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Moyen Orient et Monde - Trois questions à

« Les Tunisiens ont vite appris le compromis tout en gardant leurs convictions intactes »

... Kader Abderrahim, chercheur à l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), et maître de conférences à Sciences-Po, Paris.

À Tunis, des électeurs lors d’un exercice simulant un vote quelques jours avant les législatives. Zoubeir Souissi/Reuters

C'est en Tunisie que tout a commencé. Fin 2010, l'immolation dans la rue à Sidi Bouzid d'un marchand a été le point de départ d'un soulèvement populaire qui a mené, très vite, à la fuite en Arabie saoudite de Zine el-Abidine Ben Ali, après 23 ans au pouvoir. Depuis, les violences et les crises politiques se multiplient, bien que sans mesure commune avec celles qui gangrènent d'autres pays de la région. Ce dimanche, les Tunisiens doivent se rendre aux urnes pour la seconde fois depuis le début de la révolution, alors que se présentent à ces législatives, ainsi qu'à la présidentielle de décembre, des islamistes, des laïcs et des anciens responsables du régime Ben Ali...

 

Les élections tunisiennes, législatives et présidentielle, semblent l'aboutissement réussi de la révolution de 2011. Quelle est selon vous la raison de cette réussite ? Le niveau d'éducation des Tunisiens y est-il pour quelque chose ?
Oui, clairement, et il est important de préciser que le niveau d'éducation en Tunisie est l'un des plus élevés de la région, avec le Liban. La Tunisie a une élite urbaine bien formée, et les Tunisiens ont vite appris le compromis, la discussion, la coopération, tout en gardant leurs convictions personnelles intactes. Quand on voit le chaos dans certains pays – je pense notamment au coup d'État en Égypte (qui a placé Abdel Fattah al-Sissi au pouvoir, après la destitution de l'islamiste Mohammad Morsi), à la guerre en Syrie, aux violences en Libye ou encore au Yémen – on peut remarquer que la Tunisie a des élections législatives réelles et s'en sort relativement bien.

 

De tous les pays ayant connu un soulèvement populaire, la Tunisie a été celui où la violence a été la plus faible. En revanche, le débat politique pour élaborer une nouvelle Constitution a été très féroce. Pensez-vous qu'il y a une corrélation entre les deux phénomènes ?
Il vaut mieux que le débat soit violent, mais limité dans une enceinte où il est supposé avoir lieu, plutôt qu'on prenne les armes. Quand on voit l'Algérie, le Maroc, et surtout le Moyen-Orient, alors que la Tunisie sort de 60 ans de dictature, il est évident que le processus de transition prend du temps. Le dialogue doit avoir lieu, encadré par un État neutre et sans violence. Et les élections de dimanche donneront des institutions légitimes et un édifice législatif pour cinq ans.

 

Quel serait le rôle des caciques de l'ancien régime de Zine el-Abidine Ben Ali dans le nouveau régime ?
Je crois que c'est inévitable qu'ils en aient un, surtout si l'on veut une transition sans violence dans les rues. Il vaut mieux, comme on dit, que cette violence soit dedans plutôt que dehors. De plus, si ces caciques ont été admis en tant que candidats aux législatives et à la présidentielle, c'est qu'ils ne représentent pas une menace particulière, d'autant que nombre d'entre eux sont âgés. La Tunisie est en transition, passant d'un système prédateur, corrompu, et tente de se diriger vers un système démocratique qui ne sera pas idéal, certes, mais les Tunisiens sont sur la bonne voie.

 

 

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