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Moyen Orient et Monde - Gaza

« Même si mon père est mort, je suis contente de faire ma rentrée »

En ce premier jour d’école, pour aider les enfants à faire face à leurs traumatismes et leurs angoisses, les instituteurs leur ont préparé « des jeux, des chants et des mises en scène. » Mohammad Abed/AFP

En ce jour de rentrée des classes à Gaza, les petits Palestiniens partagent, dans leurs écoles bombardées par les avions israéliens, leurs angoisses.

Avec trois semaines de retard, après un conflit de 50 jours qui a fait plus de 2 140 morts, plus d'un demi-million d'enfants ont retrouvé le chemin de l'école dans l'enclave palestinienne ravagée durant l'été. Après avoir perdu des proches et pour certains leur maison, cette rentrée des classes est aussi l'occasion de raconter ses cauchemars et partager sa peine. Azhar, qui a perdu son père pendant la guerre, la troisième en six ans à Gaza, récite avec application le poème qu'elle lui a écrit : « Que te dire papa ? Te dire ''je t'aime'' ne suffit pas papa », ânonne la fillette de neuf ans devant une classe en larmes. « Même si mon père est mort, je suis contente de faire ma rentrée », dit-elle à l'AFP. Aînée d'une fratrie de six enfants, elle annonce que, plus tard, elle sera médecin. « C'est ce que mon père voulait », lance-t-elle fièrement, en racontant qu'elle prie chaque jour « pour que Dieu l'envoie au paradis ». Mais le plaisir de retrouver sa classe et ses camarades ne change rien à ses angoisses : « J'ai peur que la guerre recommence », dit-elle, se remémorant les roquettes qui ont plu sur sa maison, emportant son père.

(Reportage : Sans eau depuis la guerre, les Gazaouis creusent des puits)

« Faire parler le plus possible »

Esraa, sa voisine de classe, raconte les corps de ses proches et de ses voisins qu'elle a vus, gisants, après les bombardements, tandis que Douaa évoque ses fournitures scolaires réduites en cendres par les raids de l'aviation israélienne. « On avait fui notre maison et quand on est revenus, j'ai vu que toutes mes affaires avaient disparu sous la maison qui s'était écroulée », dit la fillette de neuf ans.

Pour faire face à ce flot d'histoires et de traumatismes, Rima Abou Khatla, institutrice, dit avoir été formée rapidement peu avant la rentrée. À travers différentes activités, dit-elle, « nous essayons d'aider les élèves à évacuer leurs émotions ». « On se raconte ce qui nous est arrivé pendant les vacances d'été, certaines histoires font rire, d'autres pleurer : le but est de les faire parler le plus possible. » Et la catharsis passe aussi par « des jeux, des chants, des mises en scène », énumère-t-elle.

L'agence de l'Onu pour l'aide aux réfugiés palestiniens (Unrwa) qui gère 245 écoles à Gaza a ainsi formé des milliers d'instituteurs avant la rentrée, alors que selon l'Onu, au moins 373 000 enfants devront être suivis psychologiquement après cette guerre. Ce conflit, le plus long et le plus meurtrier à Gaza depuis le retrait israélien de 2005, a tué plus de 500 enfants, selon l'Onu, et blessé des milliers d'autres. Outre les pertes humaines, les dégâts matériels ont également perturbé la vie de centaines de milliers d'enfants.

(Lire aussi : Des dizaines d'officiers et soldats israéliens refusent de participer à de nouveaux "abus")

24 écoles entièrement détruites

Samia al-Zaalane, directrice de cette école de Chajaya, un des quartiers de la ville de Gaza les plus touchés par les destructions, affirme que de nombreux élèves ont dû être transférés vers d'autres écoles après que la sienne a été endommagée. Sur les 18 salles de classe, seules neuf peuvent encore accueillir des élèves. « De 35 élèves par classe, on est passés à 60 », dit-elle. Et, avec les bombardements, ce sont des dizaines de dossiers scolaires et médicaux d'élèves qui sont partis en fumée, explique-t-elle encore.
Selon le ministère de l'Éducation, au moins 24 écoles ont été entièrement détruites dans la bande de Gaza, et 190 autres ont été endommagées dans l'enclave où près de 45 % de la population a moins de 14 ans. Avant la guerre, l'ONG israélienne Gisha qui lutte pour la liberté de mouvement des Palestiniens estimait déjà qu'il manquait 259 écoles à Gaza, notamment en raison de la pénurie de matériaux de construction imputable au blocus israélien. Et il y a les écoles qui sont encore debout mais ne peuvent accueillir aucun élève, car dans la bande de Gaza, où plus de 20 000 maisons ont été rasées, quelque 65 000 Palestiniens sont encore abrités dans des écoles de l'Unrwa, dans l'attente d'une solution de relogement qui tarde à venir.


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