Rechercher
Rechercher

À La Une - Turquie

Le Parlement turc enterre le scandale de corruption visant le régime Erdogan

La décision a été fustigée par l'opposition : "Une journée noire pour la démocratie turque".

Les opposants, de gauche à droite, Riza Turmen, Osman Koruturk, Levent Gok , Erdal Aksunger et Emre Koprulu ont promis un baroud d'honneur en annonçant le dépôt d'une motion rejetant le rapport de la commission adopté lundi le 5 janvier 2015 . AFP /Adem Altan

Le Parlement turc a enterré lundi le vaste scandale de corruption qui avait ébranlé il y a un an le régime islamo-conservateur au pouvoir depuis 2002 en épargnant, sans surprise, un procès à quatre anciens ministres impliqués dans l'affaire.

Cette décision a été fustigée par l'opposition qui, par la voix d'un de ses députés Levent Gok, a évoqué un "jour noir" pour la démocratie turque. A six mois des élections législatives, une commission parlementaire contrôlée par le parti du président Recep Tayyip Erdogan a voté contre le renvoi des anciens membres du gouvernement devant la Cour suprême, seule habilitée à les juger.

Selon le président de cette commission Hakki Koylu, les neuf des quatorze députés de cette commission membres du Parti de la justice et du développement (AKP) se sont tous prononcés contre les poursuites. "Le scrutin s'est déroulé publiquement. Chacun a pu exprimer son opinion et voter. Toutes les accusations, tous les noms ont fait l'objet d'une discussion et le vote qui a suivi en est la conséquence", a assuré M. Koylu, lui-même membre de l'AKP, interrogé par la chaîne d'information NTV à l'issue de la séance.

 

 (Lire aussi: Les procureurs ayant instruit le scandale de corruption contre le gouvernement Erdogan renvoyés)

 

Sitôt la décision rendue publique, le principal parti d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), a dénoncé la volonté du pouvoir d'étouffer "la plus grave affaire de corruption" de l'histoire du pays.
Sans précédent, ce scandale a éclaté le 17 décembre 2013 avec l'arrestation de dizaines de dirigeants d'entreprises, d'élus et de proches du pouvoir accusés d'avoir participé ou facilité une série de trafics illégaux et de malversations.

Cette affaire à tiroirs a secoué comme jamais le régime de M. Erdogan, alors Premier ministre, personnellement mis en cause avec sa famille par une série d'enregistrements téléphoniques diffusés sur les réseaux sociaux.
Les quatre ministres "blanchis" lundi, Erdogan Bayraktar (Environnement et Urbanisme), Zafer Çaglayan (Economie), Muammer Güler (Intérieur) et Egemen Bagis (Affaires européennes) étaient soupçonnés de corruption active, fraude et trafic d'influence.

 

(Lire aussi: Mandat d'arrêt contre Fethullah Gülen, ex-allié d'Erdogan)

 

"Complot"

Les trois premiers nommés, dont les fils avaient été interpelés, avaient démissionné et le quatrième été remercié lors d'un remaniement d'urgence. Tous étaient soupçonnés d'avoir touché des pots-de-vin d'un homme d'affaires d'origine iranienne, Reza Zarrab, pour faciliter un trafic illicite d'or avec l'Iran sous embargo. L'épisode de la montre de luxe de fabrication suisse d'un montant de 245 000 euros offerte par M. Zarrab et reçue par M. Caglayan a fait les choux gras de la presse turque.

Comme ces quatre ex-ministres, M. Erdogan a farouchement nié toutes les accusations, qu'il a attribuées à un "complot" lancé par ses anciens alliés de la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen pour le déstabiliser. M. Gülen, 73 ans, à la tête d'un vaste réseau d'écoles privées, d'entreprises et de médias, a démenti toute implication dans ces affaires.

 

(Lire aussi : En Turquie, la lutte à mort contre "l'Etat parallèle" se poursuit, implacable)

 

Dénonçant un "Etat parallèle", l'homme fort du pays a riposté en ordonnant des purges sans précédent dans la police et la justice où les partisans de M. Gülen, qui vit aux Etats-Unis depuis 1999, étaient particulièrement actifs.
Des milliers de policiers et magistrats ont depuis été arrêtés, limogés ou mutés.

Lundi encore, les autorités turques ont opéré un énième coup de filet en interpellant à Erzurum (est), Hatay (sud) ou Gaziantep (sud-est) 34 policiers soupçonnés d'avoir procédé à des écoutes téléphoniques illégales de responsables du régime. Depuis quelques mois, des magistrats proches du pouvoir ont classé sans suite toutes les enquêtes judiciaires qui menaçaient le régime et remis en liberté tous les suspects.

Le vote de lundi vient désormais clore le versant politique de ce dossier, même si le Parlement, où l'AKP dispose de la majorité absolue, doit encore formellement confirmer d'ici la fin du mois de janvier la décision de la commission.

Très remontée, l'opposition a promis un baroud d'honneur en annonçant le dépôt d'une motion rejetant le rapport de la commission adopté lundi. "Le résultat de ce vote ne signifie pas que les ex-ministres sont lavés de toute accusation. Ce dossier n'est pas encore fini", a voulu croire M. Gok.

 

Lire aussi
Qui se cache derrière l'as des prophéties sur Twitter en Turquie?

Erdogan défend corps et âme son fastueux palais de "1 150 pièces"

Le Parlement turc adopte une loi renforçant l'emprise du régime sur la justice

Le Parlement turc a enterré lundi le vaste scandale de corruption qui avait ébranlé il y a un an le régime islamo-conservateur au pouvoir depuis 2002 en épargnant, sans surprise, un procès à quatre anciens ministres impliqués dans l'affaire.
Cette décision a été fustigée par l'opposition qui, par la voix d'un de ses députés Levent Gok, a évoqué un "jour noir" pour la démocratie...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut