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Liban - Écologie

Traitement des déchets solides au Liban : « Un pas de géant »

Le Liban part de zéro dans le secteur du traitement des déchets solides. Un projet financé par l'UE soutient le pays à travers une initiative audacieuse qui tente de mettre en place des solutions efficaces aux municipalités en matière de santé publique, d'environnement, mais aussi d'éco-business.

Les bouteilles et autres objets en plastique doivent être envoyés au recyclage.

Avoir un Liban propre – au vrai sens du terme – n'est plus un rêve et pas seulement parce que le gouvernement vient d'adopter un plan pour la gestion des déchets ménagers. Grâce à un projet financé par l'Union européenne (UE), une dizaine d'usines de traitement des déchets solides ont été construites à travers le pays pour combler un manque cruel dans ce secteur.
Mis en œuvre par Omsar (ministère d'État pour la Réforme administrative), bien avant l'approbation du plan de gestion des déchets ménagers, 17 projets ont été sélectionnés en collaboration avec des municipalités éparpillées dans tout le Liban. «Des bennes à ordures et des camions ont été distribués. Des usines de traitement de déchets (pour tri et compostage) ont été bâties et des campagnes de sensibilisation pour encourager les gens à trier leurs déchets dès la maison ont été lancées», explique Roula Kabbani, responsable du projet au sein du ministère.


Des usines ont été bâties à Tyr, Khiam, Ansar, Minié, Mechmech, Baalbeck, Nabatiyeh et Chouf Sawayjani.
Toutes les usines ont été construites. Certaines ont démarré et traitent les ordures. D'autres, dont la construction est également terminée, n'ont toujours pas fonctionné, comme celle de Chouf Sawayjani.
«Le seul fait d'avoir réussi à construire une usine est un vrai succès, même s'il n'est que de l'ordre de 70%. Vingt pour cent du succès viendra ensuite de sa mise en marche. Restent 10% du succès de l'opération en elle-même qui est un processus d'apprentissage», estime Mohammad Baraki, l'ingénieur responsable du projet. Selon lui «la première étape et la plus importante a été de convaincre les municipalités et les habitants de chaque région d'accepter l'idée d'avoir chez eux une usine de traitement de déchets» avec tout ce qu'elle représente comme préjugés sur les odeurs nauséabondes et le risque de pollution.
Aujourd'hui, explique Roula Kabbani, ces usines fonctionnent grâce aux fonds versés par le gouvernement libanais. Ainsi, le Conseil des ministres a déboursé durant les trois dernières années près de 15 millions de dollars pour rembourser les frais qui ont découlé de l'usage des usines en fonctionnement, surtout que les municipalités n'ont pas d'argent pour le faire.


Dans les petites municipalités, les usines sont gérées par le conseil municipal directement. «Quand l'usine est petite et qu'elle opère grâce à la municipalité, le succès est garanti dans la mesure où la municipalité n'épargne aucun effort pour la faire fonctionner afin de résoudre le problème des déchets dans sa circonscription», note Mme Kabbani.
Dans les grandes municipalités comme celle de Tyr, la présence d'un opérateur est nécessaire pour faire fonctionner l'usine, selon un cahier des charges bien précis. Or plusieurs difficultés entravent le fonctionnement des grandes usines, notamment le fait qu'elles doivent être employées par plusieurs municipalités. Certaines refusent de s'associer au projet pour différentes raisons: les distances, les problèmes de transport...
«Il est normal que le fonctionnement de ces usines présente quelques problèmes, puisque nous avançons presque par tâtonnement. Mais les solutions que nous avons trouvées nous ont aidés dans la construction des autres usines comme celle de Minié », affirme toutefois Mohammad Baraki.

 

Le cas de Tyr
C'est le cas de Tyr, où c'est la Fédération des municipalités du caza qui est en charge de l'usine. Sa construction a débuté en 2002 avec un soutien d'Usaid, et elle a continué avec l'aide de l'UE.
«Au départ, le bâtiment a été construit selon un système déterminé qui s'est avéré inefficace dans notre cas. Nous avons dû repenser tout le système pour qu'il puisse correspondre à nos besoins », explique l'ingénieur Jalal Abd Ali, responsable du département technique au sein de la Fédération des municipalités de Tyr.
L'usine est située à quelques kilomètres de la ville. Le site se trouve au beau milieu de la circonscription pour être accessible facilement à partir des différentes municipalités qui viennent y décharger leurs déchets.
Sur place, les camions font leur ballet quotidien sous l'œil attentif du directeur Ali Amhaz qui explique le fonctionnement de la manufacture qui traite actuellement près de 120 tonnes de déchets par jour.
Un imposant hangar surplomb le site. À l'intérieur, les odeurs sont suffocantes. Mais les ouvriers travaillent d'arrache-pied comme si de rien n'était. Les uns trient les sacs en plastique, les autres commencent le tri des ordures. De l'autre côté de la chaîne, les camions font stocker le plastique à part, le verre, le carton, etc.
Les déchets sont triés, puis envoyés au recyclage. Restent les matières organiques, qui sont traitées et compostées pour être utilisées comme engrais par les agriculteurs.


