Questions pour l’histoire

L'histoire a toujours suivi un chemin bien tracé et donné une réponse aux questions qui étaient posées. Mais aujourd'hui, nous ne savons plus où il se dirige et des questions commencent à nous tarauder l'esprit :
l La science a avancé au point de permettre la manipulation de la cellule vivante et la maîtrise de l'intelligence de l'homme, de son apparence, sa couleur de peau, sa taille, ses maladies, etc., mais les grands pays ont commencé à intervenir dans le travail de ces laboratoires, mus par des motivations religieuses, afin de limiter cette avancée scientifique dangereuse au niveau de la texture de l'humain et confiner l'activité de ces laboratoires au travail de protection de l'homme contre les maladies et rien d'autre... Mais qu'arriverait-il si ces grands pays se trouveraient régis par des systèmes politiques hitlériens, staliniens ou assadiens ?... Qu'arriverait-il à l'homme ?
l Le progrès scientifique a également abouti à l'accroissement de la longévité de la vie. L'espérance moyenne de vie ne dépassait pas, depuis pas longtemps, les soixante-dix ans. Elle a atteint à présent les quatre-vingt ou quatre-vingt-dix ans et ne cessera de progresser. Atteindra-t-elle peut-être les 150 ans ? Quid, dans ce cas, du nombre d'habitants de la planète ?
l Le despotisme qui a avili l'homme arabe et l'homme musulman dans les pays arabes et musulmans a réussi à faire haïr la vie au citoyen et à lui faire rechercher un moyen de la fuir. D'où l'accroissement du nombre de kamikazes qui ne dépassait pas les dizaines et qui se comptent maintenant par centaines et demain par milliers.
l Les Arabes d'Israël, à savoir les Palestiniens qui n'ont pas quitté la Palestine lorsqu'elle est tombée aux mains des juifs, sont devenus la troisième force parlementaire au sein de la Knesset et ne sont plus marginalisés et privés de leurs droits de citoyens. Se seraient-ils réfugiés dans les pays de la moumana'a qu'ils auraient eu le même sort que les Palestiniens de Syrie, du Liban et de l'Irak. Les Palestiniens d'Israël sont passés du stade de victimes de persécutions au stade de force parlementaire importante. Cela signifie-t-il que la récupération par les Palestiniens de leurs droits est possible par une voie autre que celle passant par Jounieh et Ouyoun as-Simane ?
l Une cassure grave s'est produite dans les relations politiques entre les États-Unis et Israël. La victoire de Netanyahu est une victoire remportée sur Obama. Celui-ci n'a d'ailleurs pu tenir aucune de ses promesses en raison de son extrême faiblesse politique. Le discours du Caire et ce qui en a suivi en réalité en est une des meilleures preuves. Les gens se demandaient d'ailleurs comment ce président noir avait pu renouveler son mandat !
Mais quels sont les résultats de cette cassure sur la situation d'Israël dans la région ?
l Un développement grave et étrange est intervenu dans les relations entre les États-Unis et les régimes arabes qui lui sont alliés. Une alliance politique alarmante, toute nouvelle et bien significative, est en train de se nouer entre les États-Unis et l'Iran. Le but est de profiter de l'assistance des chiites dans le combat contre ce que les États-Unis appellent les daechistes et les jihadistes. L'attaque menée par les chiites d'Iran contre les sunnites du monde arabe aboutira-t-elle à rassembler les sunnites et à en faire un vrai incubateur d'adeptes de Daech, al-Nosra, al-Qaëda... et des autres mouvements jihadistes ? Une vraie guerre civile meurtrière éclatera-t-elle entre les sunnites et le chiites où les Américains se rangeraient du côté de l'Iran et des chiites ? Cela aboutira-t-il à des changements stratégiques dans le golfe Arabique ?
L'Amérique et l'Occident sont-ils en train de faire la nécessaire pour se dispenser du pétrole arabe en se tournant vers le pétrole de schiste extrait des rochers et à des coûts bien inférieurs au coût actuel ?
l Assad restera-t-il en son palais sous une protection militaire iranienne ? Quid alors de la Syrie historique qui a vu le jour après la chute de l'Empire ottoman ?
