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À La Une - Diplomatie

Nucléaire iranien : déclarations contradictoires alors que la date butoir est franchie

Lavrov parle d'accord préliminaire; Zarif optimiste; Fabius a quitté Lausanne.

Les négociations sur le nucléaire iranien devaient se poursuivre après le passage de la date butoir, dans la nuit à Lausanne. Fabrice Coffrini/AFP

Un certain flou régnait après le passage de la date butoir fixée mardi à minuit pour aboutir à un compromis dans les négociations sur le nucléaire iranien à Lausanne, entre Téhéran et les grandes puissances.

Côté russe, le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a fait état, dans la nuit, d'un accord global entre l'Iran et les grandes puissances sur toutes les questions clés en vue d'un règlement définitif du contentieux nucléaire iranien. "On peut dire avec suffisamment de confiance que les ministres (des Affaires étrangères) sont parvenus à un accord de principe sur tous les aspects clés d'un règlement de ce dossier", a dit en Suisse le chef de la diplomatie russe, cité par l'agence Tass. "Ce sera couché sur papier au cours des prochaines heures, peut-être dans la journée", a-t-il ajouté.
M. Lavrov a ajouté que l'annonce de "l'accord de principe sera faite par (le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad) Zarif et (Federica) Mogherini", la chef de la diplomatie de l'Union européenne. Selon M. Lavrov, "les détails techniques seront finalisés par les experts avant fin juin" date à laquelle les deux parties doivent conclure un accord final pour mettre fin à plus de 12 ans de crise dans le dossier nucléaire iranien.

 

"Toutes les questions n'ont pas été réglées"

Un diplomate proche des pourparlers a toutefois démenti les propos de Sergueï Lavrov. "Ce n'est pas vrai", a indiqué, à Reuters, ce diplomate, souhaitant rester anonyme. A l'AFP, un diplomate américain a également déclaré que "toutes les questions n'ont pas été réglées". La porte-parole du Conseil de sécurité nationale, Bernadette Meehan, a en outre indiqué que le président Obama s'est réuni avec son équipe de sécurité nationale mardi soir pour discuter des avancées dans les négociations sur le nucléaire iranien.

Dans le même temps, le cabinet du chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, indiquait que ce dernier avait quitté, aux premières heures de mercredi les négociations sur le nucléaire iranien. M. Fabius "rentre à Paris pour participer au Conseil des ministres. Il reviendra dès que ce sera utile", a précisé la source.

 

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Côté iranien, Mohammad Javad Zarif, s'est montré optimiste dans une déclaration à la presse. "De bons progrès ont été accomplis dans les discussions. Nous avons décidé de recommencer vers 06H ou 07H00 et nous espérons conclure aujourd'hui (mercredi). Ensuite on commencera la rédaction" de l'accord final qui doit voir le jour d'ici fin juin, a déclaré M. Zarif.

 

Suffisamment de progrès pour rester

Avant que la date butoir ne soit franchie, plusieurs délégations, notamment américaine, avaient affirmé avoir fait suffisamment de progrès pour continuer les discussions mercredi et tenter de régler les derniers problèmes. "Nous avons fait suffisamment de progrès au cours des derniers jours pour mériter de rester jusqu'à mercredi", avait déclaré la porte-parole du Département d'Etat Marie Harf, ajoutant qu'il restait cependant toujours "plusieurs sujets difficiles". Des sources diplomatiques occidentales, avaient également indiqué que les pays du P5+1 (États-Unis, Grande-Bretagne, Russie, Chine, France et Allemagne) ont fait savoir à la délégation iranienne qu'elle devait prendre une décision avant mercredi à l'aube. "Nous leur avons dit de se décider maintenant. Ça ne peut pas durer six jours de plus", a-t-on déclaré.

