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Nos Lecteurs ont la Parole - Chloé KATTAR

Mystères libanais

Il y a plus de vingt ans, à Conflans-Sainte-Honorine, le maire et Premier ministre de l'époque, Michel Rocard,s'exclamait devant ses élus dans sa ville des Yvelines nichée au cœur de la belle forêt de Tremblay, par une phrase restée dans les annales : « Mais enfin, la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde ! »...
Avec une superficie égale à 55 fois le Liban et une population égale à15 fois le nombre de ses habitants avant le récent afflux des frères voisins, une dette presque bien similaire en proportions, et des richesses d'une tout autre ampleur, la France s'inquiétait, il y a plus de vingt ans (et ça continue depuis lors), des 3 à 5 millions d'Africains et de Maghrébins présents sur son sol.
Imaginez 25 à 30 millions de personnes – quand bien même francophones et francophiles, ou Latins, Wallons, Romands, Basques, Catalans, Aostiens, etc.–, vivant en France dans une misère noire et une anarchie totale, en essaimant à l'instar des clandestins de Calais ou d'ailleurs sur l'ensemble des villes d'un territoire riche en eau et en produits alimentaires de base.
Considérez qu'au Liban, en temps dit normal, les feux de signalisation ne servent qu'à agrémenter le décor, comme les beaux sapins clignotant à Noël ; les trous énormes de la chaussée sont autant de pièges, les routes non balisées ou non éclairées, les casques des motards, tout cela relève du rêve inaccessible ; la taxe mécanique annuelle sur les voitures sans feux, sans freins, sans plaques minéralogiques, sans rétroviseurs font partie du paysage. Sachez aussi que les décharges des ordures ménagères sont devenues des montagnes, imposantes mais surtout explosives (peuple fêtard adore les pétards), remplaçant les oisives et paisibles montagnes d'antan, pulvérisées par les carrières et les constructions. Sachez encore que la sacro-sainte sécurité alimentaire est – la pauvre ! – orpheline, que la viande débitée par la boucherie du coin est plus souvent impropre que propre à la consommation, que l'on s'adresse souvent à de vagues officines plutôt qu'à un médecin. Quant à l'instituteur et au fonctionnaire, ils se sont arrangés pour avoir un autre emploi, histoire d'éviter de mourir de faim. Les emplois fictifs sont héréditaires et tenaces, les morts continuent de voter à partir de l'au-delà. À ce propos, ceux qui bénéficient du suffrage des morts considèrent dès lors les survivants comme de futurs morts et, étant les élus du peuple, ils prorogent d'eux-mêmes leur mandat.
Quoi encore ? Le port d'une arme à feu ne nécessite aucune autorisation. Le fonctionnement des réseaux électrique et hydraulique reste de nos jours une insoluble et mystérieuse énigme, de l'aveu même des experts étrangers. Seuls les druzes et les catholiques melkites (mais jusqu'à quand ?) n'ont pas encore des universités. Si par un hasard qui souvent fait bien mal les choses une jeune fille voilée tombe amoureuse d'un compatriote chrétien, ou l'inverse, on frôle la tragédie à la Roméo et Juliette.
Bref, vivre au Liban est un exploit des temps modernes, une sorte de miracle permanent qui pourtant fonctionne encore et toujours... Scientifiquement parlant, cela paraît impossible, contraire à toute logique. La France, qui n'a aucun problème de ce genre en temps normal, se retrouverait, elle, en train d'imploser à la vitesse grand V. Des sociétés habituées à une vie planifiée et parfaitement organisée ne résistent guère à ce genre de cataclysme. Car il y a des choses que la science seule ne peut pas expliquer...
Vers l'Orient compliqué, il faut toujours se diriger avec des idées simples, comme l'aurait dit au siècle passé le général de Gaulle. N'est-il pas plus logique d'affirmer, comme l'historien Henry Laurens, qu'au Liban quand vous arrivez à comprendre quelque chose, c'est qu'on vous l'a mal expliqué ?

Chloé KATTAR
Paris

Il y a plus de vingt ans, à Conflans-Sainte-Honorine, le maire et Premier ministre de l'époque, Michel Rocard,s'exclamait devant ses élus dans sa ville des Yvelines nichée au cœur de la belle forêt de Tremblay, par une phrase restée dans les annales : « Mais enfin, la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde ! »...Avec une superficie égale à 55 fois le Liban et une...

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