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Économie - Entretien

Swiss Leaks : « Les Libanais cherchent surtout à diversifier leurs risques »

Le PDG et fondateur de FFA (Financial Funds Advisors) Private Bank, Jean Riachi, revient sur le scandale des Swiss Leaks, qui agite le monde des affaires depuis les révélations du quotidien français « Le Monde ».

La diversification relève d’un mode de survie pour les Libanais. Crédit photo : Gregory Demarque

En 2007, on comptabilisait 2 998 Libanais dans les fichiers de la banque HSBC pour, par exemple, 4 600 Américains. Comment expliquez-vous cette sur-représentation ?
Depuis la guerre de 1975, la diversification des risques relève en quelque sorte du « mode de survie » pour les Libanais. Il y a 20 ans, il leur était inconcevable de regrouper l'ensemble de leurs avoirs à Beyrouth : le risque souverain était trop élevé. Ils ont toujours pour réflexe de placer une partie de leurs avoirs en dehors du pays. Sans compter que la notion de « résidence fiscale » demeure assez floue pour des personnes qui ont souvent plusieurs passeports et plusieurs adresses. Même si les Libanais rapatrient progressivement une partie de leurs avoirs, ils maintiennent un arbitrage permanent entre le risque souverain du pays et la rentabilité escomptée des instruments dans lesquels ils pourraient investir au Liban. Schématiquement, les Libanais privilégient dans leur pays les dépôts à terme, les bons du Trésor dont les rendements demeurent élevés ou l'immobilier. En revanche, ils confient la gestion de leur fortune à des institutions à l'étranger.

 

(Lire aussi: Swiss Leaks : les Libanais doivent-ils déclarer leurs comptes en Suisse ?)

 

Outre la diversification des risques, quels intérêts ont les Libanais à placer leur patrimoine à Genève plutôt qu'à Beyrouth ?
Les banques spécialisées dans la gestion de fortune offrent peu ou prou les mêmes services d'une place à une autre. Ce n'est donc pas tant du point de vue des instruments financiers que Beyrouth se distingue des autres grandes capitales financières. Elle mise plutôt sur des aspects qualitatifs comme le fait d'offrir une véritable « relation de proximité » avec ses clients. À l'inverse cependant, la place est pénalisée par la volonté du fisc libanais d'imposer une taxe de 10 % sur les revenus de valeurs mobilières étrangères. Les banques libanaises sont d'ailleurs en plein contentieux avec le ministère des Finances à ce sujet et demandent l'application de l'article 3 de la loi votée en 2000 sur les activités d'intermédiation financière qui exonère de cette taxe les comptes ouverts au Liban. Mais pour l'heure, nous n'avons pas été entendus.

 

(Repère : Le Liban et les Libanais dans l'affaire SwissLeaks)

 

Plusieurs scandales financiers internationaux semblent ébranler le principe du secret bancaire. Ce dernier peut-il être maintenu au Liban ?
Soyons clair : le secret bancaire n'existe plus. Avec la loi Fatca, entrée en vigueur en 2014, qui met en place un échange semi-automatique d'informations entre les États-Unis et les autres pays, le secret bancaire était déjà sérieusement entamé. Aujourd'hui, les pays européens entendent mettre en place un système similaire pour lutter contre l'évasion fiscale. Sans compter sur les révélations de la presse comme les récents Swiss Leaks... Par ailleurs, le Liban, qui est déjà pénalisé par son risque souverain, subit également la défiance des acteurs internationaux du fait de l'actualité relative à des affaires de blanchiment d'argent, de financement du terrorisme ou d'évasion fiscale... Nos correspondants exigent souvent de notre part de dévoiler l'identité de notre client pour mener à bien l'opération demandée. Si nous refusons, non seulement l'opération n'a pas lieu, mais cela compromet en plus le maintien de nos relations avec ces intermédiaires, voire l'accès aux marchés internationaux. À FFA Private Bank, nous demandons à nos clients d'accepter de lever le secret bancaire si un correspondant l'exige. La transparence reste au final notre seule arme pour surcompenser la situation du pays.


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