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Moyen Orient et Monde - Reportage

À Damas, le vrombissement des moteurs pour oublier le fracas des obus

Sur la route bitumée, des pilotes rivalisent en duel dans l’art du survirage sur le circuit Zamane el-Kheir, près de l’aéroport de Damas. Youssef Karwashan/AFP

« Le plus beau, c'est que quand tu boucles ta ceinture, tu peux oublier tous les problèmes du pays » : en Syrie, des courses automobiles redonnent un semblant de normalité dans un pays ravagé par la guerre. Pour la première fois depuis le début du conflit en 2011, les courses automobiles de « drift » ont repris leurs droits près de Damas, et Zaher Dahkoul s'enivre de nouveau des odeurs d'huiles et du vrombissement des moteurs, échappant le temps d'une course au fracas « des obus qui tombent ».

À cette occasion, une dizaine de pilotes comme Dahkoul offrent à quelques dizaines de passionnés de sport automobile, chaque vendredi depuis trois semaines, un spectacle qui pourrait sembler trivial dans un pays dévasté, où la moitié de la population, soit environ dix millions de personnes, a été contrainte de fuir sa maison. Sur la route bitumée, des pilotes rivalisent en duel dans l'art du survirage à la manière d'une pratique rendue célèbre par le film hollywoodien Fast and Furious : Tokyo Drift : à grand renfort de longues glissades, de crissements de pneus stridents et de coups de volant à vous en donner le tournis. Plutôt que le chrono, c'est le style qui prime ainsi que l'habileté à manœuvrer son adversaire pour le pousser à la faute.

Avec le retour du championnat, Dahkoul, un quinqua fana de courses auto « depuis l'enfance », veut étoffer son palmarès déjà épais. Il est d'ailleurs surnommé « le roi » dans le milieu. Pour lui comme pour les autres pilotes, le circuit privé près de l'aéroport de Damas porte bien son nom : Zamane el-Kheir, « le bon vieux temps ». Maintenant que le secteur est sous le contrôle du régime de Bachar el-Assad, pilotes et fans ont pu reprendre le chemin du circuit. Mais l'autre piste de la région est bien ancrée dans le temps présent : au cœur d'une zone que les rebelles syriens disputent aux troupes du régime aidées par des combattants du Hezbollah libanais, elle est inutilisable.

(Lire aussi : Coupable de crimes contre l'humanité, l'EI fait régner la « terreur » en Syrie)

 

« Tout le monde est ravi »
La dernière fois que le championnat avait eu lieu en Syrie, en 2010, les dizaines de participants arrivaient de tout le pays, du Liban et de Jordanie, et des spectateurs étaient là par centaines pour les acclamer. « Tout le monde est ravi du retour des courses, il y a plus de monde à chaque fois », assure Mohammad al-Afghani. Sous la pluie, comme des dizaines d'autres spectateurs, le jeune étudiant de 18 ans ne perdait pas une miette du spectacle la semaine dernière en rêvant d'y prendre part avec sa voiture. « Mais je n'en ai pas les moyens, j'ai à peine assez pour vivre », regrette-t-il. Si certains pilotes sont professionnels, rares sont ceux qui peuvent s'offrir le luxe de courir dans un pays où le coût de la vie a explosé. Pour sa part, Amine al-Khodari, un vendeur de pièces détachées de 35 ans, « paie de (sa) poche » pour participer. « Ce n'était pas le cas avant (la guerre) », explique-t-il.

L'ex président de l'Automobile Club de Syrie Khaled el-Atassi espère maintenant que ces courses permettront le retour d'autres évènements automobile, plus importants, comme le rallye « Discover Syria », lancé en 2003 et interrompu par un conflit qui a fait près de 200 000 morts.
Enfin, pour Usan, le retour du championnat est même un signe avant-coureur du retour à la normale.
« Les choses s'améliorent, confie cette étudiante en droit de 26 ans, avant une course. On ne peut pas encore retrouver notre vie d'avant mais on y arrivera petit à petit. »

Rim HADDAD/AFP

 

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