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Diaspora - Portrait

« Avec la science, je voulais comprendre le monde, c’est dans la danse que j’ai trouvé les réponses »

Nada Chouaïb, une Libanaise en Andalousie, a laissé derrière elle une carrière d'ingénieure pour se consacrer à sa passion : la danse orientale.

L’artiste s’initie à la danse orientale dès la sortie de l’adolescence.

Debout sur le pont du bateau, emmitouflée dans une parka et un bonnet, le visage soufflé par le vent polaire, Nada Chouaïb fixe les montagnes de glace qui s'étendent à l'horizon. L'équipe de chercheurs dont elle fait partie se rend en Antarctique pour collecter des données et récolter des échantillons. « C'est une expérience humaine intense, un mois sur un bateau. Et les paysages, extraordinaires... » Les mots lui font défaut lorsqu'elle se remémore cet épisode de sa vie. Peut être parce que son quotidien a tellement changé. Fini le froid glacial et les contraintes strictes qu'exige la vie sur un navire. Aujourd'hui, sa vie se déroule sous le soleil andalou, dans une bourgade tranquille bercée par les rythmes du flamenco.
L'enfance de Nada est dispersée aux quatre coins du globe. Née à Beyrouth, elle a vécu au Mexique, au Gabon et en France. C'est là qu'elle fait ses études d'ingénieur. Son premier poste est à Rome, auprès de l'Agence spatiale européenne, avant de retrouver Paris et l'Institut de recherche pour le développement. C'est dans le cadre de ce travail qu'elle parcourra les océans, jusqu'au extrémités australes du globe.
Entre-temps, la jeune femme s'est laissé piquer par une autre passion. À la recherche d'un lien plus fort avec ses origines, Nada explore la culture arabe et s'initie à la danse orientale à la sortie de l'adolescence. « J'ai pratiqué la danse classique quand j'étais enfant, alors ça m'a semblé le moyen le plus accessible de pénétrer la culture arabe, explique-t-elle ; j'ai complètement oublié la langue arabe lorsque nous avons quitté le Liban, alors je me suis tournée vers le langage non verbal. »
Au fil des années, la danse va prendre une place de plus en plus grande dans sa vie. À Paris, la jeune ingénieure commence à donner des leçons, à composer des spectacles : « Après le boulot je donnais trois ou quatre heures de cours. Le week-end, je passais 5 heures par jour à répéter mes chorégraphies. » Avec deux autres danseuses, Nada crée une compagnie. Le succès est au rendez-vous. Les spectacles montent sur des scènes prestigieuses : le Divan du monde, l'Institut du monde arabe, entre autres.

Une passion envahissante
Une dizaine d'années après avoir commencé à travailler, Nada se trouve face à un constat : la danse a pris trop de place dans sa vie. Elle doit choisir entre sa passion pour les mouvements du corps et la sécurité matérielle d'une carrière scientifique.
Le choix est vite fait. Elle démissionne de l'Institut de recherche pour le développement. Avec son mari, lui aussi ingénieur et guitariste à ses heures perdues, elle quitte la France pour le sud de l'Espagne. Le couple avait déjà eu l'occasion de visiter plusieurs fois Jerez de la Frontera, considérée comme le berceau du flamenco. Avec ses ruelles calmes, ses maisons traditionnelles et sa vie culturelle bouillonnante, c'est le lieu idéal pour commencer leur nouvelle vie. Il y a quatre ans, le couple achète une demeure typique, abandonnée par ses propriétaires. Il entreprend de la rénover dans le respect de son caractère initial. Les murs blanchis contrastent avec le bleu des carreaux au sol. Les poutres apparentes laissent deviner l'âge de l'édifice. Une seule transgression : les petites pièces du rez-de-chaussée, qui accueillaient dans le passé les familles nombreuses, sont réunies pour former un grand espace, le studio de danse.
C'est là que se réunit la compagnie que Nada a formée il y a un an : Tarab al-Andalus. « Par mes activités de formation et de création, je veux faire redécouvrir au public local son héritage arabe », raconte-t-elle, sans toutefois se couper des influences espagnoles : « Avec un groupe local, nous avons créé un spectacle de danse et de musique, al-Compas al-Andalus, qui mélange le flamenco et la culture orientale. »
Beyrouth, sa ville natale, reste chère à son cœur. Au moment de quitter Paris, Nada a longtemps pensé à un retour au Liban. « Beyrouth est une frénésie, tout va très vite. Trop vite, peut-être parce que quand ça va bien, il faut en profiter, se justifie l'artiste. Le conflit de 2006 m'a fait réaliser que la guerre serait toujours présente en trame de fond. J'aime profondément Beyrouth, mais je ne m'y voyais pas construire quelque chose. »
À défaut de pouvoir s'installer au Liban, elle travaille à importer la culture du pays dans sa région d'adoption. En 2013, Nada invite la danseuse libanaise Amani à Jerez pour animer une formation. Enchantée par l'Andalousie, Amani a déplacé l'édition 2014 de son festival annuel de danse orientale à Séville.

Debout sur le pont du bateau, emmitouflée dans une parka et un bonnet, le visage soufflé par le vent polaire, Nada Chouaïb fixe les montagnes de glace qui s'étendent à l'horizon. L'équipe de chercheurs dont elle fait partie se rend en Antarctique pour collecter des données et récolter des échantillons. « C'est une expérience humaine intense, un mois sur un bateau. Et les paysages,...