Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole - Alain IBRAHIM

Anciens loyers : une génération désenchantée

Depuis quelque temps, le mouvement pour le droit au logement des anciens locataires connaît un regain de visibilité. Avec une crise des anciens loyers qui n'en finit plus de finir, les groupes membres du Front d'action pour la défense des droits des anciens locataires ont multiplié les interventions et les médias sont au rendez-vous. Peut-on en dire autant des locataires ? De l'avis de chacun/chacune, la mobilisation reste difficile.
Malgré les succès obtenus par le mouvement auprès des diverses instances politiques et gouvernementales, les choses ne bougent pas.
Comment ne pas remarquer que la vacance au niveau de la présidence de la République n'a suscité aucune manifestation et que le renouvellement du mandat de la Chambre des députés pour la troisième fois consécutive n'a mobilisé qu'une petite centaine de protestataires, dont un clown que l'on a voulu empêcher de prendre la parole...
Signe des temps, le dernier appel à manifester des parents des soldats enlevés n'a rassemblé quant à lui qu'une seule personne : moi-même, ainsi qu'une demi-douzaine de véhicules appartenant à différentes stations locales de télévision.
Croit-on au père Noël plus qu'aux légitimes revendications politiques, sociales et humanitaires ?
C'est le dilemme auquel est peut-être confronté le syndicat des propriétaires d'immeubles à anciens loyers qui, de son côté, est obligé de recourir à d'autres procédés, comme les réunions publiques dans des endroits fermés afin de ne pas sombrer complètement dans le ridicule. Leur dernière manifestation (qui a d'ailleurs conduit à une échauffourée) n'avait pu rassembler qu'une cinquantaine de personnes lors du dernier recours en annulation devant le Conseil constitutionnel. Les raisons à tout cela sont multiples,variées et faciles à comprendre.
L'obstacle majeur auquel a à faire face le mouvement pour la défense des droits des anciens locataires au Liban est le suivant : le Libanais n'y crois plus. On est loin des grands mouvements de masse des années 1989 et 2005... À l'euphorie a succédé la désillusion puis le désenchantement.
Nous avons affaire à une génération désenchantée,comme le chante si bien Mylène Farmer, qui s'enferme sur elle-même et ne bouge plus. Elle ne rêve que d'une seule chose : partir loin, très loin, et sans regarder derrière elle.
Quand on ajoute à cela l'angoisse et la peur que peuvent engendrer les rassemblements sur la place publique, la crainte de défier les autorités et les forces publiques dans un contexte régional agité, un snobisme généralisé et profondément ancré dans les mentalités, enfin la légendaire nonchalance levantine, on comprend que la partie est loin d'être gagnée.
« Dans la réalité, déménager est pratiquement le seul recours dont disposent les anciens locataires », déplore le porte-parole du mouvement, M. Antoine Karam, en parlant de la nouvelle loi sur les loyers. Selon lui, ce sont les personnes les plus vulnérables qui seraient les premières victimes d'une telle politique : chômeurs, personnes à revenus limités, peu alphabétisées, handicapées, réfugiées, retraitées etc. Cette crainte est partagée par la Ligue des droits et libertés et l'Association des juristes en droit social. Celui-ci estime d'autre part qu'avec le coût des loyers qui risque de bondir de 700 % à 1 000 %, selon les régions, dans cinq ans, le gouvernement Salam doit trouver des solutions aux difficultés vécues par les anciens locataires au lieu de les présumer à l'avance coupables d'être de mauvais locataires.
Pour beaucoup au sein du mouvement comme pour M. Zaki Taha, secrétaire général du mouvement, « agir sur les causes de l'incapacité de payer serait davantage porteur de solutions durables ».
Pensons particulièrement à l'insuffisance du contrôle des nouveaux loyers et des prix de l'immobilier, à l'absence de HLM, au niveau scandaleusement bas des prestations sociales, au salaire minimum qui n'a pas suivi le coût de la vie et à l'inflation galopante ainsi qu'aux hausses des prix, sans oublier le bakchich ou la corruption des institutions étatiques qui se répercute finalement sur le prix de revient et le prix de vente des produits et services au Liban.
Le logement doit être une nécessité pour le peuple libanais et non pas un portefeuille virtuel d'actions dans une sorte de Wall Street moyen-oriental.
Nous attendons bien sûr avec impatience les mesures qui seront prises lors de la prochaine réunion de la commission parlementaire de l'Administration et de la Justice pour éviter la mécanique des augmentations de loyers abusifs sur les locataires qui sont loin d'être des nantis.
Enfin, nous espérons un système progressif plus juste et non pas un système agressif qui vise à l'expropriation et à la paupérisation et l'exil des classes moyennes. Pour tout dire, il faut que l'État se réengage, parce que quant le bâtiment va...

Alain IBRAHIM
Membre du Comité pour la défense des anciens locataires

Depuis quelque temps, le mouvement pour le droit au logement des anciens locataires connaît un regain de visibilité. Avec une crise des anciens loyers qui n'en finit plus de finir, les groupes membres du Front d'action pour la défense des droits des anciens locataires ont multiplié les interventions et les médias sont au rendez-vous. Peut-on en dire autant des locataires ? De l'avis de...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut