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Liban - Social

Un programme d’apprentissage accéléré de l’Unicef pour les réfugiés syriens

Il n'est plus un secret que les enfants syriens réfugiés ont subi « le plus rapide et le plus net déclin éducatif » jamais vu au Moyen-Orient, selon l'Onu et plusieurs ONG. Le programme de l'Unicef, « Back to learning », financé par l'UE essaie d'inverser cette tendance.

« Back to learning », un programme interactif, tenant compte des besoins et des aptitudes des petits Syriens.

Békaa. Il est 15 heures. Les élèves de l'école publique de Jarrahiyeh, à Marj, dans la région de la Békaa, attendent patiemment le début des cours de l'après-midi. Il s'agit comme on le sait d'un cursus spécial pour les enfants syriens dans le cadre du programme «Back to learning», financé par l'Union européenne (UE). «Uniquement dans la région de la Békaa, on estime à plus de 65000 le nombre d'enfants syriens en âge d'aller à l'école, de 4 à 14 ans, explique César Fakih, responsable éducatif de l'Unicef dans la Békaa. Environ 25000 ne sont pas intéressés par les activités scolaires, certains travaillent déjà.» Il reste donc 40000 jeunes Syriens qui ont émis le souhait de s'inscrire dans les écoles publiques. «Mais uniquement dix écoles ont la capacité d'admettre plus d'élèves, et elles ne peuvent prendre que 18000 individus», ajoute-t-il.

 

(Infographies : Réfugiés syriens au Liban : un état des lieux)

 

L'école dans les camps
L'année dernière, une des solutions avait été de monter des cours dans l'après-midi pour décongestionner le cursus normal de la matinée. En gros, il y a eu les enfants qui suivaient le cursus scolaire normal le matin et qui ont été intégrés avec les élèves
libanais. Il y a eu aussi ceux qui ont suivi un cursus spécial l'après-midi dans les écoles, ceux qui bénéficient du programme ALP (Accelerated Learning Programme), toujours dans les écoles, et ceux qui vivent à l'intérieur des camps et qui ne sont pas scolarisés, mais qui sont la cible d'actions spécifiques de l'Unicef.
Le but du programme ALP est de permettre aux enfants qui ont quitté l'école en Syrie de se remettre à niveau et de rattraper ce qu'ils ont perdu. Il consiste aussi à leur apprendre les notions de base d'anglais ou de français en vue de leur insertion dans les écoles libanaises. En outre, une session de deux semaines a été assurée aux enseignants syriens pour préparer avec eux le programme ALP dans une trentaine de camps de réfugiés syriens dans la Békaa.
Le programme «Back to learning» – dont l'ALP fait partie – prend en charge les scolarités des enfants, les livres et fournitures, et dans certains cas une petite collation. «Outre le volet purement éducatif, il y a aussi un volet psychosocial qui vise les parents et qui est d'une importance capitale, puisque le changement d'environnement, la pauvreté, la violence et les abus de toute sorte ont créé beaucoup de problèmes à ce niveau. Des familles entières vivent dans une seule chambre, ou sous une seule tente», explique Amina Kleit, directrice de programme à l'association Iqra', chargée par l'Unicef de l'application du programme. Ce volet touche tout ce qui a rapport à la santé, la nutrition, l'hygiène. «Beaucoup de progrès ont été réalisés dans ce domaine, en fournissant un soutien pédagogique, une campagne de prévention, et même en offrant des shampoings, médicaments et autres provisions nécessaires aux familles syriennes», ajoute-t-elle.

 

(Lire aussi : Kamel Mohanna : La situation des réfugiés syriens est catastrophique et explosive)

 

Un manteau oublié pour rester en classe
Gretta enseigne à l'école publique de Jarrahiyeh. Ils sont 27 élèves en bas âge dans sa classe. Elle les réunit en cercle autour d'elle. Chacun doit dire son nom, l'écrire sur un bout de papier (chaque lettre avec une couleur différente) et dire de combien de syllabes il est formé. «Avec ce jeu simple, les élèves apprennent à lire, à compter et à connaître les couleurs», explique Gretta. Ensuite, le vrai divertissement éducatif commence: à l'instar du jeu «Tu oses ou tu dis la vérité», les jeunes Syriens doivent dirent ce qu'ils aiment, ce qui les dérange, ce qu'ils souhaitent, etc. Majd, avec son malicieux sourire, récite un poème d'amour à Gretta. Ahmad, lui, raconte qu'il aime plier le linge à la maison. Aya par exemple adore venir à l'école, mais espère quand même retourner chez elle en Syrie pour poursuivre ses études.
Gretta se dit extrêmement heureuse de prendre soin de ces enfants qui risquent de devenir une génération perdue si personne ne se penche sur leur éducation. Elle raconte ainsi l'histoire de ce jeune garçon qui oubliait chaque jour son manteau en classe pour remonter le reprendre après la fin des cours. «À chaque fois, ses parents montaient le chercher pour le trouver endormi en classe. Il préférait rester à l'école que rentrer à la maison», ajoute Gretta, les larmes aux yeux.

 

Le poids du conflit
Le programme donne également beaucoup d'espoir à des jeunes un peu plus âgés. Dans une autre classe, des élèves commencent à apprendre l'anglais. Certains d'entre eux travaillent déjà dans la matinée, pour pouvoir suivre ensuite les cours de l'après-midi. Le poids du conflit syrien pèse déjà sur eux. Ils ont peur de donner leur nom, ils appréhendent l'objectif de la caméra de crainte qu'ils soient reconnus par des hommes du régime qui traquent leurs parents. Mais malgré toutes les difficultés, ils étudient avec assiduité et détermination. Mohammad (son nom a été changé) a onze ans. Le matin, il aide son grand frère dans une ferme de la région. Malgré la fatigue, le chemin à faire pour venir à l'école, il participe activement au cours et espère un jour, lui aussi, enseigner l'anglais en Syrie.


Il est à noter par ailleurs que ce programme, qui a commencé initialement dans un contexte d'urgence pour combler les besoins des réfugiés, sera poursuivi dans un but de développement durable qui vise le système éducatif libanais en général. «Les formations accordées au personnel et aux enseignants seront bénéfiques pour l'ensemble des élèves libanais. Et tout le matériel éducatif utilisé restera dans l'école pour un usage au-delà du contexte actuel», affirme ainsi Miriam Azar, spécialiste de la communication d'urgence à l'Unicef. «C'est donc un investissement à long terme qui vise non seulement les élèves, mais également les parents qui sont invités à être des partenaires dans ce projet», ajoute-t-elle.


Abondant dans le même sens, Riad Kadri, directeur de l'école de Jarrahiyeh, souligne «la pauvreté des habitants de la région, qu'il s'agisse des autochtones ou des Bédouins qui y vivent». «Les élèves libanais bénéficient eux aussi des prestations et du soutien apporté par ce programme», précise-t-il. Pour confirmer ces paroles, Amina Kleit fait appel à la femme de ménage de l'école. Celle-ci était analphabète. Grâce au programme éducatif, elle sait lire et écrire. «Maintenant, quand j'ai un papier à signer, j'écris mon nom, alors qu'avant je signais avec mon empreinte», affirme fièrement cette mère de quatre enfants qui les encourage désormais à aller à l'école pour étudier.


 

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