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Sport - Pensée foot

« Le piano, c’est le ballon du footballeur »

Ils sont peu. Ils sont peu les hommes qui peuvent accumuler les défauts, les maladresses, les provocations et les erreurs et qui n'auront jamais aucun mal à se faire pardonner. Ils sont peu à pouvoir provoquer chez leurs interlocuteurs des sentiments aussi extrêmes que contradictoires. Ils sont peu à comprendre les mécanismes de l'esprit et les discours du corps.


Ils sont si peu, que chacun de leurs faits et gestes est décrypté, critiqué et imité comme un nouvel élément permettant de dévoiler le mystère qui les entoure. Ces hommes là le savent. Ils ont conscience de l'effet qu'ils dégagent et repoussent toujours plus loin les limites de ce qui leur est permis. Ils se sentent spéciaux. Si spéciaux que certain d'entre eux n'ont aucun mal à l'affirmer. Un peu par provocation, certainement. Mais surtout parce qu'ils en sont convaincus. Parmi ces hommes se trouve un Portugais, qui hier était prof de gym, étudiant à l'université et même traducteur, et qui, aujourd'hui, peut être cité parmi les plus grands entraîneurs de football de l'histoire. Un homme qui, dès son arrivée à Chelsea, et après avoir réalisé l'exploit de gagner la Ligue des champions avec Porto déclarait : « Je vous en prie, ne prenez pas cela pour de l'arrogance. Mais je suis champion d'Europe, je ne sors pas de nulle part. Je crois que je suis un type spécial. » The Special One était né. Et avec lui, ses nouvelles méthodes révolutionnaires.


Au contraire de la plupart de ses pairs, Mourinho n'a jamais été un grand joueur de football. Ce qu'il a appris, il le doit d'abord à son père, lui-même entraîneur de football, puis à ses professeurs d'université, à ses lectures en sciences humaines et en management, et enfin à ses mentors, Boby Robson et Louis Van Gaal, qu'il a côtoyé lorsqu'il était traducteur (surnommé el Traductor) au Barça. Devenu entraîneur, Mourinho met en place des séances d'entraînements adaptées aux forces et aux faiblesses de l'adversaire à venir, et fait sans cesse travailler les joueurs avec le ballon. Il l'expliquera métaphoriquement plus tard : « Un grand pianiste, pour se préparer, ne court pas derrière un piano et ne fait pas de pompes. Un grand pianiste, pour se préparer, joue du piano. Tout simplement. Du matin au soir, selon de petites variations, mais toujours avec un piano. Le piano, c'est le ballon du footballeur. »


Mourinho n'est pas un génie tactique ni un génie artistique. C'est un génie du psychique. Un génie qui lui permet de former des guerriers. Des hommes qui, une fois rentrés sur le terrain, lutteront jusqu'à la mort, possédés et transcendés qu'ils sont par le discours de leur général et animés par une seule et unique volonté, quel qu'en soit le prix : la victoire...


Il fascine les présidents, le public et surtout les joueurs. Car il sait déceler en eux ce qui les animent et ce qui les motivent. Ses nombreux succès, il les a construits à partir de l'exigence et de la précision de son travail mais aussi, et surtout, grâce à la relation qu'il entretient avec ses joueurs. Il les perfectionne, les sublime, les use et les fatigue. Il leur demande de tout lui donner, de se consacrer entièrement à lui. Et s'il peut supporter leurs erreurs, leurs faiblesses, leurs impatiences, il ne laisse aucune place à ceux qui le critiquent. Pour lui, toute critique sonne comme une trahison. Impulsif et émotif à l'ego surdimensionné, Mourinho est un homme de pouvoir. Un (plein) pouvoir qu'il ne veut partager avec personne. Ni avec le capitaine, ni avec le directeur sportif, ni avec le président. C'est ce qui explique son semi-échec au Real. Mourinho ne s'adapte pas à l'institution de la Maison blanche, il n'accepte pas que le club soit plus important que lui, il n'accepte pas tous les intermédiaires, les lobbies qui entravent quotidiennement son travail.


Pour son retour à Chelsea, il se fait désormais appelé The Happy One. Pourtant, Mourihno n'a pas changé. Il continue de provoquer, de crier, d'insulter, de titiller les ego de ses joueurs. Et, surtout, de se donner en spectacle. En se mettant en avant, en attirant toute la lumière sur sa seule personne, il dit protéger ses joueurs et porter le poids de toutes les responsabilités sur ses épaules. En réalité, il symbolise fièrement la revanche des entraîneurs sur les joueurs et la starification du travailleur de l'ombre. À chaque conférence de presse, il savoure sa victoire et écrit un peu plus sa légende. Les jeunes ne veulent plus seulement devenir Ronaldo ou Messi, ils veulent devenir José Mourinho.
Mais en attendant qu'ils y parviennent, et en attendant qu'ils le rendent complètement has been, il est et reste the Only One...

 

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Ils sont si peu, que...

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