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Moyen Orient et Monde - Reportage

La nightlife reprend des couleurs à Alep

« Malgré la guerre nous devons travailler et vivre ».

De jeunes Syriens dansent dans une boîte de nuit, dans un quartier prorégime, dans le nord d’Alep. Joseph Eid/AFP

Après avoir sombré dans une profonde neurasthénie, la métropole syrienne d'Alep a retrouvé sa fameuse vie nocturne, ses cafés et ses chanteurs, dans les zones prorégime et même dans la partie rebelle bombardée au quotidien.

Au Fayrouz, dans le quartier chic de Mogambo, en secteur gouvernemental, Jalaa et ses trois amies dégustent des glaces tout en échangeant des potins entrecoupés de rires sonores. Pomponnées et élégantes avec leurs coiffes multicolores, elles s'amusent à échanger des messages et des photos sur leurs téléphones portables tandis qu'un violoniste essaie de se faire entendre.

« Bien sûr, on se plaint du rationnement d'électricité, du manque d'eau, mais la majeure partie du temps, on parle surtout de nos vies, de nos collègues de travail, de ce qu'on a vu à la télévision », explique cette avocate. « Paradoxalement, nous restons moins à la maison qu'avant la guerre pour nous retrouver souvent dans un café du coin », assure Mays, également avocate.

« Malgré la guerre nous devons travailler et vivre », résume le gérant du Fayrouz, Jihad Moghrabi, qui s'est installé il y a six mois. « Au début, nous étions tétanisées, nous n'osions pas sortir, nous avions peur de tout : des tireurs embusqués, du bruit des bombes... Puis cela s'est estompé. Vous avez entendu cette détonation ? Et bien, personne n'a sursauté », commente Dibeh, employée à la compagnie d'électricité. Il faut dire que quand le front s'est stabilisé, une quinzaine de cafés ont ouvert ou rouvert à Mogambo et Aziziyé, aux mains du régime.

 

(Voir : Les deux visages d'Alep)

 

« Oublier la guerre »
C'est presque la même ambiance du côté rebelle : à Boustane al-Qasr dans l'est, le patron du restaurant al-Antik se félicite de l'amélioration de la situation. « Notre établissement attire des combattants et est très populaire », dit-il, se disant rassuré par la proximité d'un point de contrôle rebelle. Les restaurants avaient fermé en zone rebelle en raison de la campagne de largage de barils d'explosifs menée par le régime depuis fin 2013 qui a fait des milliers de morts.

De plus, comparé aux zones prorégime, de tout temps plus riches, la dizaine d'établissements qui survivent ici sont plus traditionnels et populaires : les femmes y viennent toujours accompagnées de leurs maris et on y diffuse des qoudoud halabiyé et des mouachahat, des genres de poésie chantée. Cela étant, Riad al-Hassan, un habitué, regrette le bon vieux temps.
« Quand la ville était unifiée, on avait beaucoup plus de choix. Les rues ne sont plus aussi sûres car chaque soir il y a des bombardements et des combats », déplore-t-il.

Effectivement, la vie nocturne est plus trépidante à l'ouest. À Shahba al-Cham, discothèque ouverte tous les soirs à l'ex-hôtel Méridien, une vingtaine de personnes se trémoussent sur une musique assourdissante au milieu d'une piste criblée de laser. Le week-end, leur nombre peut atteindre une centaine. « Tous mes amis viennent ici », confie Houssam Chaabane, marchand de voitures de 29 ans, accompagné de sa copine Sally. « Avant, nous avions peur mais on s'est habitué. Il y a deux jours, une bonbonne remplie d'explosifs est tombée près de chez moi et je suis venu ici pour oublier la guerre », assure ce jeune bien bâti.

Dans le quartier des Syriaques, Firas Jeilati, 25 ans, au look intello et à la barbiche noire, dirige Athar al-Farasha, un café où les artistes viennent chanter ou réciter des poèmes anciens et contemporains. « Le local appartenait à deux frères qui étaient mes amis. Comme par prémonition, ils m'ont dit que s'il leur arrivait quelque chose je devrais m'en occuper. Une demi-heure plus tard, ils étaient tués chez eux par un obus. » Dans ce café, on chante un qoudoud à la gloire perdue de la ville, « Alep est une fontaine de douleurs qui coule dans mon pays »...


Sammy KETZ et Zein AL-RIFAÏ / AFP

 

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commentaires (1)

Enfin des nouvelles positives d'Alep, qui ne sombrent pas dans le fatalisme !! merci pour ce message d'espoir....

LA MAISON BLANCHE

16 h 25, le 24 novembre 2014

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Commentaires (1)

  • Enfin des nouvelles positives d'Alep, qui ne sombrent pas dans le fatalisme !! merci pour ce message d'espoir....

    LA MAISON BLANCHE

    16 h 25, le 24 novembre 2014

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