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Les frères Kouachi, ou quand l'émulation fraternelle finit dans le sang

"L'histoire du terrorisme regorge de frères et sœurs opérant ensemble, explique John Horgan, professeur en criminologie. C'est très fréquent" et recherché par les organisations jihadistes."

Chérif Kouachi, 32 ans (gauche), et son frère Saïd, 34 ans, responsables de l'attentat contre Charlie Hebdo ont été abattus vendredi à Paris. AFP PHOTO / FRENCH POLICE

Saïd et Chérif Kouachi, accusés de la tuerie contre Charlie Hebdo, étaient "frères d'armes" et de sang. Le phénomène est fréquent en terrorisme, selon les experts, car l'émulation fraternelle renforce l'idéologie et garantit davantage aux attentats d'aboutir.

"L'histoire du terrorisme regorge de frères et sœurs opérant ensemble", explique à l'AFP John Horgan, professeur en criminologie. "C'est très fréquent" et recherché par les organisations jihadistes.
Il y avait trois paires de frères parmi les 19 pirates de l'air du 11 Septembre 2001. Il y a eu les frères Qazi, qui pensaient faire exploser une bombe à New York. Il y a eu Mohammed Merah, qui a attaqué une école juive à Toulouse, et son frère arrêté pour complicité. Il y a eu les trois frères Duka incarcérés à vie aux Etats-Unis pour complot contre une base militaire...

"Nous avons plein d'exemples à travers tout le spectre du terrorisme en Indonésie, en Irlande du Nord, au Proche-Orient (...) C'est en fait beaucoup plus commun qu'on ne le pense", ajoute M. Horgan, psychologue et directeur du centre des études sur le terrorisme et la sécurité à la Pennsylvania State University.

Plus récemment, les frères Tsnarnaev ont été accusés de l'attentat contre le marathon de Boston, dont le plus jeune comparaît en ce moment et risque la peine de mort. Et puis les deux frères Larmond ont été arrêtés vendredi au Canada, sur des soupçons de terrorisme.

Ce sont ces mêmes liens de sang qui ont abouti à l'équipée meurtrière de Paris.
Saïd Kouachi, l'aîné de 34 ans, et Chérif, son cadet de deux ans, ont fait irruption dans la rédaction du magazine satirique français, mercredi, et ont abattu de sang froid douze personnes, avant d'être tués par la police au bout d'une traque de près de 48 heures.

(Lire aussi : Anciens et nouveaux suspects jihadistes : les services français submergés)

 

"Bulle hermétique"
"Ensemble, ils formaient une bulle hermétique, une molécule d'extrémisme", observe Arie Kruglanski, professeur en psychologie à l'Université du Maryland, chercheur en terrorisme et violence. Entre frères et sœurs, "il y a une connexion sociale qui renforce les réalités (...) et les idéologies, car ils sont proches l'un de l'autre", explique l'expert à l'AFP.

Les frères Kouachi "ont été en contact avec l'idéologie du jihad (...) et ont renforcé l'objectif du terrorisme: devenir un héros et atteindre la gloire et le prestige". Tous deux sur la liste noire américaine du terrorisme, Saïd, 34 ans, s'était entraîné au maniement des armes au Yémen, tandis que Chérif, son cadet de deux ans, voulait rejoindre le jihad en Irak.
En général, l'aîné influence le plus jeune, selon les psychologues. Mais dans le cas des frères Kouachi, il semble que Chérif ait été le plus radicalisé, arrêté alors qu'il s'envolait vers l'Irak puis endoctriné en prison par une figure de l'islam radical.

 

(Lire aussi : Plutôt Aqpa que l'EI pour les jihadistes français ?)



En tout état de cause, les frères et sœurs s'entraînent l'un l'autre, s'influencent mutuellement.
"Ils partagent la même expérience de marginalisation, de manque d'intégration", résume à l'AFP Jennifer Jenkins, professeur en psychologie de l'Université de Toronto. "Quand ils parlent de leurs expériences communes, ils vont influencer le point de vue de l'autre, et attiser le sentiment de marginalisation et de vengeance".
Tout comme pour le tabac, l'alcool ou la délinquance, "il y a un effet modèle", un comportement "de maître à apprenti", ajoute, à l'AFP, Susan Averett, professeur d'économie et spécialiste des fratries à la faculté Lafayette, en Pennsylvanie.

Pour passer à un massacre du type de celui de Charlie Hebdo, il faut une rancune grave, un échec social, ou une humiliation, s'accordent à dire les psychologues interrogés. Et "les liens spéciaux entre frères et sœurs font qu'il y a moins de probabilités qu'ils changent d'avis à la dernière minute, leur engagement, la confidentialité sont maintenus jusqu'au dernier moment, même en situation de stress", souligne le Pr Horgan.
C'est pourquoi les organisations jihadistes sont si friandes à recruter des fratries. "Il n'y a aucun doute, c'est très recherché et beaucoup plus efficace pour un groupe terroriste", ajoute l'expert.

Les services du renseignement ont plus de mal à repérer les frères et sœurs car ils communiquent naturellement et fréquemment entre eux. En outre, le lien fraternel est si puissant, "virtuellement incassable", que le risque de trahison volontaire est minime, poursuit le criminologue, et que l'opération terroriste finira, presqu'à coup sûr, dans le sang.

 

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commentaires (1)

Les experts et les psychologues supposent tout de suite qu'"il doit y avoir une rancune grave, un échec social, ou une humiliation". Messieurs, et le lavage de cerveau de ces individus à travers leur endoctrinement massif sur le jihad pour défendre l'islam au Moyen-Orient et dans les rues de Paris mêmes, qu'en faîtes-vous ? Il serait bon d'y réfléchir. Ne le pensez-vous pas ? Et très probablement il est de loin plus important qu'"une rancune grave, un échec social ou une humiliation".

Halim Abou Chacra

17 h 41, le 11 janvier 2015

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Commentaires (1)

  • Les experts et les psychologues supposent tout de suite qu'"il doit y avoir une rancune grave, un échec social, ou une humiliation". Messieurs, et le lavage de cerveau de ces individus à travers leur endoctrinement massif sur le jihad pour défendre l'islam au Moyen-Orient et dans les rues de Paris mêmes, qu'en faîtes-vous ? Il serait bon d'y réfléchir. Ne le pensez-vous pas ? Et très probablement il est de loin plus important qu'"une rancune grave, un échec social ou une humiliation".

    Halim Abou Chacra

    17 h 41, le 11 janvier 2015

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