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Nos Lecteurs ont la Parole - Gerges Joseph RIZKALLAH

Non au masochisme politique

La page annuelle d'une année d'amertume se tourne, une fois de plus, dans l'histoire du Liban. Face à la volonté avouée du peuple-Phénix dans toute sa mosaïque de renaître, la question légitime d'un bilan interlibanais sincère doit-elle se poser ?
De nos malheurs quotidiens modernes l'histoire ne retiendra qu'une succession d'événements intrinsèquement liés, dans une progression tragique depuis ce 14 février 2005 : pseudo-paix imposée par le voisin-Léviathan jusqu'à l'assassinat du Premier ministre Rafic Hariri, retrait de l'armée syrienne, vague d'assassinats politiques, période d'insécurité socio-économique, climat de tension politico-religieuse avec montée des extrémismes régionaux : autant de bouleversements et, pour le moment, aucune solution à l'horizon.
Les ingérences étrangères de ces dernières années n'ont prouvé qu'une chose : leur inefficacité. La volonté d'un des deux regroupements du schisme libanais de dépasser l'autre s'est aussi soldée par un échec : aucun ne peut imposer sa loi à l'autre. Une majorité existe, certes, et une minorité efficace existe aussi. Mais seule une majorité absolue impossible à réaliser dans notre pays mosaïque peut dicter sa loi. Le reste des divisions ne servent qu'à alimenter un discours politiquement stérile.
En réalité, nos divisions, que nous voulions l'avouer ou pas, sont égales dans leur capacité de blocus. Encore, elles sont équivalentes aussi bien en termes de pouvoir quantitatif qu'en termes de pouvoir politique, si bien que c'est finalement leur inertie relative qui maintient l'équilibre démographique, culturel, religieux et politique entre les deux plateaux de la balance libanaise. Cette inertie est superposable à celle qui maintient similairement le chiisme et le sunnisme politique dans leur équilibre régional. C'est cette inertie qui est notre Constitution actuelle et nos lois ne peuvent pas la dépasser. Pourquoi donc avoir peur face à la solidité d'un tel équilibre où personne ne peut effacer ou contourner l'autre et où chaque action d'un clan est passée sous le peigne fin de l'autre ? Pourquoi vouloir proposer des réformes constitutionnelles en profondeur alors que l'équilibre actuel est un garde-fou en lui-même qui devrait garantir le respect des lois ?
On peut rêver, en Libanais politisés par la force du sang de nos martyrs, que la balance penchera d'un côté ou de l'autre, mais même dans nos fantasmes les plus fous, cela ne peut avoir lieu. Tout mouvement de la balance ébranlerait le Liban, lui-même fruit d'une vieille dualité religieuse, politique, sociale concrétisée en l'indépendance de 1943, puis dans l'histoire récente à travers le premier des printemps arabes, qui y a eu lieu en mars 2005. D'ailleurs une relecture de notre histoire prouve bien que les deux plateaux de la balance communiqueront pour retrouver leur équilibre parfait à chaque grand tournant de notre histoire.
Arrêtons donc de râler, le Liban est aussi solide que ses cèdres millénaires. Notre Liban est tout simplement un vieux couple, à la tête d'une famille nombreuse de communautés en conflit permanent. Sa solution pour tempérer ses différends est de faire chambres à part mais de rester uni pour l'essentiel : ses enfants, ses principes, la solidité de sa maison et qui ne cherche aucunement le divorce. Séparation mais pas divorce. Est-ce mal ?
Ce que l'histoire retiendra ? Une série d'événements et aucun nom. Que ceux qui croient faire la politique relisent l'histoire du Liban, et s'ils veulent se cultiver davantage l'histoire des civilisations. L'histoire ne s'arrête jamais sur les petits événements à l'image de ceux qui font la joie et le pain quotidien des médias. Les noms des actuels protagonistes et chefs de guerre ne figureront même pas dans les alinéas ni les annales. L'histoire ne retient que les grands événements. C'est Sabah, Saïd Akl, Wadih el-Safi que nous venons de perdre qui connaîtront la gloire posthume, et pas un petit chef de milice. Le monde peut être injuste, mais l'histoire ne l'est jamais. C'est pourquoi elle s'est peut-être arrêtée dans nos livres scolaires à l'indépendance de 1943.
2015 doit être pour les Libanais le moment de se ressaisir et de réfléchir autrement. De réfléchir en termes de collectivité et de réussite nationale et non pas de réussite individuelle. Comprenons une fois pour toutes que notre histoire s'est arrêtée le jour où des hommes ont voulu l'accaparer pour leur compte. Entamons notre année en nous libérant du fardeau de tous les pays amis-ennemis. Libérons-nous aussi du fardeau du culte de nos dirigeants politiques : les derniers mois ont assez prouvé leur impuissance. Ne cherchons pas à recréer des tables rondes : elles ont aussi prouvé leur inefficacité. D'ailleurs, nous savons tous que tous les clans politiques communiquent en secret entre eux. Cherchons les idées puis les hommes, et pas l'inverse. Arrêtons de penser que les actuels inconnus de la scène politique et donc dépourvus d'un appui étranger sont inefficaces. Nos chers dirigeants, forts de la puissance de nations, qu'ont-ils pu faire ? Dépoussiérons nos écrans de télévision des vieilles images d'hommes dépassés par les années et le progrès de l'humanité.
L'heure est aux figures réconciliatrices. Épurons notre réflexion des vieilles figures de discorde, même celles envers lesquelles nous avons encore de l'affection aveugle héritée. Arrêtons de nous inquiéter pour le Liban et de nous lamenter sur son sort. Le Liban va bien et il restera. C'est nous qui consommons notre temps et notre énergie dans la déconstruction. Lamentons-nous sur notre sort, sur nos mauvais choix politiques et sociaux, sur le mal que nous avons cherché à nous infliger, et essayons de changer, chacun individuellement, en écoutant pour une fois notre conscience personnelle et non pas les voix de la déraison collective négative.
Devenons hédonistes et mettons de côté notre sacré masochisme politique.

