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Liban - Liban

Des garderies, où la mort est de garde, fermées par Bou Faour

Une semaine après la mort d'un nourrisson, Élio Mansour, âgé de quatre mois seulement, le ministre de la Santé a ordonné la fermeture de toutes les garderies qui exercent sans permis. Une mesure qui devait être prise depuis longtemps, selon le président du syndicat des propriétaires de garderies spécialisées, Charbel Abi Nader.

« Les garderies aux normes n’échapperont pas à un suivi régulier du ministère de la Santé », avertit Waël Bou Faour.

Le ministre de la Santé, Waël Bou Faour, a tenu hier une conférence de presse pour annoncer la fermeture des garderies exerçant sans permis. Il a affirmé dans ce cadre qu'il ne tolérera aucune violation de la loi. « Nous sommes l'autorité de tutelle de ces institutions dans la mesure où une grande partie des garderies sont rattachées au ministère de la Santé, tandis que le reste dépend directement du ministère des Affaires sociales », a-t-il expliqué. Il a regretté que la loi ne soit pas appliquée dans plusieurs secteurs, notamment celui des garderies. Une situation qui résulte, selon lui, de « l'inexistence de la notion d'État dans la mentalité de beaucoup de Libanais ». « Nous vivons dans une jungle où chacun recherche son intérêt personnel et son profit sans aucune considération pour les valeurs communes et l'éthique. La crise est une crise de valeurs en premier lieu », a déploré M. Bou Faour.


Les chiffres présentés lors de la conférence de presse montrent qu'il existe au Liban 509 garderies dont seulement 304 sont ouvertes sur base d'un permis censé réglementer la profession et assurer la présence d'un encadrement professionnel pour l'enfant, selon les normes fixées par la loi.
« Non seulement les propriétaires de ces institutions non réglementaires sont fautifs, mais les parents le sont aussi. Ils doivent s'assurer de la sécurité de la garderie et des qualifications du personnel avant de placer leur enfant entre les mains de personnes étrangères », a déclaré le ministre. « En novembre dernier, j'ai averti tous les propriétaires de garderie de l'obligation de régulariser leur situation dans un délai de trois mois sous peine de fermeture immédiate de leur établissement », a-t-il rappelé. Il a révélé qu'il comptait, dès le 11 mars, fermer les garderies qui n'ont pas respecté l'ultimatum lancé en novembre, mais qu'on lui avait conseillé de patienter encore afin d'éviter d'embarrasser les mères qui travaillent et qui ne sauraient où faire garder leurs enfants. Ainsi, le nouveau délai avait été fixé au 15 juin 2015. Entre-temps, 85 garderies ont régularisé leur situation, réduisant à 120 le nombre de celles qui sont non conformes au texte du décret 12286/2004.

 

La qualification des inspecteurs
Interrogé par L'Orient-Le Jour, le président du syndicat des propriétaires de garderies spécialisées, Charbel Abi Nader, a regretté le fait que des enfants innocents soient morts avant que le ministère n'intervienne. « En 2004, le syndicat a œuvré, en collaboration avec le ministère de la Santé, à faire voter en Conseil des ministres le décret 12286 qui régit la situation des garderies au Liban. Conformément à cette loi, la garderie doit assurer un environnement sain et sûr aux enfants. Le local, d'une superficie minimale de 150 m², doit ainsi comporter une pièce aménagée en quarantaine où les enfants malades seront placés sous la surveillance d'une infirmière diplômée, qui doit aussi s'occuper de la pouponnière où les nourrissons ne peuvent en aucun cas être laissés seuls, ainsi que des pièces séparées pour chacune des tranches d'âge (de 2 mois à 1 an, de 1 à 2 ans et de 2 à 3 ans) », a-t-il souligné.

Le local, a-t-il poursuivi, doit également disposer d'une aire externe ou interne consacrée aux jeux et spécialement aménagée afin d'éviter tout incident grave à l'enfant, d'une salle à manger, d'au moins deux toilettes – l'une pour les grands, l'autre pour les plus petits – équipées de façon à accueillir les enfants. Ces toilettes doivent être régulièrement nettoyées et supervisées par une assistante. « Quant au personnel, il doit comprendre une directrice professionnelle détentrice d'une licence en éducation, psychologie, soins infirmiers ou assistance sociale. L'équipe doit également compter au moins une infirmière diplômée qui sera engagée à temps complet ou à temps partiel, selon le nombre d'enfants à charge, et qui restera en permanence avec les enfants et sera la seule apte à intervenir en cas d'accident grave, des éducatrices professionnelles et un personnel auxiliaire... Pour un groupe de 20 enfants, il faut assurer une jardinière et une aide-jardinière, dans une pouponnière, une infirmière et une assistante pour chaque 10 nourrissons », a encore précisé M. Abou Nader. « Ce qui est grave, c'est que le ministère de la Santé envoie parfois des inspecteurs qui n'ont ni l'expérience ni les diplômes relatifs au secteur inspecté. Comment, dès lors, avoir confiance en leur rapport ? » a souligné le président du syndicat.

