Le président Barack Obama a exhorté hier à éradiquer le « cancer » de l'État islamique, qui a revendiqué la décapitation d'un journaliste américain.
Le visage grave, s'exprimant de son lieu de vacances, le président américain a appelé « les gouvernements et les peuples du Moyen-Orient » à travailler ensemble pour « extraire ce cancer afin qu'il ne se répande pas ». Il a promis que les États-Unis, qui procèdent à des frappes aériennes dans le nord de l'Irak depuis le 8 août, continueraient à lutter contre ces jihadistes ultraradicaux. En effet, le Pentagone envisage d'envoyer « un peu moins de 300 » soldats américains supplémentaires en Irak à la demande du département d'État, a indiqué un haut responsable américain sous le couvert de l'anonymat hier. Peu avant, l'armée américaine avait annoncé qu'une nouvelle vague de 14 bombardements avait été menée ces dernières 24 heures.
Le président des États-Unis a jugé que l'EI n'avait « pas sa place au XXIe siècle » et que ce groupe islamiste ultraradical « ne parlait au nom d'aucune religion », car « aucune religion ne dit massacrer des innocents ».
Menaçant, il a prévenu que « quand des Américains sont visés quelque part, nous faisons ce qui est nécessaire pour que justice soit faite ». Avant cette intervention présidentielle, la Maison-Blanche avait confirmé « l'authenticité » de la vidéo diffusée la veille par l'EI montrant l'assassinat de James Foley par l'EI.
Pour Michael Morell, un ancien de la CIA, cet assassinat est la « première attaque terroriste » de l'EI contre les États-Unis. Aux yeux également du sénateur républicain Marco Rubio, l'EI « a déclaré la guerre aux États-Unis ».
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L'accent british...
Dans leur vidéo diffusée mardi sur Internet, l'EI, qui s'est taillé une réputation de groupe sanguinaire, montre un homme s'exprimant en anglais avec un accent britannique, masqué et habillé de noir qui semble couper la gorge de James Foley, enlevé en novembre 2012 en Syrie. Le Premier ministre britannique David Cameron a ainsi déclaré qu'il était « de plus en plus probable » que le bourreau non identifié soit un Britannique.
La vidéo de l'EI est intitulée Message à l'Amérique et a été tournée dans une zone désertique impossible à identifier : l'EI y montre aussi l'autre journaliste américain identifié comme Steven Sotloff, qu'il menace d'exécuter si les frappes ne cessent pas. La mère de James Foley, Diane Foley, dans un message sur Facebook, a dit que son fils avait « donné sa vie en essayant de montrer au monde les souffrances du peuple syrien ». « Nous implorons les ravisseurs d'épargner la vie des autres otages. Comme Jim, ils sont innocents. Ils n'ont aucun pouvoir sur la politique du gouvernement américain en Irak, en Syrie ou ailleurs dans le monde », a exhorté Mme Foley. Et l'EI ne s'est pas arrêté aux journalistes américains. Les jihadistes auraient aussi kidnappé quatre autres étrangers près d'Alep ces derniers jours : deux Italiennes, un Danois et un Japonais.
James Foley, en septembre 2011 en Libye. AFP / ARIS MESSINIS
James Foley, reporter expérimenté, avait couvert le conflit en Libye avant de se rendre en Syrie pour suivre la rébellion contre le régime de Bachar el-Assad pour le site d'informations américain GlobalPost, l'Agence France Presse et d'autres médias. Cet assassinat a provoqué l'indignation des pays occidentaux. Le secrétaire général de l'Onu Ban Ki-moon a dénoncé un « crime abominable », le secrétaire d'État américain John Kerry parlant de l'EI comme du « visage du mal » qui doit être « détruit ». Paris a évoqué une « barbarie » et un « assassinat ignoble ». La chancelière allemande Angela Merkel est « bouleversée » par le sort du journaliste, selon son porte-parole. Le Britannique Cameron a fustigé une exécution « choquante et perverse ».
La France a également dit envisager une « stratégie globale » contre un « quasi-État terroriste », tandis que Berlin et Rome se sont dit prêts à faire comme Washington et Paris en livrant des armes aux forces kurdes pour les aider à repousser l'offensive jihadiste dans le nord de l'Irak. À la suite de déclarations précédentes de Barack Obama sur « une stratégie à long terme » de lutte contre l'EI, son homologue français François Hollande a annoncé qu'il proposerait « prochainement » une conférence sur la sécurité en Irak et la lutte contre l'EI « qui dispose de financements importants et d'armes très sophistiquées ».
Du surplace
Pendant ce temps, sur le terrain au nord et à l'ouest de Bagdad, les forces irakiennes appuyées par les milices chiites et les tribus sunnites, ainsi que les peshmergas consolidaient leurs positions après avoir repoussé les jihadistes, mais faisaient hier du surplace. Les forces engagées pour reprendre aux jihadistes la ville de Tikrit, l'ancien fief du président renversé et exécuté Saddam Hussein, n'ont pas encore réussi à y entrer. La reprise dimanche du barrage de Mossoul, le plus important d'Irak, a constitué leur principale victoire jusque-là.
L'offensive jihadiste a jeté sur les routes des centaines de milliers de personnes dont des membres des minorités chrétienne et kurdophone des yazidis qui ont trouvé refuge dans les montagnes du Nord, au Kurdistan ou même dans des camps à la frontière syrienne. Hier, le Haut-Commissariat de l'Onu pour les réfugiés (HCR) a annoncé avoir commencé une opération logistique massive pour l'approvisionnement de secours par voies aérienne, terrestre et maritime dans le nord de l'Irak visant à aider un demi-million de personnes ayant fui les jihadistes de l'EI accusés des pires exactions-exécutions, viols et persécutions.
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Le visage grave, s'exprimant de son lieu de vacances, le président américain a appelé « les gouvernements et les peuples du Moyen-Orient » à travailler ensemble pour « extraire ce cancer afin qu'il ne se répande pas ». Il a...
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Gerd Müller, ministre Allemand de l'Aide au développement, a affirmé que le Qatar finançait l’ensemble des intégristes en Irak en Syrie et sans doute bien au-delà ; Une étude du Rand a confirmé que le Qatar a financé plusieurs mouvements fondamentalistes dont Daech , les frères musulmans d’Egypte, le Hamas, les Selekas en Centre-Afrique, le MNLA au Mali, Boko-Haram au Nigéria, les Shebab en Somlalie et avant le conflit syrien le Hezb au Liban. Il est surprenant que ce thème du financement soit traité de façon secondaire et, qu’un aussi petit pays, le Qatar, pour assouvir les instincts d’une monarchie à l’idéologie passéiste ait pu générer autant de souffrance dans le monde. Daech se distingue des autres intégrismes par la déshumanisation de ses membres dont la surenchère de violence rappelle les ordres noirs du siècle dernier. Mais les autres mouvements fondamentalistes de par la valeur qu’ils attribuent à la vie génèrent une morbidité identique dans les populations qu’ils contrôlent. Tayeb Abdel Rahim, secrétaire général de l'Autorité palestinienne, a affirmé aujourd’hui que les exécutions sommaires perpétrées par le Hamas (une soixantaine au cours de cet été) étaient tout à fait comparables aux actions de l'EI en Irak et en Syrie. Ce qui unit les intégristes c’est leur étrange rapport à l’humain et l’humanité.
ANDRE HALLAK
00 h 09, le 24 août 2014