Une adolescente sauvée de l’EI par sa mère devant les juges hollandais

Blonde aux yeux bleus, issue d'une famille catholique, « Aïcha » est soupçonnée par la justice néerlandaise de terrorisme après avoir voyagé en Syrie pour y épouser un jihadiste de l'État islamique (EI) et avoir été « sauvée » par sa mère.
L'adolescente de 19 ans, connue sous le prénom de « Aïcha » mais née Sterlina, a comparu hier au tribunal de sa ville natale de Maastricht pour une audience à huis clos. Les juges ont décidé que sa garde à vue était légitime et l'ont prolongée. Pour rappel, la jeune femme est arrivée aux Pays-Bas mercredi en compagnie de sa mère Monique, presqu'un an après avoir quitté le pays en direction de la Syrie pour épouser un jihadiste de l'EI qu'elle considérait comme un Robin des Bois moderne. « Dès son retour, Aïcha a été détenue sur la base de soupçons de crimes menaçant la sécurité de l'État », a indiqué Annemarie Kemp, une porte-parole du parquet de Maastricht, où réside la famille d'Aïcha. Celle-ci devrait comparaître de nouveau lundi devant les juges, qui devront alors décider si elle sera poursuivie ou non. Pour leurs parts, les autorités ont interdit aux avocats de Monique et d'Aïcha de répondre aux questions des journalistes à cause de la sensibilité de l'affaire. Monique, 49 ans, s'était néanmoins exprimée dans les médias néerlandais il y a quelques mois au sujet de sa fille, assurant que celle-ci « aimait sortir, jouer du piano et écouter de la musique ». Elle a affirmé à la télévision publique NOS que sa fille avait d'abord cherché dans la Bible des réponses à ses interrogations avant de se tourner vers le Coran et de porter un niqab lui couvrant le visage.

Robin des Bois
Tout bascule quand Aïcha assiste à la diffusion à la télévision néerlandaise d'une interview avec le combattant jihadiste turco-néerlandais Omar Yilmaz. Doté de la double nationalité, Yilmaz a d'abord effectué son service militaire en Turquie avant d'intégrer l'armée néerlandaise. En Syrie, il entraîne les combattants jihadistes, notamment au tir. « Regarde cet homme, c'est tellement bien ce qu'il fait », s'était alors exclamée Aïcha, qui considérait Yilmaz comme un Robin des Bois moderne, selon sa mère.
Les autorités néerlandaises ont confisqué le passeport d'Aïcha pour l'empêcher de voyager en Syrie, mais elle a obtenu une carte d'identité, qui lui a quand même permis de voyager.
Dans cette interview, Yilmaz, bel homme, arbore un crâne rasé et une longue barbe noire. Il y explique être en Syrie pour défendre le peuple syrien. « Si l'armée néerlandaise envoyait des soldats ou une unité pour aider la population, je serais le premier à m'inscrire, mais personne ne fait rien », assure-t-il.

Échec du mariage
Une fois en Syrie, Aïcha aurait demandé à sa mère de l'aider à rentrer après s'être retrouvée avec un combattant tunisien, son mariage ayant échoué, a affirmé le quotidien populaire Algemeen Dagblad (AD). Selon le quotidien, Monique aurait traversé la frontière syrienne la semaine dernière et retrouvé sa fille à Raqqa, fief de l'EI. Elles seraient ensuite revenues ensemble aux Pays-Bas via la Turquie, ajoute le journal. Mais selon Roger Bos, du parquet de Maastricht, elles se seraient retrouvées à la frontière et Monique n'aurait jamais « mis les pieds en Syrie ».
« Je pense que, psychologiquement, elle a besoin de soutien et qu'elle en reçoit de sa mère, a-t-il ajouté sur la télévision locale L1. Physiquement, je ne pense pas qu'elle ait de problèmes. »
« Est-elle une victime ou un suspect ? Peut-être les deux, a-t-il également assuré. « Nous ne savons pas quel était son rôle sur place. Est-elle juste restée à la maison de l'homme qu'elle a épousé ? » a-t-il conclu.
Céline Jankowiak/AFP