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À La Une - Irak

L'armée irakienne n'est pas en position de reconquérir Mossoul

La reprise de la ville, partie intégrante du "califat" proclamé par l'EI, sera "une question de mois au moins", estime un expert.

Des peshmergas (combattants kurdes), en août 2014, près de Mossoul. Photo AFP

Appuyées par les frappes américaines, les forces kurdes et fédérales irakiennes ont repris plusieurs villages aux jihadistes de l'Etat islamique (EI), mais la reconquête de Mossoul, deuxième ville d'Irak, s'annonce comme un défi militaire bien plus difficile.

"Les conditions pour lancer la bataille pour Mossoul ne sont pas réunies pour le moment", affirme à l'AFP Rouch Nwri Shaways, qui commande les peshmergas (forces kurdes) dans la zone d'al-Khazer, à une trentaine de kilomètres de la grande ville du nord de l'Irak. "Il est clair que le rapport de forces reste en faveur de l'ennemi", précise-t-il.

Reconquérir Mossoul est "un objectif essentiel" pour Bagdad, affirmait en début de semaine le ministre irakien des Affaires étrangères, Ibrahim al-Jaafari. "Grâce aux opérations armées que nous allons mener, je pense qu'il ne sera pas très difficile d'y arriver", disait-il.
Mais la reconquête de Mossoul sera "une question de mois au moins", estime Anthony Cordesman, expert au Centre for Strategic and International Studies. Sauf si "l'Etat islamique implose pour quelque raison interne".

Très peu d'informations sont disponibles sur les conditions dans lesquelles l'EI contrôle et défend Mossoul, qui comptait environ deux millions d'habitants avant le conflit.
Les combattants ultra-radicaux l'ont prise le 10 juin, au lendemain du lancement de l'offensive fulgurante qui leur a permis de s'emparer de secteurs entiers du nord et de l'ouest du pays, quasiment sans résistance de l'armée. La ville fait partie du "califat" qu'ils ont proclamé sur les territoires sous leur contrôle en Irak et en Syrie voisine.

(Repère : Coalition internationale contre l'EI : Qui va faire quoi?)

 

"Front ouvert"
Ces dernières semaines, une contre-offensive a offert des petits succès aux forces anti-jihadistes, notamment la reprise du barrage de Mossoul fin août grâce à l'appui des frappes américaines.
Mais "c'était un front ouvert, inhabité, et l'EI a été débordé", explique Kirk Sowell, analyste et éditeur de la lettre d'information Inside iraqi politics.

Les Kurdes ont aussi repris cette semaine sept villages à l'entrée de la plaine de Ninive, qui s'étend jusqu'à Mossoul. Mais entre eux et la deuxième ville d'Irak se trouvent encore les villes de Bartalla et Qaraqosh, sous contrôle de l'EI.

Plus au Sud, les forces irakiennes "ont essayé à plusieurs reprises de reprendre Tikrit et ont échoué, et elles luttent pour sauver Dhoulouiyah, une ville de taille moyenne à 80 km au nord de Bagad. Alors évidemment, elles n'ont pas la capacité de reprendre et garder Mossoul", affirme Kirk Sowell.

Pour avancer vers Mossoul, "nous avons besoin d'une vraie coopération de la communauté internationale. Il nous faut une aide militaire régulière et solide, des équipements, des armes et de munitions", martèle M. Shaways, tout juste nommé ministre des Finances du nouveau gouvernement irakien.

Anthony Cordesman remarque que "les peshmergas n'ont jamais été très lourdement équipés", or l'EI a mis la main sur l'arsenal militaire abandonné par l'armée irakienne dans sa fuite.

Plusieurs pays ont commencé à livrer des armes aux combattants kurdes et à dépêcher des instructeurs pour les former. Et c'est non loin de Mossoul qu'a eu lieu vendredi la toute première frappe aérienne de la France en Irak, pour détruire un dépôt logistique de l'EI.

(Lire aussi : Le Pentagone élabore une stratégie méticuleuse contre l'EI en Syrie)

 

"Bouclier humain"
L'un des objectifs les plus urgents des États-Unis est maintenant de remobiliser et renforcer l'armée irakienne, appelée à jouer un rôle central dans la reconquête de Mossoul, qui devra être menée par des troupes au sol.

Or l'Irak "n'a qu'un petit nombre de forces spéciales qui peuvent être efficaces dans ces circonstances et les peshmergas ne peuvent pas reprendre Mossoul, ville arabe", souligne Kirk Sowell.

Pour lancer la contre-offensive, il faut aussi "résoudre les problèmes politiques" qui rongent l'Irak, selon M. Cordesman.

A Mossoul, ville majoritairement sunnite, les jihadistes ont bénéficié du soutien d'une partie de la population, lassée des exactions des forces de sécurité majoritairement chiites. La manière avec laquelle réagira la population de Mossoul au lancement d'une opération d'envergure représente l'une des inconnues que doivent tenter d'évaluer les stratèges militaires.

Selon le général britannique à la retraite Ben Barry, expert militaire à l'Institut international d'études stratégiques (IISS), en se repliant dans les villes, l'EI veut pousser les forces américaines ou irakiennes à la faute. "Elles infligeront des pertes parmi les civils en voulant frapper les jihadistes (...) et ces derniers utiliseront leurs outils de propagande pour monter les sunnites contre le gouvernement irakien".

Ahmed Ali, de l'Institute for the Study of War, ajoute que l'EI "va probablement utiliser les civils comme bouclier humain", mais "la priorité doit en tout cas être d'éviter les victimes civiles".

 

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