Face à un parterre tout à fait acquis, au premier rang duquel l'émissaire iranien ne parvenait pas à cacher les larmes qui brillaient dans ses yeux, le secrétaire général du Hezbollah a prononcé un discours très attendu après l'opération de mercredi dans les fermes de Chebaa. Le message principal du « sayyed » a été réservé à la fin du discours d'une heure et demie, lorsqu'il a dit : « À partir de maintenant, nous ne nous sentons plus concernés par ce qu'on appelle " les règles de la confrontation ", ni la séparation des terrains d'affrontement. Autrement dit, nous sommes prêts à riposter à l'ennemi où qu'il soit et avec tous les moyens dont nous disposons. »
Le secrétaire général du Hezbollah a donc attendu la riposte de son parti à l'agression de Kuneitra pour définir sa nouvelle position qui est de ne plus respecter « les lignes rouges ». Même s'il a insisté à plusieurs reprises sur « la sagesse de la résistance, son courage et sa détermination ». Tout en précisant que le Hezbollah ne souhaite pas la guerre, Hassan Nasrallah a affirmé qu'il ne la craint pas non plus, conseillant aux Israéliens de ne plus le tester.
Nasrallah a commencé par expliquer les circonstances de l'attaque israélienne à Kuneitra, le dimanche 19 janvier, qui a causé la mort « de six plus un », selon ses propres termes (six cadres du Hezbollah et un général iranien), en précisant que le sang libano-iranien qui a été versé sur la terre syrienne montre les liens existentiels entre les Libanais, les Iraniens et les Syriens, unis autour d'une même cause et d'un même sort.
Nasrallah a encore précisé que cette attaque israélienne a eu lieu en plein jour et la décision avait été longuement étudiée par les responsables israéliens qui savaient parfaitement de qui était composé le convoi. Selon lui, les Israéliens ont pu mener cette attaque car ils se croient tout permis. Ils profitent de la situation actuelle dans le monde arabe et de l'inexistence de la Ligue arabe, ainsi que de l'absence totale « d'une décision arabe indépendante », qui n'apparaît que lorsqu'il s'agit de prendre position contre l'Iran ou contre d'autres pays arabes, comme le Yémen, la Syrie, au Sinaï, etc. Bien que les Israéliens n'aient pas ouvertement revendiqué l'attaque, pour le Hezbollah, les auteurs étaient évidents, tout comme c'était le cas lors de l'assassinat du sayyed Abbas Moussaoui. « Nous autres, nous revendiquons nos actes et nous nommons nos martyrs, dont nous sommes d'ailleurs fiers, puisque, pour nous, ils sont morts sur la route de Jérusalem », a dit Nasrallah.
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Selon le secrétaire général du Hezbollah, ce dernier a annoncé l'attentat et les noms des victimes, une demi-heure après l'événement. Ce qui a mis les Israéliens dans l'embarras. Il s'est alors lancé dans des explications vagues sur le motif de l'agression. Il s'agissait tantôt d'empêcher la préparation d'attentats, l'installation de rampes de missiles ou de lancer des opérations contre le Golan occupé, puisque le convoi se trouvait à six kilomètres de la frontière de la partie occupée par Israël. Et dans ces six kilomètres, des milliers de combattants du Front al-Nosra sont installés avec armes et blindés. Nasrallah relève le fait que le Front al-Nosra est la branche syrienne d'el-Qaëda et figure sur la liste des organisations terroristes. « Mais, a-t-il dit, Netanyahu et Ayalon ne sont pas effrayés par ces combattants. Ils les aident et vont même jusqu'à rendre visite à leurs blessés. Les Israéliens ont peur d'un convoi de deux voitures avec sept personnes non armées à bord ! »
« Que va faire le Hezbollah... »
« Sur le plan humain, a dit Nasrallah, nous souffrons comme tout le monde de la perte d'êtres chers. J'ai pleuré lorsque j'ai perdu mon fils, car je suis un père comme les autres. Mais sur les autres plans, nous considérons que le martyre est une bénédiction de Dieu. »
Nasrallah est revenu sur la confusion et l'anxiété qui ont régné chez l'ennemi après l'attaque. De dimanche 18 au mercredi 28, les Israéliens n'avaient qu'une question à la bouche : que va faire le Hezbollah ? Ils ont pris des mesures exceptionnelles le long de la frontière et dans le Golan. En même temps, les analyses se multipliaient, « certains disant que les Iraniens vont nous empêcher de réagir pour ne pas mettre en cause les négociations avec les États-Unis, etc. Mais tous nos amis n'acceptent pas que nous soyons humiliés. Au Hezbollah, nous avons très vite pris notre décision : nous devons riposter, nous devons punir l'ennemi et mettre un terme à son arrogance. Cela mérite quelques sacrifices, même si les choses vont aller jusqu'au bout ».
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Nasrallah a ajouté que la riposte a eu lieu, comme l'attaque, en plein jour, presque à la même heure, contre un convoi de neuf véhicules, par le biais d'un tir de missiles, qui a fait des morts et des blessés. L'attaque et la riposte sont donc presque identiques avec une différence, précise le sayyed : nous sommes courageux et nous menons une attaque frontale, la tête haute, et eux se cachent et n'osent pas revendiquer leur agression.
Nasrallah a ensuite abordé les conséquences de cette riposte, précisant que les Israéliens ont compris que les estimations de leurs commandements politiques et militaires qui se targuent d'avoir de l'expérience sont fausses et ils ont failli mettre Israël au bord du gouffre. Ensuite, il est devenu clair que l'armée israélienne ne peut pas briser la volonté et la détermination de la résistance. De même, la résistance libanaise a montré qu'elle est sage et rationnelle, et, enfin, les groupes takfiristes postés à la frontière du Golan occupé sont les alliés d'Israël et constituent « la nouvelle armée de Lahd ».
En conclusion, Nasrallah a confirmé tout ce qu'il avait dit dans une interview à la chaîne al-Mayadeen et il a déclaré à l'adresse des Israéliens qu'ils ont raison d'avoir peur car la résistance est courageuse, capable et sage, mais elle n'a pas de freins. Elle ne cherche pas la guerre, mais ne la craint pas, et est au contraire déterminée à remporter la victoire. « Ne faites pas de faux calculs, a-t-il dit aux Israéliens, et ne nous testez pas. Nous ne nous sentons plus tenus de respecter les règles de la confrontation, ni la séparation des lieux d'affrontement. Nous sommes prêts à vous affronter où que vous soyez et avec les moyens dont nous disposons. »
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commentaires (15)
IL POSE... SES RÈGLES !!!
LA LIBRE EXPRESSION
17 h 15, le 02 février 2015