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Culture - Festival de Baalbeck

À eux deux ils font la carte du (non)-tendre

Fanny Ardant et Gérard Depardieu ont clôturé la saison en interprétant, au Casino du Liban, la « Musica deuxième » de Marguerite Duras. Plus d'une heure de réelle intimité et de dialogue où tout couple aurait pu se reconnaître.

Fanny Ardant et Gérard Depardieu, un couple que tout à la fois sépare et réunit. Photo Michel Sayegh

Que font un homme et une femme quand ils se retrouvent dans une chambre d'hôtel après que leur couple ait volé en mille éclats et que le divorce ait été prononcé? Ils refont l'inventaire de leur vécu. Un constat plutôt triste qui témoigne des failles et des brisures de cette écorce amoureuse qui se veut parfois infaillible.
Lui est assis dans un fauteuil rouge (presque durant la moitié de la pièce). Elle se tient debout devant lui, pâle dans une sobre robe noire sévère, tristounette. La première question qu'elle lui pose concerne l'avenir des meubles communs. « Que va-t-on faire des meubles», interroge-t-elle? La vie commune se restreint-elle à ces objets ? Bien sûr que non, elle va bien au-delà. Dans tous ces sentiments enfouis qui remontent brusquement à la surface par une nuit dans une chambre d'hôtel où les gestes se font maladroits, où les mots
ricochent.


Certes, Gérard Depardieu a pris du poids. Certes, toutes les rumeurs qui courent à son propos tendent à embrumer sa belle carrière d'acteur. Mais là, en interprétant le rôle de cet homme qui tente d'expliquer la faillite de couple, tout cela n'a plus aucune importance. Aux oubliettes, ragots et rumeurs. L'homme qui est là, le Gégé comme on l'appelle, a l'étoffe des grands acteurs. De ceux qui – comme Marlon Brando – en entrant sur scène laissent toutes les difficultés familiales et autres aux vestiaires. Depardieu a la voix qui module comme la Musica de Marguerite Duras (pièce théâtrale cependant sans musique). Il a le geste tantôt large, tantôt parcimonieux, mais l'éloquence de la « gesture » (comme disent les Anglais). Il a enfin la présence d'un acteur et du rôle qu'il porte. Pourtant, dans une interview électronique, Gérard Depardieu s'est défendu d'être simplement un comédien : « Le théâtre prend du temps alors que le cinéma est rapide, avait-il dit. La vie nous apporte des choses tellement intéressantes et je ne voudrais pas seulement être un acteur. »
Face à lui, Fanny Ardant, tout en sobriété et retenue, qu'on devine pourtant au cours de la pièce blessée, voire écorchée et qui parvient néanmoins, malgré une certaine « fixité », à traduire toutes les turbulences de la vie conjugale. Elle a même la modestie de donner à son partenaire toute la place nécessaire à sa
dimension.


Si la musicalité n'est pas ostentatoirement visible dans cette pièce de Duras, par contre celle des sentiments est en filigrane. Elle traverse les paroles et les non-dits, et c'est au spectateur de les ressentir, parfois même dans les pauses qui scandent le dialogue. Ces deux grands comédiens, eux, sont parvenus à exprimer ces non-dits par le silence et la ponctuation du texte. «Être à l'écoute de l'autre, dit Depardieu, c'est l'essentiel dans une interprétation. » Et surtout, ajouterons-nous, dans une situation qu'il est difficile de mettre en scène.
Nourris de leurs expériences respectives, de leur long parcours professionnel et personnel qui s'est à maintes fois croisé (La Femme d'à côté), ces deux grands comédiens ont offert au public libanais une représentation où les mots ciselés – malgré le statisme qu'impose la pièce – taillent dans la chair et bouleversent les cœurs.

 

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