Mais le rendement reste faible, parce que le volume des déchets qui arrivent à l'usine reste en deçà de ce qui était initialement prévu, explique Mme Kabbani: ce problème majeur a augmenté avec la crise des refugiés syriens au Liban. Ce sont les gens pauvres (qu'on appelle des charognards) qui ramassent dans les bennes à ordures et trient le verre, le carton, le plastique ou les déchets en métaux, pour les vendre. Ce qui défavorise le travail des usines.
«Nous essayons tant bien que mal de réduire les déchets qui restent et qu'on ne peut pas utiliser», explique en outre M. Abd Ali qui estime que le Liban a un problème d'expertise. «Nous travaillons par tâtonnement. Notre usine a été un terrain d'expérience pour améliorer notre rendement. Surtout que nos déchets urbains ont leurs spécificités. Nous jetons trop de nourriture, nous n'avons pas beaucoup de déchets recyclables. Nous avons trop de sacs en nylon par exemple», déplore-t-il. Mais c'est un «pas de géant qu'on est en train de faire», ajoute-t-il fièrement. «Avant, il n'y avait que des dépotoirs à ciel ouvert, éparpillés chaotiquement à travers la campagne.»
«Au Liban, nous commençons de zéro. Nous avions des enfouissements chaotiques», renchérit M. Baraki. qui précise que «nous sommes au tout début du traitement des déchets solides, une expérience bien loin de l'Europe qui est en avance dans ce domaine. Sans oublier que chaque pays, chaque région, a des habitudes différentes entraînant des ordures différentes, etc. » Mais en gros, il s'agit, à ses yeux, d'un processus d'apprentissage réussi.


Un autre avantage du projet est la création d'un marché privé chargé du recyclage des déchets. «Il y avait un problème avec le verre et les sacs en nylon. Actuellement, de petites entreprises prennent en charge ces déchets pour les recycler», affirme M. Abd Ali.
Le projet financé par l'UE «a permis d'encourager l'investissement dans le secteur privé grâce à l'éco-business. Ce qui a, bien sûr, favorisé la création d'emplois dans le pays. Il a également présenté une solution pour les municipalités en matière de santé publique et d'environnement», précise M. Baraki.
D'après lui, c'est un système de gestion complet qui doit être étudié, de la poubelle dans les foyers jusqu'à l'usine. Une idée que confirme le président de la Fédération des municipalités de Tyr, Sayed Abd el-Mohsen Hussein. Selon lui, l'État doit faire plus pour légiférer et organiser dans un secteur qui reste très primitif.

 

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Avoir un Liban propre – au vrai sens du terme – n'est plus un rêve et pas seulement parce que le gouvernement vient d'adopter un plan pour la gestion des déchets ménagers. Grâce à un projet financé par l'Union européenne (UE), une dizaine d'usines de traitement des déchets solides ont été construites à travers le pays pour combler un manque cruel dans ce secteur.Mis en œuvre par...

commentaires (2)

AU DEVANT... OU... EN ARRIÈRE ? IL RESTE À VOIR !

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 39, le 16 janvier 2015

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Commentaires (2)

  • AU DEVANT... OU... EN ARRIÈRE ? IL RESTE À VOIR !

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 39, le 16 janvier 2015

  • "...avoir un Liban propre n'est plus un rêve..." quelle bonne nouvelle ! Félicitations à tous ceux et celles qui ont commencé à travailler pour résoudre le problème des déchets, leur tri, recyclage etc., etc. Cela sera difficile et long...Il y a toute une éducation à faire dans nos foyers, les écoles,les bureaux, les administrations etc. Cela a été fait dans d'autres pays depuis des années, et ça fonctionne. Alors pourquoi pas nous ??? Irène Saïd

    Irene Said

    10 h 43, le 16 janvier 2015

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