Gerges Joseph RIZKALLAH

La page annuelle d'une année d'amertume se tourne, une fois de plus, dans l'histoire du Liban. Face à la volonté avouée du peuple-Phénix dans toute sa mosaïque de renaître, la question légitime d'un bilan interlibanais sincère doit-elle se poser ?De nos malheurs quotidiens modernes l'histoire ne retiendra qu'une succession d'événements intrinsèquement liés, dans une progression...

commentaires (1)

Le conFessionnalisme pâmé entraîne la vacance de ces esprits comme de ces âmes fort indigènes au demeurant. Il s'agit d'une sorte d'engourdissement qui gagne ces pseudo-araméanisés dans cette douceur méditerranéo-levantine, à l'égard d'une révolutionite aigue passée qui ne leur parvient que toujours fragmentée en raison de ce même phénomène Phénicisé retardato-attardé ; moins apte en tout cas à les requérir vraiment comme elle le fait à l'ordinaire avec d’autres peuplades sûr plus dégourdis et même évoluées. Pourtant, cette révolution dépassée a toujours les mêmes couleurs glauques ou bigarrées, et charrie les sempiternels tombereaux d'ignominies et d'espérances, de fins annoncées ou inopinées, d'accablements, de drôleries. Toutefois, comme si le flot risquait on ne sait pourquoi de se tarir, il a pris l'habitude notre Campagnard puiné de lester cette petite histoire passée et dépassée manière d'échapper si peu que ce soit à son présent si oppressant ! Et le voilà ainsi l’ébaubi, une soutane ou un turban déployés devant ses idées et son esprit, sa vue et ses verres évidemment assombris et noircis invité entre ses innombrables somnolences montagnardes à la nostalgie ou surtout au pronostic. Mais ce procédé éhhh éhhh libanais a ses limites. Et très vite le présent le reprend à la gorge. Pour rire, mais surtout pour pleurer, quand ce n'est pas pour les deux à la fois et plutôt le second que le premier. Yâ hassértéhhh !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

08 h 32, le 08 janvier 2015

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Commentaires (1)

  • Le conFessionnalisme pâmé entraîne la vacance de ces esprits comme de ces âmes fort indigènes au demeurant. Il s'agit d'une sorte d'engourdissement qui gagne ces pseudo-araméanisés dans cette douceur méditerranéo-levantine, à l'égard d'une révolutionite aigue passée qui ne leur parvient que toujours fragmentée en raison de ce même phénomène Phénicisé retardato-attardé ; moins apte en tout cas à les requérir vraiment comme elle le fait à l'ordinaire avec d’autres peuplades sûr plus dégourdis et même évoluées. Pourtant, cette révolution dépassée a toujours les mêmes couleurs glauques ou bigarrées, et charrie les sempiternels tombereaux d'ignominies et d'espérances, de fins annoncées ou inopinées, d'accablements, de drôleries. Toutefois, comme si le flot risquait on ne sait pourquoi de se tarir, il a pris l'habitude notre Campagnard puiné de lester cette petite histoire passée et dépassée manière d'échapper si peu que ce soit à son présent si oppressant ! Et le voilà ainsi l’ébaubi, une soutane ou un turban déployés devant ses idées et son esprit, sa vue et ses verres évidemment assombris et noircis invité entre ses innombrables somnolences montagnardes à la nostalgie ou surtout au pronostic. Mais ce procédé éhhh éhhh libanais a ses limites. Et très vite le présent le reprend à la gorge. Pour rire, mais surtout pour pleurer, quand ce n'est pas pour les deux à la fois et plutôt le second que le premier. Yâ hassértéhhh !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    08 h 32, le 08 janvier 2015

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