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Moyen Orient et Monde - Conflit

L’EI ou le nouveau règne de la terreur

Le premier rapport détaillé sur l'État islamique a été rendu public hier à Genève ; guerre d'usure à l'avantage des Kurdes à Kobané.

Les jihadistes de l’EI sont désormais confrontés à une guerre d'usure à Kobané. Osman Orsal/Reuters

Une commission d'enquête de l'Onu a accusé hier l'État islamique de faire régner la « terreur » en Syrie en se livrant à des crimes contre l'humanité et crimes de guerre, et demandé que ses dirigeants soient poursuivis devant la Cour pénale internationale.

Dans son premier rapport détaillé sur l'EI, rendu public hier à Genève, la commission d'enquête sur les crimes en Syrie, mise en place par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies, établit une longue liste de crimes, documentés par quelque 300 témoignages de victimes et de témoins. Elle y dénonce des massacres ciblant des groupes ethniques et religieux, des décapitations, de l'esclavage sexuel et des grossesses forcées. Le groupe « cherche à dominer tous les aspects de la vie des civils sous son contrôle à travers la terreur, l'endoctrinement et la fourniture de services à ceux qui obéissent », affirme le rapport. « Le groupe armé mène une politique de sanctions discriminatoires telles que des taxes ou des conversions forcées sur des bases de l'identité ethnique ou religieuse, détruisant des sites religieux et expulsant systématiquement les communautés minoritaires », souligne le rapport intitulé « Règne de la terreur : vivre sous l'EI en Syrie ».

 

(Analyse : Le choc des islamismes ?)

 

Encore selon le rapport établi sous l'autorité de Paulo Sergio Pinheiro, les attaques « à grande échelle et systématiques » contre la population civile kurde et contre la minorité religieuse yazidie constituent des « crimes contre l'humanité », tout comme les disparitions forcées dans des attaques contre les populations civiles dans les régions d'Alep et de Raqqah. L'EI a « décapité, fusillé, lapidé des hommes, des femmes et des enfants dans des lieux publics dans les villes et villages du nord-est de la Syrie », poursuit ce rapport de 20 pages. Les corps des victimes sont généralement exposés sur des croix pendant trois jours, les têtes plantées sur les grilles des parcs « comme un avertissement à la population sur les conséquences du refus de se soumettre à l'autorité du groupe armé ».

 

(Lire aussi: Comment est organisé le groupe Etat islamique?)

 

Le rapport souligne également les agressions commises contre les femmes, relevant que les familles terrorisées marient précipitamment leurs filles mineures de peur qu'elles ne soient mariées de force à des combattants du groupe jihadiste. Il caractérise aussi comme « crime contre l'humanité » la mise en esclavage sexuel de femmes yazidies, vendues, violées et pour certaines engrossées.

Pour une saisine de la CPI
Enfin, le rapport souligne que les cadres du groupe, majoritairement étrangers, « sont individuellement responsables pour ces crimes » et il demande à la communauté internationale de combattre l'impunité en « engageant des mécanismes pour qu'ils rendent des comptes, y compris devant la Cour pénale internationale ». Cela dit, pour que la CPI soit saisie, il faudrait une résolution du Conseil de sécurité de l'Onu, ce que la Russie a toujours refusé en ce qui concerne le gouvernement syrien.

 

(Reportage : À Damas, le vrombissement des moteurs pour oublier le fracas des obus)


Sur le terrain, les jihadistes de l'EI sont désormais confrontés à une guerre d'usure à Kobané, en raison de la résistance des forces kurdes et des frappes de la coalition internationale. « L'EI contrôle plus de la moitié de la ville mais n'avance plus. Il y a quelques semaines, tout semblait indiquer que Kobané allait tomber et il est clair aujourd'hui qu'elle ne va pas tomber », affirme l'expert des mouvements jihadistes, Romain Caillet. Pour rappel, après s'être emparés de dizaines de villages aux alentours, les jihadistes de l'EI, précédés d'une réputation de brutalité inouïe, se sont présentés le 6 octobre aux portes de Kobané, suscitant un mouvement de panique parmi les habitants qui ont fui par dizaines de milliers vers la Turquie voisine.

« L'EI est alors tombé dans un piège terrible, notamment parce que les États-Unis avaient répété que ce n'était pas à leurs yeux une position stratégique. Mais, en réalité, leur aviation est entrée en action et rien n'est plus facile à des avions que de frapper une ville vide », souligne Romain Caillet. Ainsi, dès que les jihadistes s'emparent d'un bâtiment et mettent une dizaine de leurs hommes pour le garder, l'aviation de la coalition dirigée par les États-Unis frappe et en tue un grand nombre. Selon ce chercheur, « les jihadistes sont des Syriens mais aussi des Ouzbeks et des Tchétchènes qui sont des guerriers aguerris. Pour un combattant kurde tué, il y a deux fois plus de jihadistes qui périssent. Il y a même cinq Français qui sont morts en une seule frappe ».

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