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Nos Lecteurs ont la Parole - Paul ANTONIOS

L’ordre ou le désordre des ingénieurs et architectes de Beyrouth ?...

Il fut un temps au Liban où plus rien ne fonctionnait et tout était pourri jusqu'à la moelle, sauf un seul organisme (comme l'irréductible village gaulois) qui résistait toujours et encore à la désintégration et fonctionnait vraiment bien, c'était l'ordre des ingénieurs et architectes de Beyrouth.
Et ça, j'en suis témoin, étant inscrit au tableau de l'ordre depuis plus de trente ans. Je ne m'étais jamais plaint et je n'avais jamais entendu d'autres collègues se plaindre de n'importe quelle procédure ou autre service offert ou géré par l'organisme.
Tout fonctionnait très correctement et on venait dans les locaux de l'ordre pour se détendre des cauchemars que nous faisaient subir – toutes sans exception – les administrations étatiques et municipales en charge des formalités relatives aux permis de construire des lotissements, des services de l'urbanisme et tutti quanti...
Ce temps-là est malheureusement révolu, et ce havre de paix et d'organisation qu'était l'ordre des ingénieurs et architectes est devenu, à son tour, une espèce d'administration type « trou noir » ;
tout est devenu compliqué, on a introduit des mécanismes pires que ceux en vigueur au Tanzim madani du caza d'à côté, pour ne pas les nommer tous.

L'enregistrement d'une formalité d'un permis banal de 1 400 m2, qui nous prenait un ou deux jours, avec le sourire, nous prendrait aujourd'hui disons un peu moins qu'une éternité,

1- il faut faire signer à nos clients des liasses de papiers en trois exemplaires supposés protéger l'architecte et voilà que le client, terrorisé, demande à consulter un comité de juristes, pour à la fin n'accepter de signer les documents que si nous, architectes, lui signons simultanément un désistement immédiat de tous nos droits. Voilà le résultat d'une procédure qui voulait protéger l'architecte et nous voilà tous nus, sans aucune protection...

2- La vérification des signatures, l'architecte étant soupçonné par son propre ordre d'être un falsificateur de signatures, il faut faire authentifier par des hordes de notaires et autre moukhtars tous les documents contre des honoraires inattendus. Donc trois à quatre jours de formalités inutiles, car aucun moukhtar ne vérifie quoi que ce soit, se contentant de contresigner à tout va n'importe quoi contre 10 dollars la ligne ; et là, je ne suis plus un falsificateur car le moukhtar l'a dit !

3- l'Aviation civile : l'ordre nous ordonne, à Beyrouth, d'aller voir les autorités de l'Aviation civile si l'immeuble projeté est de nature, avec ses 9 étages à Achrafieh, à empêcher les coucous de l'aéroport de bien planer au-dessus de la capitale ; donc 10 à quinze jours supplémentaires, plus dix allers-retours a l'AIB...

4- Les documents de l'urbanisme : au terme de ce périple, tous les certificats d'urbanisme deviennent périmés et il faut les refaire au Tanzim (chi Azim) avec 400 dollars à payer pour aller plus vite, soit au moins dix bonnes journées de prolongation de peine.

5- Le bureau de contrôle : cerise sur le gâteau, un des derniers présidents de l'ordre des architectes, voulant faire plaisir à une bande de copains, oblige tous les architectes des projets de plus de 35 mètres de haut de passer par le couperet des bureaux de contrôle qui n'ont ni la capacité ni le temps de gérer des milliers de permis, d'où une liste d'attente d'un mois. Et encore des tas de dollars à verser.
Je pourrai continuer mon énumération, si nous ne devions, moi et mes assistants, courir, faire des journées de queues pour tout simplement payer notre cotisation et notre assurance médicale, car le système informatique est saturé et en panne ; et plus personne ne répond au téléphone au siège de l'ordre car il y avait élection de représentants, autres copains à nourrir au frais de l'ordre.
Écoutez, chers lecteurs, je vous laisse et m'en vais m'inscrire à l'ordre de Tripoli, ils sont peut-être encore humains et modestes au Liban-Nord...
Sincèrement,

Il fut un temps au Liban où plus rien ne fonctionnait et tout était pourri jusqu'à la moelle, sauf un seul organisme (comme l'irréductible village gaulois) qui résistait toujours et encore à la désintégration et fonctionnait vraiment bien, c'était l'ordre des ingénieurs et architectes de Beyrouth.Et ça, j'en suis témoin, étant inscrit au tableau de l'ordre depuis plus de trente ans....

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