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Lifestyle - Tous les chats sont gris - Nightlife

Où finit Cendrillon, bien après minuit ?

Une table de mezzé, une horloge qui trinque avec le petit matin, des rires alcoolisés et des cheveux en pétard : deuxième partie de soirée dans la légendaire « eatery » Zaatar w Zeit.

photo Gilles Khoury.

Les portes des bars et boîtes de nuit s'étaient refermées, la voiture sillonnait les ruelles vides, et dans quelques heures seulement, on allait se réveiller, la tête dans le coltard, pour recommencer une énième journée de travail. Qu'importe. L'horloge devait frôler les deux heures du matin, et alors qu'on était supposé être couchés depuis belle lurette, on s'est bien vu dévorer un sandwich bien gras. Histoire d'éviter la gueule de bois du lendemain ou de s'autorécompenser pour ces longues heures de danse.

On a donc pris plaisir à lister ces établissements qui s'éveillent à l'heure où on se glisse sous la couette. Barbar, avec sa horde de « mobylettes » qui provoquent un trafic infernal tout le long de la rue Spears. Pas le moment. Il y a aussi la camionnette de Freddy's dont les mains magiques livrent, toute la nuit, des hotdogs piquants et ultravitaminés. Nos copines râlent : avec la pluie diluvienne de décembre et leurs Manolo de douze centimètres, ce n'est sûrement pas la meilleure idée. On a donc décidé, d'un commun accord, de se rabattre sur le légendaire, l'inévitable Zaatar w Zeit de Sodeco qui officie aux fourneaux de la nuit beyrouthine depuis 1999.

Zaatar w Zeit, au-delà de son halloum bacon et son djéj bi jebné (sandwich de poulet et fromage), c'est une zone de confort pour les très fin de soirée. Ce qui est fabuleux aussi, c'est qu'il y plane une impression de purgatoire, où l'on refait le bilan de la soirée, la tête dans un lahem bi ajine et les yeux flottant dans un thé glacé à la pêche.
Une fois arrivés dans cette volière, on a trouvé une flopée de filles, le brushing en pétard, accoudées au bar, bruissant de conversations nocturnes, attendant mollement leur commande de pizza pepperoni. Comme quoi, une fois minuit sonné, les calories ne se calculent plus.

L'ambiance ressemblait à celle d'un réfectoire. Les anecdotes alcoolisées fusaient de table en table, sous le regard malicieux d'un jeune serveur. Derrière lui, une jolie fille, les bas filés, était en train de s'abandonner dans un swing, perchée sur des talons qui frôlaient le double décimètre. Un pas de côté, quatre à gauche, deux tours sur elle-même et une glissade brillamment rattrapée par son copain, lui aussi bien arrosé. Comme d'ailleurs tout le reste du restaurant. Car, depuis le début du mois de décembre et le démarrage des festivités de Noël, Beyrouth se transforme en une sorte d'immense cirque éméché dès la nuit venue qui finit par se vautrer, une fois le show terminé, dans cette minicantine qu'est Zaatar w Zeit. Tout un cirque qui s'échoue et fait tomber les masques ; car nous devenons tous égaux face aux boulimies de fin de nuit. Ce soir-là donc, le rouge à lèvres des demoiselles est parti en vrille, idem pour les cheveux gominés des hommes. Les Range Rover avaient des mines de citrouille et une fille a même perdu une de ses chaussures !

Tout ce beau monde était donc descendu de scène, et plus rien ne comptait à part organiser, à trois heures du matin, un banquet comme on sait si bien le faire dans ce pays. On a donc eu droit à des machos en tête de table (bien sûr) s'amusant à « faire descendre » la quasi-totalité du menu, sous le regard atterré du caissier qui devait fantasmer sur son lit... Man'ouché, man'ouché avec du thym sauvage, man'ouché de jambon et fromage, man'ouché de labné, « arouss » de labné et une assiette de labné. Attention aux nuances. Des lahem bi ajin, des hot dogs et des wraps de tout genre avant de finir avec un « ktiramisu », un sandwich de chocolat/bananes et une achtalieh de bananes. De quoi dormir paisiblement.

Il ne devait pas être loin de trois heures lorsque, rompant l'attente interminable qui avait commencé à agacer nos copines assoupies sur une banquette inconfortable, une des chanteuses barbiesques du moment (qu'on ne citera certainement pas) a fait son entrée sur le tapis vert de Zaatar w Zeit, un chihuahua dans un bras, un Birkin d'Hermès rose dans l'autre. À peine sa kafta machrouha (pas moins !) engloutie, elle a hélé un serveur à qui elle a demandé un « sideorder de frites et cheddar », auquel elle a fait un sort rapide à peine livré. Elle s'est saisie ensuite de son portable pour une houleuse conversation téléphonique avec son boyfriend à l'autre bout de la ville qui avait dû probablement dragouiller l'une de ses copines. Puis elle s'est éclipsée, mascara coulant, réincarnation xanaxée d'une héroïne de conte de fées échouée chez Zaatar w Zeit...

 

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commentaires (1)

Criant de "libanaiiise" vérité, et mignon surtout !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

04 h 45, le 06 décembre 2014

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Commentaires (1)

  • Criant de "libanaiiise" vérité, et mignon surtout !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    04 h 45, le 06 décembre 2014

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