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Économie - Référendum

En Écosse, « le non de la raison l’emporte sur le oui du cœur »

AFP/Archives

Les Écossais n'auront finalement pas leur « Independence Day ». Les partisans d'un maintien de l'Écosse dans le Royaume-Uni étaient crédités de 54 % des voix contre 46 % pour le « oui » à l'indépendance. La peur du risque économique et plus particulièrement l'incertitude de la politique monétaire étant la clé de ce référendum.
Au total, le taux de participation des électeurs écossais a atteint l'étonnant chiffre de 84,6 % ; en hausse de 20 points par rapport à celui des dernières élections générales britanniques. Un chiffre extraordinaire pour un référendum dont on supposait qu'il ne serait pas intéressant, qui n'était pas pris au sérieux à Londres et qui n'était même pas très couvert par les médias britanniques avant la frénésie des dernières semaines.
La peur du risque économique (par rapport à la monnaie sterling, l'appartenance à l'Union européenne et l'emploi entres autres) est la principale raison pour laquelle l'Écosse a voté contre l'indépendance au référendum.
Interrogée par L'Orient-Le Jour, Catherine Mathieu, économiste senior au département Analyse et Prévision à l'observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) de l'université Sciences po Paris et spécialiste des questions européennes, insiste sur le fait que la principale raison du « non » serait l'incertitude vis-à-vis de la politique monétaire de l'Écosse.
« Le ''non'' de la raison l'emporte sur le ''oui'' du cœur », estime-t-elle.
« Si l'Écosse avait été indépendante, une nouvelle monnaie propre au pays aurait été créée, avec une nouvelle Banque centrale. Mais avec en face une Bank of England dont les taux d'intérêt sont relativement bas. Pour les Écossais, cette dimension a joué un très grand rôle dans leur décision », ajoute-t-elle.
Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, jugeait déjà difficile l'adhésion d'une Écosse indépendante à l'Union européenne.
« Je pense que cela va être extrêmement difficile, voire impossible » pour l'Écosse d'intégrer l'UE si le « oui » l'emporte au référendum du 18 septembre, a déclaré José Manuel Barroso sur la BBC, quelques mois auparavant.
« Cette déclaration parmi d'autres de personnalités hors Écosse semblerait être une menace adressée à d'autres régions comme la Catalogne ou le nord de l'Italie. Elle n'a pas joué dans le débat de l'Écosse à l'indépendance », a expliqué l'experte.
Du côté du risque de l'emploi, Mme Mathieu rappelle qu'« il est vrai que la Royal Bank of Scotland a menacé de rapatrier son siège social en Angleterre. Ce qui semble logique car l'essentiel de sa clientèle est en dehors de l'Écosse. Mais les emplois n'étaient pas pour autant menacés ».

Cameron vs les indépendantistes
Les trois partis traditionnels britanniques ont joué leur va-tout en publiant 48 heures avant le référendum d'autodétermination en Écosse une déclaration conjointe solennelle promettant une autonomie accrue aux Écossais s'ils votent non à l'indépendance.
« Le texte signé par le Premier ministre conservateur David Cameron, le leader du Parti d'opposition travailliste Ed Miliband et le vice-Premier ministre libéral-démocrate Nick Clegg était l'élément central qui a basculé les indécis (environ 8 %) », précise Mme Mathieu.
En effet, avoir plus d'indépendance budgétaire était déjà un élément-clé de la campagne des indépendantistes.
Pour ces derniers, plus de pouvoir budgétaire peut signifier par exemple une taxation sur les ménages différente selon le revenu ou un taux d'imposition des entreprises plus faible.
Mais l'experte insiste sur le fait qu'« on rentre dans un processus de concurrence fiscale si le taux d'imposition des entreprises est plus faible que celui de l'Angleterre ».
« Cela est hautement discutable entre pays européens et même à l'intérieur du pays pour favoriser telle ou telle région. Cela aurait posé de grands problèmes au sein du pays », ajoute-t-elle.
Les indépendantistes prônaient aussi un niveau de dépenses sociales plus élevées. « L'Écosse aurait pu tirer profit au sens où cela fait des années que le pays recevait des pressions pour revoir à la baisse des dépenses. »
Mais le Premier ministre britannique David Cameron ne s'était pas engagé par écrit sur la possibilité de taux d'imposition ou de dépenses sociales.
Le texte avait seulement martelé que c'est le gouvernement écossais qui aura « le dernier mot » sur le financement du système de santé public NHS en Écosse, l'un des thèmes majeurs de la campagne sur lequel le camp du oui mettait l'accent.

Une union soulagée
Discrets pendant la campagne, plusieurs chefs de gouvernement européens et la Commission ont exprimé leur soulagement à la suite des résultats du référendum, remporté par les unionistes.
« Certains ont cependant dit craindre que ce scrutin n'ait ouvert une boîte de Pandore et n'inspire d'autres régions d'Europe, comme la Catalogne », poursuit Mme Mathieu.
À cet égard, le président du gouvernement espagnol Mariano Rajoy, hostile à l'idée d'un référendum dans son pays, a également salué le résultat du référendum. « Les Écossais ont ainsi évité de graves conséquences économiques, sociales, institutionnelles et politiques », a-t-il dit dans un message vidéo diffusé sur le site Internet du gouvernement.
« Ils ont fait le meilleur choix pour tout le monde – pour eux-mêmes, pour toute la Grande-Bretagne et pour le reste de l'Europe », a ajouté le chef du gouvernement espagnol.
À Bruxelles, la Commission européenne a déclaré que le résultat du vote écossais était bon pour « une Europe plus forte, unie et ouverte ».
Du côté britannique, l'experte estime qu'il n y a pas eu de conséquences économiques négatives mais que peut-être un changement « dans le paysage politique britannique » peut avoir lieu, avec plus de discussions et de négociations avec les principaux pouvoirs du Royaume-Uni.
La Royal Bank of Scotland a déclaré dés le lendemain du référendum qu'elle ne remettrait plus en cause la délocalisation de ses activités.
Catherine Mathieu conclut en estimant que l'Écosse peut bien en profiter si « les négociations se mettent en place ».

Les Écossais n'auront finalement pas leur « Independence Day ». Les partisans d'un maintien de l'Écosse dans le Royaume-Uni étaient crédités de 54 % des voix contre 46 % pour le « oui » à l'indépendance. La peur du risque économique et plus particulièrement l'incertitude de la politique monétaire étant la clé de ce référendum.Au total, le taux de participation des...

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