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Campus - À vous la parole !

La laïcité, un concept qui rassemble

Pour nous sortir du marasme dans lequel nous nous enlisons jour après jour, je propose l'adoption d'une Charte de la laïcité au Liban. Elle aurait pour objectif de remettre les pendules à l'heure et de redonner à notre République la place qu'elle mérite dans la transmission des principes et des valeurs fondamentaux qui nous caractérisent et qui mettent en avant notre spécificité culturelle. Telle doit être notre mission d'avenir pour le Liban.
Pour que la République puisse porter en elle les conditions essentielles de justice et d'équité, il revient à l'État qui l'incarne de contribuer à bâtir un sens commun d'égalité, de fraternité et de liberté. Cela nécessite un changement de cap radical. Ainsi, la vocation d'une Charte de la laïcité ne consisterait pas uniquement à rappeler les règles qui nous permettent de vivre ensemble dans un espace public commun, elle consisterait surtout à aider chacun d'entre nous à respecter l'État de droit. En d'autres termes, à comprendre le sens des règles qui régissent notre vie quotidienne, à se les approprier et à les respecter au péril de notre vie.
Par conséquent, une Charte de la laïcité ne serait pas une entrave à la liberté mais plutôt la condition de sa réalisation. Elle ne serait dirigée ni contre les individus ni contre leur conscience. Bien au contraire, elle chercherait à garantir l'égalité de traitement entre et envers tous les citoyens, sans discrimination aucune. Refusant toutes les intolérances et toutes les exclusions, elle serait le fondement du respect
mutuel et de la fraternité. C'est le rôle de l'État et de chaque citoyen de faire partager les valeurs qui nous élèvent et qui nous rassemblent.
J'invite donc mes concitoyens, en ces temps radicalement animés par le fanatisme religieux, à une réflexion profonde et à considérer l'adoption d'une Charte de la laïcité qui devrait, en temps dû, servir de modèle pour nos voisins. J'en appelle aux forces vives de notre pays, y compris à sa jeunesse, aux représentants de ses diverses communautés religieuses, aux membres du gouvernement et aux membres de la Chambre des députés de prendre conscience de la réalité progressiste du XXIe siècle.
Il y a tout à parier qu'une Charte de la laïcité aurait pour conséquence l'éradication dans nos esprits et dans nos cœurs du virus du confessionnalisme. Elle mettrait définitivement fin à la discrimination et au sectarisme confessionnel, et imposerait ainsi la laïcité comme seule alternative valable pour que survive notre nation.
Je convie tous ceux qui prônent le vivre ensemble à prendre à leur compte ce combat que mènent depuis des décennies des Libanais de tous bords. Ce combat qui doit être un « combat national », non pas pour opposer les uns aux autres, mais pour se défendre contre ceux qui veulent opposer les uns aux autres.
Pour moi, la laïcité n'est pas uniquement une valeur qui se proclame, mais elle est surtout un concept qui se décline concrètement par des actes et par des prises de décisions courageuses et sans compromis. La Charte de la laïcité que je propose se poserait comme le garant de la diversité religieuse et culturelle qui caractérise le Liban et se positionnerait comme emblème unique de rassemblement et d'unité. Elle reprendrait volontiers, dans son préambule, les grands principes du pacte national de 1943 et confirmerait que le Liban est un État indépendant et souverain qui doit rester à équidistance de ses voisins arabes et des autres États étrangers. Elle confirmerait aussi que le Liban est un pays arabe dans la mesure où son indépendance et son intégrité demeurent intactes.
Une condition préalable s'impose toutefois. Ainsi, pour que le Liban puisse recouvrer son indépendance, il faudrait que ses enfants, quelle que soit leur appartenance religieuse, acceptent de vivre ensemble en harmonie et qu'ils renoncent définitivement, pour les uns, à rechercher l'appui d'une puissance étrangère et, pour les autres, à rechercher l'union ou la tutelle d'un quelconque pays arabe. Oui, un changement radical des mentalités est à espérer. Je souhaite vivement que l'application d'une Charte de la laïcité se traduise sur le terrain par une réorganisation du système institutionnel libanais, et que la liberté de culte et la méritocratie s'imposent comme les principes fondamentaux qui guident nos
institutions.
En ce faisant, la laïcité trouverait pleinement sa place au cœur d'un nouveau pacte républicain ; un pacte refondateur qui marquerait le début d'une seconde République laïque et indivisible. J'entends déjà les critiques. D'aucuns pointeront du doigt le caractère symbolique d'une telle charte. Certes, bien que symbolique, une Charte de la laïcité saurait toutefois s'imposer grâce à son caractère exceptionnel et à son inspiration historique. Insistons donc pour qu'elle prenne toute sa place et qu'elle devienne un principe constitutionnel inaliénable.

Érik W. CHINIARA, étudiant en sciences sociales et droit à l'Institut d'études politiques de Paris (France)

Pour nous sortir du marasme dans lequel nous nous enlisons jour après jour, je propose l'adoption d'une Charte de la laïcité au Liban. Elle aurait pour objectif de remettre les pendules à l'heure et de redonner à notre République la place qu'elle mérite dans la transmission des principes et des valeurs fondamentaux qui nous caractérisent et qui mettent en avant notre spécificité...

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