉRENTES !

    MON CLAIR MOT A GEAGEA CENSURE

    11 h 18, le 03 avril 2015

  • Il suffisait de "déchiffrer" le titre : D'eux-mêmes, tous seuls les pâmés, ils sont passés de l'ébaubi "république islam(n)ique" au puéril "empire des mollâhs" ! Yâ harâm !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    16 h 11, le 02 avril 2015

  • Au lieu d'aller à Bab-el-Mandeb, certains de nos édiles zélés feraient bien d'aller à Bab-el-Majlès, place de l'Etoile, pour élire un Président de la République consensuel, impartial et libre qui ne s'aplatit pas comme une carpette devant qui que soit. Dix mois de vacance présidentielle est un complot venant de l'étranger. Notre capitale est Beyrouth ou une autre ville quelque part derrière nos montagnes ?

    Un Libanais

    14 h 57, le 02 avril 2015

  • Une chose est très sur, les Saoudiens, et surtout les pays arabes du Golfe, ne se seraient jamais hasardés dans une aventure guerrière s'ils n'avaient pas les garanties et le support nécessaires de la communauté internationale. Les Houthis peuvent être 100.000 ou 200.000 s'il y a décision de les défaits ils le seront. Ça prendra le temps qu'il faut mais cela se fera. La guerre qui s'est déclarer au Yémen a une portée bien plus importante que le conflit Chiite / Sunnites. C'est l’économie mondiale qui est en jeu et la plus personne ne blague.

    Pierre Hadjigeorgiou

    11 h 50, le 02 avril 2015

  • On arête pas de dire et on le repetera par souci deontologique vis a vis des beni oui oui , que l'intelligence est d'un cote et la barbarie financee de l'autre . Toutes ces victoires symboliques ou reelles decoulent d'une strategie plus globale de positionnement vis a vis du pays de l'usurpation constitutionnelle . Oui ! pas grave rigolons , mais l'alliance israrecel/ bensoudie est clairement etablie par les usurpateurs eux memes sur des plateau de tele comme france 24 . En fait de guerre chiite/Sunnite voulue et poussee par les bensaouds , il s'en retrouvera que les choses vont evoluer vers la guerre de savoir si la Palestine sera avalee sauce sio/bensaoud ou liberee selon les resistants a ce complot et qui impliquent des sunnites , chiites europeens ou chinois ou russes compris . On est comme au theatre ou on entend applaudir sur certains actes quand ca nous convient et d'autres applaudir d' autres actes .Jusqu'au denouement final ou les spectateurs auront tout le loisir de critiquer . Pour vous Scarlett c'est deja une standing ovation que je vous fais et je ne suis pas le seul .

    FRIK-A-FRAK

    11 h 40, le 02 avril 2015

  • Bravo Scarlett Haddad, ceci n'est pas un simple article mais une leçon en géopolitique régionale. Très admiratif, vraiment! Et puis dans les conflits, nous le savons bien tous, ce n'est celui qui a raison a raison, mais celui qui gagne la guerre sur le terrain.

    Ali Farhat

    10 h 11, le 02 avril 2015

  • Il est donc clair que les houthis sont bien entraînés et équipés et selon des estimations militaires, ils pourraient aligner près de 100 000 combattants si le besoin s'en fait sentir, sans parler d'une partie non négligeable de l'armée yéménite qui se bat à leurs côtés par qui? svp lool c'est bien parler pour parler mais nous on aime pas les blabla d'un seul coter ou en faveur d'un seul coter

    Bery tus

    05 h 51, le 02 avril 2015

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