 

"On avance mais c'est compliqué, c'est long, c'est difficile, et je crains qu'on y passe la nuit", avait également déclaré, un peu plus tôt, Laurent Fabius lors d'une pause après une séance plénière qui a duré cinq heures. "Il n'est toujours pas clair s'il y aura un accord", avait estimé, de son côté, un diplomate allemand, décrivant "une atmosphère changeante". "Toute la journée, il y a eu des négociations difficiles sur les questions décisives", avait-il déclaré.

 

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Les négociateurs s'étaient fixé la date du 31 mars pour parvenir à un compromis historique sur ce dossier du nucléaire iranien qui plombe les relations internationales depuis 12 ans.
"Nos experts et diplomates travaillent sans relâche pour voir si nous pouvons parvenir à un accord. Nous continuerons bien sûr à travailler si nous continuons à faire des progrès, y compris demain, si c'est utile", avait ainsi déclaré en début de soirée un haut responsable du Département d'État.


Les pays du P5+1 et l'Iran tentent de parvenir à un accord d'étape ou à une entente de principe pour pouvoir poursuivre les négociations sur les détails de l'accord. Ce compromis, dont on ignore encore la forme qu'il pourrait prendre (déclaration politique, document partiellement publié..) constitue une étape fondamentale sur la route d'un accord final, avec tous les détails et annexes techniques, dont l'échéance a été fixée au 30 juin.
L'objectif de l'accord est de s'assurer que l'Iran, dont le programme nucléaire inquiète la communauté internationale depuis le début des années 2000, ne cherchera pas à se doter de la bombe atomique, en échange d'une levée des sanctions qui étranglent son économie.

 

(Repère : Ce que l'on sait du programme nucléaire iranien)

 

Les points qui coincent
Dans ces négociations, plusieurs points clés grippent depuis des mois.
En premier lieu, la durée de l'accord. Les grandes puissances souhaitent un cadre strict de contrôle des activités nucléaires iraniennes, particulièrement dans le domaine de la recherche et du développement, sur au moins 15 ans, mais l'Iran ne veut pas s'engager au-delà de 10 ans. "La question de la recherche et du développement est toujours en discussion", avait reconnu, mardi, Hamid Baïdinejad, l'un des principaux négociateurs à la télévision d'Etat. Il s'agit pour Téhéran de pouvoir développer dans le futur de nouvelles centrifugeuses plus puissantes et plus modernes pour faire de l'enrichissement d'uranium.


De même, la question de la levée des sanctions de l'ONU est aussi, depuis le début, un gros point de blocage. Les Iraniens voudraient voir tomber, dès la conclusion d'un accord, ces sanctions économiques et diplomatiques, jugées humiliantes. Or les grandes puissances veulent une levée graduelle de ces mesures liées à la prolifération nucléaire et prises depuis 2006 par le Conseil de sécurité de l'ONU.
"Beaucoup de questions liées aux sanctions ont été réglées", a cependant assuré M. Baïdinejad dans la journée d'hier. "Le détail de cela a été rédigé, mais nous sommes dans la phase finale des négociations et quelques aspects limités liés aux sanctions et quelques autres questions, notamment celle de la recherche et du développement sont toujours en discussion", a-t-il ajouté.


Tout au long de la journée, les protagonistes, de part et d'autre, ont souligné qu'un échec à conclure un accord avant la date butoir ne signifierait pas automatiquement la rupture et la fin de toutes les négociations. Mais tous s'accordaient à dire que la situation serait beaucoup plus compliquée et difficile, un échec des discussions de Lausanne ne pouvant que conforter les opposants à un accord, de Washington à Téhéran, en passant par Jérusalem ou Riyad.


Pour la troisième journée consécutive, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, est ainsi monté au créneau, affirmant qu'un accord à Lausanne ouvrirait la voie à un Iran nucléaire, et jurant qu'Israël ferait "tout" pour défendre sa sécurité. Le chef de la diplomatie saoudienne Saoud Al-Fayçal a, pour sa part, accusé les grandes puissances de "court-circuiter les intérêts des États de la région en faisant miroiter à l'Iran des bénéfices dont il ne pourra pas jouir sans qu'il coopère avec les pays de la région".

 

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