Existera-t-elle toujours ou sera-t-elle aux mains de milices religieuses et confessionnelles qui se feront la guerre pendant longtemps ?
L'Iran s'enlisera-t-il encore plus dans les sables syriens et les milices confessionnelles, et les milices alaouites à leur tête se noieront-elles dans un bain de sang sans laisser pierre sur pierre ?
l La guerre froide s'est-elle terminée et n'est-elle plus une guerre entre les États-Unis et la Russie ? L'Europe est-elle sortie de la guerre froide ou non froide ? La France a catégoriquement refusé la position américaine de flirt et d'alliance avec Bachar el-Assad. Elle le qualifie toujours de boucher. L'enthousiasme des États européens à l'idée de déboulonner Assad a-t-il faibli ? Pourquoi l'Europe ne rejoint-elle pas la couveuse Amérique qui appelle à une alliance et à des négociations avec ce dernier ? L'Amérique est-elle à présent dans un camp et l'Europe dans un autre ? Est-elle devenue plus proche de la Russie que de l'Europe en ce qui a rapport à Assad ?
Existe-t-il maintenant une politique européenne totalement différente de la politique américaine ? La France est-elle toujours gaulliste ? En cette Allemagne leader de l'économie européenne, le nazisme est-il toujours actif ?
Et la France est-elle toujours le leader de la politique européenne ?
l Les musulmans sunnites sympathiseront-ils tous avec Daech ? Daech réduira-t-il sa barbarie ? Quel sera le sort des chrétiens ? Les chrétiens d'Orient portaient le flambeau de la culture européenne sans renoncer à la culture et à la richesse de la civilisation arabe. Que deviendront-ils ?
l Comment les chrétiens affronteront-ils les musulmans ?
Est-il vrai que les chiites seront les protecteurs des chrétiens ? Ou bien la communauté chrétienne renoncera-t-elle à son rôle politique et culturel pour se réfugier dans la religiosité et l'occultisme ?
Qui sait si les musulmans sunnites ne se transformeront pas eux-mêmes en daechistes ?
Ils constituent les 85 % des musulmans dans le monde et les chiites constituent les 15 % restants. Les sunnites majoritaires opteront-ils pour un nouvel occultisme et pour une nouvelle religiosité ?
Le vrai islam deviendra-t-il occulte et l'islam apparent deviendra-t-il daechsite ? Les musulmans sunnites seront-ils aussi au même nombre que les chrétiens ? Leur nombre sera-t-il réduit et leur rôle raccourci ? Les musulmans sunnites rejoindront-ils les chrétiens sur le radeau de la peur nourrie par les Daech et leurs avatars ?
l L'État libanais s'est-il effrité en ses éléments constitutionnels et légaux ? Il n'y a plus de président et rien ne présage une élection proche. Le Conseil des ministres ne fait que liquider les affaires courantes. Il fraude la loi en prenant des décisions à l'unanimité. Les tentatives de Tammam Salam de faire voter les décisions à la majorité réussiront-elles ? Le Parlement est-il une maison de repos pour Nabih Berry ? Peut-il voter une loi prorogeant le mandat de ses propres membres alors qu'en cas de vacance du pouvoir présidentiel, il se transforme en un simple organe de vote et non en un organe légiférant, et alors que toute loi requiert la signature du président de la République ? Aussi quelles sont donc ces lois votées par un Parlement qui a prorogé lui-même sa mission ?

La société libanaise est-elle divisée en trois sociétés : une société sunnite, une autre chiite et une troisième chrétienne avec des minorités et des peuples ? Est-elle composée de peuples qui se craignent ?

Le Liban a-t-il à présent besoin d'une nouvelle Constitution adaptée aux grands changements intervenus dans sa structure et qui régissent la relation entre ses communautés ? A-t-il désormais besoin d'un nouveau pacte national ?
La Constitution de 1920 (modifiée en 1943) est-elle toujours valable et le pacte national sur lequel les Libanais se sont mis d'accord en 1943 demeure-t-il valide ?
Le Grand Liban créé en 1920 s'est-il écroulé en 1975 et ce qui se déroule depuis 1975 n'est-il que bricolage ? Ou sommes-nous simplement dans l'attente d'une occasion historique pour un ravalement de l'édifice libanais en son ensemble ?

Abdel Hamid EL-AHDAB, avocat