Rechercher
Rechercher

Économie - Trois questions à ... Jean-François Di Meglio

« Le mirage chinois est en train de s’effacer »

... Jean-François Di Meglio, président d'Asia Center en France et enseignant à l'IEP Lyon, à l'École centrale Paris et à HEC ParisTech.

Les investissements étrangers en Chine ont chuté de 7,81 milliards de dollars en Juillet, tombant à leur plus bas chiffre depuis 2011. Le ministère du Commerce chinois assure que cette diminution n'a aucun lien avec les enquêtes antimonopoles lancées par la Chine contre certaines entreprises à capitaux étrangers, comme l'Allemand Audi ou l'américain Chrysler, tous deux reconnus coupables de « pratiques monopolistiques ».

Cette chute des investissements étrangers en Chine a-t-elle vraiment un lien avec les enquêtes antimonopoles de la Chine contre des entreprises étrangères ? Y a-t-il d'autres raisons ?
Absolument. Mais ce n'est pas la seule raison. Il faudrait tout d'abord prendre le contexte général et regarder le « fond du tableau » : avec la crise de 2008, qui a touché les pays développés (États-Unis, Union européenne...), la croissance était par ailleurs présente dans les pays émergents comme la Chine. Mais, depuis 2013, tous les gérants (de portefeuille, private equity...) reviennent en masse dans les pays développés, estimant que la croissance sera présente et qu'il y aura des rendements. Il y a eu donc un « rebalancing » des investissements vers les pays développés, un retirement de fonds des pays émergents. La deuxième raison, serait le « reshoring », qui a commencé aux États-Unis et qui consiste à investir chez soi (avec des coûts de transports plus faibles et une meilleure maîtrise de l'investissement), au lieu d'investir à l'étranger, qui n'est finalement pas aussi rentable qu'on ne le pensait. Le gouvernement français essaye depuis des années d'adopter cela et de rapatrier les capitaux vers leurs lieux d'origine. La dernière raison est donc celle que vous avez signalé, qui est l'enquête antimonopoles de la Chine contre certaines entreprises étrangères, surtout celles du secteur de l'automobile, qui vendent leurs voitures trop cher en Chine. Certaines entreprises étrangères admettent leurs erreurs de pratiques monopolistiques et d'autres non. Aujourd'hui, il va falloir penser deux fois avant de dépenser en Chine. Le mirage chinois est en train de s'effacer.
Mais il ne faut pas toujours voir un seul côté des choses. Les investissements étrangers en Chine représentent prés de 100 milliards de dollars par an, ce qui est quand même un chiffre important. Le PIB de la Chine étant de 8 000 milliards de dollars, les investissements étrangers représentent donc 1,2 % de l'économie chinoise. Si on élimine ces investissements, la croissance chinoise peut tomber a 7 %, voire à 6 %. La Chine a donc toujours besoin des investissements étrangers.

Les firmes étrangères ne sont pas effrayées par les enquêtes en cours ?
Toutes les grandes entreprises sont obligées d'avoir une stratégie chinoise pour réussir. Elles ne sont pas effrayées, mais plutôt plus prudentes en termes de dépenses et d'investissements en Chine. Mais cette baisse des investissements en Chine peut en cacher une autre : la chute très forte des investissements au Japon (-40 %). Ce résultat ne surprend personne, connaissant la forte relation commerciale entre les deux pays. La Chine étant un très grand investisseur au Japon. Il y a clairement l'apparition d'un « effet domino ».

En contrepartie, les investissements chinois à l'étranger ont bondi de 84,9 % sur un an en juillet. Pékin est-il soucieux de sécuriser ses approvisionnements en matières premières ?
Bien sûr. Mais ce n'est pas tout. La Chine détient 4 000 milliards de dollars de devises en réserve, soit la moitié du PIB chinois. Jusqu'à présent, les investisseurs chinois partaient plutôt vers des investissements à bas risques ou vers des bons du Trésor américains, mais avec toujours la possibilité d'une dévaluation de l'autre devise, comme le dollar, et donc la possibilité de rendements plus faibles.
Maintenant, ils utilisent ces réserves pour investir en matières premières, pour sécuriser leur approvisionnement. L'Europe étant la première destination des investisseurs chinois.

Les investissements étrangers en Chine ont chuté de 7,81 milliards de dollars en Juillet, tombant à leur plus bas chiffre depuis 2011. Le ministère du Commerce chinois assure que cette diminution n'a aucun lien avec les enquêtes antimonopoles lancées par la Chine contre certaines entreprises à capitaux étrangers, comme l'Allemand Audi ou l'américain Chrysler, tous deux reconnus coupables...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut