Benjamin Netanyahu a obtenu une éclatante victoire aux élections législatives en Israël, mais était d'emblée mercredi sous pression des États-Unis pour renoncer à ses promesses de campagne radicales sur le conflit avec les Palestiniens. Les Européens ont, de leur côté, appelé à une relance du processus de paix israélo-palestinien au point mort depuis près d'un an, alors que M. Netanyahu vient d'enterrer l'idée d'un État palestinien tant qu'il serait chef de gouvernement.
Au pouvoir depuis 2009 mais donné battu par les sondages, M. Netanyahu a fourni une nouvelle démonstration de sa capacité à affronter les vents contraires en sortant grand vainqueur des élections de mardi annoncées comme un référendum pour ou contre lui. A 65 ans, l'homme fort de la droite est assuré, sauf surprise majeure, d'être appelé par le président Reuven Rivlin à assumer son troisième mandat consécutif, son quatrième en comptant celui de 1996-1999. Avec lui, la direction palestinienne, les États-Unis et la communauté internationale vont donc se retrouver a priori avec un futur chef de gouvernement qu'ils connaissent bien et avec lequel les relations se sont dégradées.
La campagne n'a pas contribué à les améliorer. Face aux sondages défavorables, et pour rallier les déçus et les indécis, M. Netanyahu a fait monter les enchères lundi en déclarant qu'avec lui au gouvernement, les Palestiniens n'auraient pas l'Etat auxquels ils aspirent.
(Lire aussi : « Une percée de la liste arabe serait un premier pas sur la voie d'une alternative politique »)
"Solution à deux États"
Un autre temps fort de la campagne de M. Netanyahu a été l'exceptionnel acte de défi qu'a représenté le 3 mars son discours au Congrès américain. A l'invitation des adversaires républicains de M. Obama, il y est allé dire tout le mal qu'il pensait de l'accord nucléaire en négociation avec l'Iran. Le secrétaire d’État John Kerry a appelé M. Netanyahu pour le féliciter et M. Obama le fera dans les prochains jours, selon le porte-parole de l'exécutif américain. Néanmoins le président américain "continue de penser qu'une solution à deux États est la meilleure façon de répondre aux tensions".
Le Premier ministre britannique David Cameron a lui aussi souhaité "voir une solution à deux États". Et la chef de la diplomatie de l'UE, Federica Mogherini a appelé M. Netanyahu à un "leadership audacieux" pour relancer les efforts de paix. La Maison Blanche a en outre fait part de son inquiétude face à des discours "qui divisent", en référence à des propos de M. Netanyahu sur le vote des Arabes israéliens, descendants des Palestiniens restés sur leurs terres à la création d'Israël en 1948, dont la liste a pour la première fois de son histoire terminé troisième avec 14 sièges selon les transpositions des médias.
Les Palestiniens, eux, n'avaient aucune illusion quant au scrutin israélien mais le triomphe de M. Netanyahu ne fait que les conforter dans leur détermination à intensifier les efforts contre Israël sur la scène diplomatique et à la Cour pénale internationale devant laquelle ils comptent poursuivre les dirigeants israéliens pour crimes de guerre. En même temps, la présidence palestinienne a dit qu'elle était prête à coopérer avec "tout gouvernement israélien" acceptant un État palestinien aux côtés d'Israël.
(Lire aussi : Après la victoire de Netanyahu, une "conclusion s'impose : la nation doit être remplacée")
Deux à trois semaines
M. Netanyahu n'a pas encore dévoilé ses plans pour le prochain gouvernement. Il "a l'intention de se mettre immédiatement à la formation du gouvernement afin d'achever cette tâche dans un délai de deux à trois semaines" et a commencé les consultations avec les chefs de partis, selon le Likoud. M. Netanyahu va devoir désormais décider s'il forme un gouvernement très à droite ou plus modéré pour faire face à la multitude de défis, auxquels s'ajoutent les menaces sécuritaires ou les attentes économiques et sociales.
En regroupant autour du Likoud, les formations nationalistes et ultra-orthodoxes ainsi que le parti à vocation sociale du nouveau venu Moshé Kahlon, M. Netanyahu forgerait une alliance a priori solide, forte de plus ou moins 67 sièges sur 120, selon les résultats quasiment définitifs. Les experts ont cependant conjecturé sur la possibilité d'un gouvernement d'union avec les travaillistes. Mais l'adversaire travailliste de M. Netanyahu, Isaac Herzog, et son alliée centriste Tzipi Livni ont signifié qu'un tel projet semblait mort-né. "L'opposition est la seule option réaliste que nous ayons", a dit M. Herzog.
Pour sa principale apparition publique dans la peau du vainqueur mercredi, M. Netanyahu s'est rendu au mur des Lamentations, haut lieu du judaïsme à Jérusalem. Il a rituellement placé un vœu en papier entre les pierres, avant de promettre de tout faire pour "la sécurité et la prospérité" des Israéliens.
Les résultats quasiment définitifs transposés en sièges par les médias accordent 30 sièges au Likoud, 8 de plus que ne lui en prédisaient les derniers sondages et 10 de plus que dans la Knesset sortante. La liste Union sioniste de M. Herzog, en obtient 24. Pour l'expert Emmanuel Navon, M. Netanyahu a réussi son tour de force aux dépens des petits partis de droite et du centre droit. "Il a réussi à créer la panique chez leurs électeurs en jouant du danger d'un gouvernement travailliste".
Lire aussi
Les innombrables défis qui attendent le prochain gouvernement israélien
Repère
Législatives israéliennes : ce qu'il faut savoir pour comprendre
commentaires (7)
CORRECTION ! MERCI : .... "la peau de l'ours, idem"....
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
15 h 16, le 19 mars 2015