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Liban - Éclairage

Le credo des jihadistes : semer le chaos pour mieux régner

En réponse à l’opération militaire effectuée dans la prison de Roumieh pour transférer les islamistes du bâtiment B où ils faisaient la loi à un bâtiment plus sécurisé, les parents des islamistes ont bloqué hier la route de Beddaoui.

Quatre kamikazes potentiels sous les verrous, une voiture piégée transportant 120 kg d'explosifs interceptée dans les parages de Ersal, des ceintures d'explosifs et des armes retrouvées à Bab el-Tebbané et des perquisitions soutenues depuis 48h à Tripoli suivies d'arrestations : tel est le bilan remarqué et provisoirement rassurant de l'armée au cours des deux jours.
Un concentré de violence et de terreur avorté à temps survient quelques jours à peine après le double attentat sanglant qui a secoué Jabal Mohsen et qui a fait neuf morts et trente-sept blessés. Ce retournement de situation après le calme relatif qui a prévalu sur la scène libanaise ne peut être dissocié du climat d'apaisement politique qui prévaut et qui atténue quelque peu la polarisation aiguë entre le 8 et le 14 Mars.

Une détente que l'amorce d'un dialogue entre le Hezbollah et le courant du Futur devait contribuer à consolider, mais qui n'est certainement pas pour plaire aux islamistes radicaux. C'est ce que rappelle une source militaire qui relève la nécessité impérieuse pour les groupes takfiristes d'opérer dans un milieu où règnent le chaos et la division. Une règle d'or pour pouvoir semer le trouble et la terreur. L'apaisement ne peut leur être bénéfique dans la mesure où les forces de l'ordre – une fois affranchies des tâches sécuritaires secondaires mais non moins pesantes au quotidien – peuvent vaquer aux choses sérieuses et aux missions prioritaires telles que la lutte contre le terrorisme. « Dans un état de bouleversement et de désordre ponctué d'incidents itinérants, les jihadistes sont à l'affût de la moindre brèche pour s'y engouffrer », explique la source.

 

(Lire aussi : Le dialogue Futur-Hezbollah progresse lentement mais sûrement)


Force est de constater par ailleurs qu'un éventuel rapprochement entre sunnites et chiites libanais ne correspond nullement à l'agenda des jihadistes qui craignent de voir les deux communautés joindre leurs efforts pour les combattre, ne pouvant plus bénéficier de quelque couverture que ce soit. La source cite pour exemple l'exploit réalisé par le ministre de l'Intérieur, Nouhad Machnouk, à la prison de Roumieh, une opération qui a nécessité que la couverture politique soit préalablement ôtée, celle-là même qui protégeait jusque-là la clientèle islamiste sunnite de ce lieu carcéral. La manifestation des parents des détenus islamistes organisée hier à Beddaoui, au nord de Tripoli, vient confirmer ce constat. Les protestataires ont pourfendu le ministre de l'Intérieur, ainsi que le courant du Futur dans son ensemble, les accusant d'avoir lâché leurs fils et de comploter contre les sunnites et les partisans de la révolution syrienne islamistes en exécutant la politique du Hezbollah.

Autre point important à mettre en évidence, le fait que les deux kamikazes arrêtés par l'armée – Bassam Nabouch, Élie Warrak –, ainsi que Samir Khayyal et Bilal Marehy'an, les deux personnes derrière l'attentat-suicide de Jabal Mohsen, sont tous libanais. Pour les jihadistes, qui cherchent à recruter partout où ils le peuvent, le choix de former des Libanais et de les charger de mener des opérations sur leur propre territoire est certainement plus payant en matière de discorde que si les attentats étaient exécutés par un Saoudien ou un Yéménite.
Le fait que deux Libanais de Bab el-Tebbané ont semé la mort dans le quartier voisin est susceptible de provoquer un appétit de vengeance et une réaction adverse, ressuscitant ainsi les vieilles haines et la zizanie entre sunnites et alaouites à Tripoli. C'est exactement ce que recherche le Front al-Nosra, qui a parrainé cette opération à partir de la prison de Roumieh et du camp de Aïn el-Héloué. Un autre repaire de radicaux auxquels l'État promet de trouver une solution très prochainement, de la bouche même du ministre de l'Intérieur.

Il reste bien entendu la question de savoir pourquoi c'est Tripoli qui est, une fois de plus, pointée du doigt ? Pourquoi une grande majorité des jihadistes provient de cette ville ? C'est de là que sont issus Chadi Mawlawi, Oussama Mansour, ainsi que Nabouch, Warrak et Abdel-Kader que Mawlawi aurait lui-même recrutés et téléguidés à partir du camp de Aïn el-Héloué où il se trouverait actuellement. La capitale du Nord est certes connue pour son conservatisme religieux et pour avoir abrité les pères fondateurs du salafisme et la nouvelle génération d'islamistes dont une large partie reste toutefois modérée. Du moins jusque-là. Mais cela ne suffit pas pour expliquer l'engouement d'une jeunesse pour le combat et la violence, voire même pour le martyre. Bassam Nabouch n'a que 18 ans. Également jeune, Élie Warrak, 22 ans, un chrétien nouvellement converti à l'islam, a surpris l'opinion publique libanaise, peu familière avec des conversions de ce type, même si elles sont déjà en vogue depuis bien longtemps en Europe. « Il s'est converti il y a à peine 2 mois, et il affirme être déjà prêt à aller se faire tuer dans le cadre d'une opération terroriste. Incompréhensible », conclut la source militaire.

 

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commentaires (4)

POUR MIEUX S'Y FAUFILER ET INTERVENIR...

LA LIBRE EXPRESSION

21 h 38, le 17 janvier 2015

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • POUR MIEUX S'Y FAUFILER ET INTERVENIR...

    LA LIBRE EXPRESSION

    21 h 38, le 17 janvier 2015

  • Incompréhensible non .Sous l' effet de la drogue tout homme sutout s'il est jeune peut devenir crimminel .

    Sabbagha Antoine

    12 h 16, le 17 janvier 2015

  • Plus jamais ne pas dire la vérité et céder au "takazob" hypocrite, nocif, subversif. Tripoli est riche en "jihadistes, takfiristes et kamikazes" criminels, parce que Tripoli est riche en cheikhs qui sont des "concentrés de violence et de terreur" et qui endoctrinent ces jihadistes, ces takfiristes et ces kamikazes. Comme ce cheikh qui harangue, en insultes au ministre de l'Intérieur, la foule qu'il a regroupée en "solidarité avec les islamistes de Roumieh". Il n'y a pas des Chadi Mawlawi et des Oussama Mansour à Tripoli sans, derrière eux, des cheikhs irresponsables et qui méritent même un qualificatif bien plus fort. Ces cheikhs tiennent à donner de l'islam l'image la plus sinistre de religion de l'intolérance, de la violence, des assassinats et des tueries. C'est étonnant que Dar ef-Fatwa permette à ce jour que de tels cheikhs aillent si loin dans leur irresponsabilité.

    Halim Abou Chacra

    09 h 42, le 17 janvier 2015

  • "Une voiture piégée transportant 120 kg d'explosifs interceptée, des ceintures d'explosifs et des armes retrouvées et des perquisitions soutenues depuis 48h suivies d'arrestations : tel est le bilan remarqué et provisoirement rassurant des services de sécurité !". On dirait le même modus vivendi pratiqué lors de l'arrestation de l'infiltré Michel Samaha dit le pardonneur !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    06 h 52, le 17 janvier 2015

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