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Moyen Orient et Monde - Le point

« Cette obscure clarté... »

Un président trempé jusqu'aux os, flottant dans son pardessus, ses lunettes embuées : c'est cette image que certains médias ont voulu retenir d'une journée marquée par les intempéries, et pas seulement sur l'île de Sein, dans le Finistère. Un président qui, pour décrire la situation dans laquelle il risquait de s'enferrer – et la France avec lui –, venait d'avoir des accents churchilliens : « Rien sans effort, rien sans abnégation, rien sans courage. »
Quelques heures auparavant, trois ministres venaient d'être débarqués, le plus flamboyant d'entre eux désormais réduit à vitupérer cette « absurdité financière » qui a nom austérité mais qui fait l'insolente bonne santé de l'Allemagne de la Kanzlerin, les deux autres tenus d'aller voir si l'herbe est plus tendre sur le pré gauche du PS. La nouveauté cette fois, tout le monde s'accorde, ces dernières quarante-huit heures, à la voir dans le choix d'un anti-Montebourg à Bercy, un banquier d'affaires venu de chez Rothschild, soit un homme pour qui la finance n'est pas l'ennemi, il s'en faut, un secrétaire général adjoint de l'Élysée qui remettait constamment en cause le Smic et plaidait pour l'abolition du sacro-saint principe des 35 heures cher à Martine Aubry. Elle serait plutôt, cette nouveauté, à trouver dans l'étiquette que, par avance, le chef de l'État a collée au nouveau ministère, celle de la « clarté », un substantif qui cadre plutôt mal si l'on pense au brouillard qui entourait jusque-là les petits arrangements chers à François Hollande.
Après avoir balancé par-dessus bord son aile gauche, voici le gouvernement confronté désormais à une grogne qui va aller en s'amplifiant, avec à l'Assemblée une assise réduite, dans la rue une opinion publique impatiente de voir se produire une amélioration de son pouvoir d'achat, chez les maîtres de forge enfin un patronat soucieux de voir « des faits et des mesures », comme l'a dit « Monsieur Medef » avant une rencontre avec le Premier ministre, dans l'après-midi. De prime abord, la tâche paraît herculéenne, voire impossible à accomplir, au moment – mauvais timing – où les voyants s'obstinent à demeurer au rouge, qu'il s'agisse de la croissance au troisième trimestre, des prévisions d'investissement, des chiffres de l'emploi ou bien du commerce de détail.
Plus que le président de la République, Manuel Valls joue son va-tout avec ce second gouvernement, formé 147 jours après une première équipe succédant à celle, désespérément terne, de Jean-Marc Ayrault. C'est qu'il ne prend même pas la peine de s'en défendre – pourquoi d'ailleurs le ferait-il ? – quand on lui fait reproche d'une ambition démesurée et d'un social-libéralisme qui suscite des poussées d'urticaire dans les rangs de sa formation, qui semble avoir oublié les slaloms d'un certain François Mitterrand. À ce propos, nul non plus ne pourra reprocher à Emmanuel Macron d'avoir tourné le dos aux siens, lui qui n'a jamais hanté les couloirs de la rue de Solferino, encore moins manigancé dans l'ombre pour avoir une place au soleil. « What you see is what you get », diraient de lui les Américains. Entourant ces deux poids lourds, six hommes et huit femmes mobilisés au service d'une même cause, parlant d'une même voix et point tenté de jouer au petit soldat. Désormais, veut-on nous faire croire, il n'y aura plus d'opposants de l'intérieur, plus de « snipers »
Le pari est risqué, mais que pouvait faire d'autre un président acculé dans les cordes et ne pouvant plus se payer le luxe de continuer à tergiverser, avec une cote, inégalée dans les annales de la Ve République, de 17 pour cent d'opinions favorables ? Demain, si la présidentielle devait être appelée à se jouer, prédisent les cassandres, l'actuel chef de l'État arriverait en troisième position, loin derrière le candidat du Front national et celui de l'UMP, soit un 5 mai 2002 à rebours.
Nul ne se hasardera à l'avouer, mais si la France fait figure (à tort d'ailleurs) d'homme malade de l'Europe, le parti de Jean Jaurès, lui, se porte encore plus mal avec des rangs divisés comme jamais ils ne l'ont été, des faiblesses impardonnables, un amateurisme que lui envieraient les Pieds Nickelés Coppé-Fillon-Raffarin et une incohérence dans le cheminement politique de plus en plus évidente.
Quand il faudrait un nouvel Antoine Pinay, un nouveau Raymond Barre, on ne voit poindre à l'horizon qui poudroie que des hommes qui la jouent perso et qui se vantent de n'avoir jamais servi dans le secteur privé, alors qu'outre-Atlantique, c'est dans le vivier de Goldman Sachs, de Merrill Lynch, de General Motors ou ailleurs que l'Oncle Sam va chercher ses grands serviteurs. Sans doute arrive-t-il parfois à ces Diafoirus de cafouiller, mais le « backup » est là qui pallie les ratés du système. De quel moteur de soutien dispose la France aujourd'hui ?
Et, au fait, que contient la boîte à outils de M. Hollande ?

Un président trempé jusqu'aux os, flottant dans son pardessus, ses lunettes embuées : c'est cette image que certains médias ont voulu retenir d'une journée marquée par les intempéries, et pas seulement sur l'île de Sein, dans le Finistère. Un président qui, pour décrire la situation dans laquelle il risquait de s'enferrer – et la France avec lui –, venait d'avoir des accents...

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