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Liban - Ouvrage

May Chidiac décortique le paysage audiovisuel et ses rapports avec la politique

Elle est, à n'en point douter, l'icone de la télévision au Liban, ou aussi, pour beaucoup, le symbole de l'engagement bien compris, bien réfléchi. Un engagement qu'elle a d'ailleurs payé très cher un certain jour de septembre 2005 lorsqu'une charge a explosé sous son véhicule alors qu'elle se trouvait au volant. May Chidiac, depuis, consacre le plus clair de son temps à la fondation qui porte son nom, qu'elle a créée en 2009 dans le but de promouvoir le journalisme professionnel, ainsi que les valeurs de liberté et de démocratie. Parallèlement, elle a publié deux ouvrages, Le Ciel m'attendra (en 2007) et le second qu'elle vient d'achever La Télévision mise à nu (2014, éditions L'Orient des livres).

L'ouvrage sur l'histoire de la télévision au Liban était au départ une thèse de doctorat que May Chidiac a soutenue en 2008 à l'Université Panthéon Assas Paris II et qu'elle a, par la suite, retravaillée pour en faire un document de référence en la matière. Il s'agit du premier livre du genre qui non seulement dresse un tableau global et exhaustif du parcours des différentes chaînes de télévision au Liban, mais qui analyse surtout les rapports complexes entre ces médias audiovisuels et les cercles politiques du pays. C'est précisément à ce niveau que May Chidiac pose la problématique de son ouvrage. Une problématique à double volet : elle a entrepris d'étudier en profondeur l'impact de la politique sur les chaînes télévisées et dans un second temps l'influence des médias sur la vie politique.
L'entreprise dans laquelle s'est engagée ainsi May Chidiac – et qui a nécessité de nombreuses années de recherches, de réflexion et d'entrevues avec les parties concernées – était particulièrement complexe. Le long parcours historique de la télévision étatique et le jeu politique (ou, plutôt, politicien) intervenu dans ce cadre ont constitué à eux seuls un terrain difficile d'investigations. L'auteure fournit sur ce plan moult détails qui ne sont pas dépourvus d'intérêt concernant les manœuvres qui ont jalonné l'histoire de la chaîne gouvernementale.

Ce travail de recherche a été rendu plus complexe avec l'émergence des télévisions privées en 1985 lorsque la LBCI, porte-parole des Forces libanaises, a fait son apparition dans le paysage audiovisuel du pays sous l'effet des impératifs de marketing politique liés à la guerre libanaise. Une nouvelle page était ainsi tournée dans ce domaine car le lancement de la LBCI a ouvert la voie à la naissance d'une longue série de chaînes télévisées, pour la plupart partisanes, chaque faction politique, et donc chaque communauté, estimant nécessaire d'avoir son média audiovisuel exprimant son propre positionnement et reflétant les valeurs ou les constantes qu'elle défend. May Chidiac expose en détail cette genèse à multiples facettes qui fournit, au-delà de l'aspect historique, une foule d'informations sur le contexte politique qui a accompagné la naissance et le parcours politico-médiatique des principaux médias.

Le dossier de la réglementation du paysage audiovisuel, sous le mandat du gouvernement de Rafic Hariri, ainsi que le partage des fréquences entre les communautés et les forces en présence sont exposés et analysés par l'auteur, ce qui contribue à faire de l'ouvrage un document de référence. L'un des aspects soulevés par May Chidiac sur ce plan est précisément le fort alignement partisan de chacune des chaînes de télévision actuellement opérationnelles. Ce dernier point est dénoncé sans détour par l'ancien ministre Tarek Mitri dans la préface. M. Mitri souligne en effet que la politisation poussée à l'extrême sape la mission et l'éthique professionnelle des médias audiovisuels qui sont devenus « un outil de manipulation dans le cadre de stratégies politiciennes bien déterminées ». Ce diagnostic est fait également par May Chidiac dont le travail de réflexion et de recherche devrait, lorsque le contexte le permettra, initier un débat en profondeur sur les moyens de sortir les chaînes locales, ou du moins certaines d'entre elles, des sables mouvants partisans dans lesquels elles se débattent.

M. T.

* Un débat autour de l'ouvrage de May Chidiac aura lieu aujourd'hui, à 18 h, au Biel en présence du ministre Ramzi Jreige, de l'ancien ministre Tarek Mitri, et de May Chidiac, Élie Assaf, Camille Menassa et Michel Hajji Georgiou. Le débat sera suivi de la signature au stand de L'Orient des livres.

 

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