 

Garderies non conformes aux normes
Revenant sur les derniers incidents tragiques qui ont coûté la vie à plusieurs enfants dans différentes garderies non conformes à la loi, le ministre Bou Faour a fait part de son indignation parce qu'une de ces institutions non régularisées est tenue par des religieuses à Ajaltoun dans l'enceinte d'une école. Ceci est « strictement interdit par la loi, la garderie doit être géographiquement séparée de l'établissement où l'enfant va passer une grande partie de sa vie scolaire, selon M. Abou Nader. Aucune infirmière n'est embauchée dans cette garderie et le nourrisson Élio Mansour a été découvert immobile avec du sang lui coulant du nez deux heures et demie après avoir pris son biberon, et alors qu'on l'avait laissé dormir sans surveillance ». Le ministre a décidé de fermer cette garderie immédiatement.


La même décision a été prise pour les garderies « Bisso » à Hamra et « Dima » à Hay el-Sellom. Dans la première, les règles basiques d'hygiène ne sont pas respectées et aucun membre du personnel encadrant les enfants ne détient un diplôme en rapport avec le secteur. Dans la seconde, où un enfant a perdu la vie, les enfants ne sont sous la surveillance que d'une baby-sitter et d'une femme âgée. « Une enquête a été ouverte et plusieurs personnes sont en détention provisoire », a poursuivi M. Bou Faour.
Le ministre de la Santé a assuré, par ailleurs, que « la décision de fermeture de toutes les garderies non régularisées est irrévocable et qu'aucun recours ne sera accepté ». Et le ministre de conclure : « Les garderies réglementaires seront elles aussi sous étroite surveillance. »
Ces incidents ne sont pas les premiers et ne seront probablement pas les derniers dans ce secteur où le laxisme et l'incompétence se paient au prix fort. Beaucoup de garderies sont toujours opérationnelles sur le territoire libanais et ne sont même pas déclarées ou enregistrées auprès de l'État, ce qui contribue à accroître le sentiment d'insécurité et de laisser-aller dans un pays où le citoyen est trop souvent livré à lui-même et à son bon sens, sans aucune intervention ni aucun soutien des pouvoirs publics.

 

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Le ministre de la Santé, Waël Bou Faour, a tenu hier une conférence de presse pour annoncer la fermeture des garderies exerçant sans permis. Il a affirmé dans ce cadre qu'il ne tolérera aucune violation de la loi. « Nous sommes l'autorité de tutelle de ces institutions dans la mesure où une grande partie des garderies sont rattachées au ministère de la Santé, tandis que le reste...

commentaires (2)

mais oui, le temps est venu pour se réveiller et faire les choses autrement...mais je vois que les normes adoptées sont ben trop élevées pour ce qui peut venir d'un gouv qui offre très peu à ses citoyens. non?

Antoine Zaarour

22 h 04, le 27 mars 2015

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Commentaires (2)

  • mais oui, le temps est venu pour se réveiller et faire les choses autrement...mais je vois que les normes adoptées sont ben trop élevées pour ce qui peut venir d'un gouv qui offre très peu à ses citoyens. non?

    Antoine Zaarour

    22 h 04, le 27 mars 2015

  • Les normes établies par le ministère concernant les garderies ont été modifié au model des normes Européennes. Avant 2006, la seule garderie qui était en règle se trouvait a Naccache du nom de Petit Potam. Malheureusement les attaques qu'elle a subit pour des raisons politiques, Les propriétaires étant des nationalistes Libanais résistant l'occupation Syrienne, mais aussi en raison des garderies illégales qui ont foisonné durant la période d'occupation ont obligé les propriétaire de fermer boutique et quitter le pays afin d’éviter qu'il n'arrive quelques malheurs aux enfants. Les menaces ont été, a l’époque, directement adressé aux proprios et par écrit s'il vous plait! C'est vous dire l'arrogance de ces messieurs.

    Pierre Hadjigeorgiou

    10 h 41, le 27 mars 2015

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