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Économie - Des villes et la crise - Reportage

« Jounieh n’a pas su bénéficier de la crise syrienne »

Depuis le début de la guerre en Syrie, comment la crise se fait-elle ressentir sur l'économie des villes libanaises ? Commerces, tourisme, agriculture, industrie, comment ces moteurs ont-ils été affectés ? Dans sa nouvelle rubrique, « Des villes et la crise », « L'Orient-Le Jour » propose tous les mois le portrait économique d'une ville face à la crise syrienne. Sixième étape du parcours : Jounieh.

La baie de Jounieh est idéalement située, à proximité des grottes de Jeita, du téléphérique, de Harissa. Le potentiel touristique est énorme, mais malheureusement sous-exploité, estime Jean Beyrouthi. Photos Soraya Hamdan

En plein mois d'août, des rabais impressionnants habillent les vitrines des magasins de la rue principale de Jounieh : -50 %, -60 %, parfois jusqu'à -80 %. Pourtant, les offres alléchantes et inhabituelles pour la saison ne suffisent pas à attirer les clients au grand dam des commerçants de la ville.
« Nos ventes reposent à 80 % sur les touristes, s'insurge Élias, propriétaire d'un magasin de vêtements. Or, depuis trois ans, il n'y a plus de visiteurs étrangers à Jounieh, comme dans l'ensemble du pays d'ailleurs ! »
La clientèle du professionnel repose alors désormais sur les 20 % de Libanais restants. « Ces derniers subissent la crise économique et préfèrent consacrer leur pouvoir d'achat aux produits de première nécessité plutôt qu'à l'habillement », renchérit le commerçant.
Élias dit ainsi avoir dû accuser un recul de 50 % de ses ventes chaque année depuis le début de la crise syrienne. « Vous pensez que j'avais l'habitude de faire des soldes en plein mois d'août les autres années ? demande-t-il. Je n'ai pas le choix, et même en proposant des rabais de 70 %, le magasin demeure désespérément vide. »
De l'autre côté de la rue, Élias, lui aussi, mais vendeur de chaussures, dresse le même constat accablant. « C'est un drame ! insiste-t-il. La crise syrienne a bel et bien été le déclencheur il y a trois ans, mais depuis un an et demi, la dégringolade économique s'est accélérée de manière inéluctable. »

 

 

 

 

Une paupérisation des Libanais
Le commerçant pointe du doigt une « paupérisation des Libanais ». « Les gens n'ont plus d'argent, c'est aussi simple que cela, insiste-t-il. Leur pouvoir d'achat ne cesse de chuter depuis trois ans, or ils sont nos seuls clients, les touristes ayant déserté le pays. »
Le professionnel estime avoir enregistré un recul de son chiffre d'affaires de 25 % chaque année depuis 2011. Selon les chiffres de l'Association des commerçants de Jounieh, le secteur commercial local aurait perdu entre 20 et 30 % de ses revenus chaque année depuis trois ans.
Pour Fouad Boueiri, vice-président de la municipalité de Jounieh, la crise syrienne a en premier lieu affecté le marché de l'emploi. « Le chômage a augmenté de manière fulgurante, explique-t-il. Les réfugiés syriens sont prêts à travailler à moitié moins cher que les Libanais. Pour une ville comme Jounieh dont les revenus proviennent à moitié du tourisme, à 30 % des ventes commerciales et à 20 % de l'activité estudiantine, l'impact de la crise se fait durement ressentir. »

 

Un potentiel économique sous-exploité
La ville de Jounieh bénéficie pourtant d'un emplacement géographique avantageux, relatif « havre de paix » dans un Liban en plein remous. Elle aurait pu attirer des touristes et des Libanais en quête de paix comme à l'époque de la guerre civile. Pour Jean Beyrouthi, président du syndicat des complexes balnéaires au Liban et un des propriétaires de l'hôtel Bel Azur à Jounieh, « la ville n'a pas su profiter de la crise syrienne ».
« Même si Jounieh attire toujours plus que Beyrouth comme nous l'avons par exemple constaté pendant la période du Fitr durant laquelle le taux d'occupation des hôtels de la ville s'établissait entre 60 et 70 % contre à peine 40 % à Beyrouth, nous aurions pu faire beaucoup mieux », regrette Jean Beyrouthi.
La baie de Jounieh est effectivement l'une des plus belles baie au monde, idéalement située à proximité du téléphérique, des grottes de Jeita de Harissa et du Casino du Liban, « le potentiel touristique est immense, mais malheureusement sous-exploité », considère le président du syndicat des stations balnéaires.
Le professionnel appelle la municipalité à mettre en place un aménagement du territoire, une zone piétonne, de larges trottoirs, une infrastructure nette. « Jounieh compte des demeures centenaires, des ruelles de charme, mais rien n'est entretenu ni aménagé. C'est pourtant une région à l'abri des événements, qui aurait pu capitaliser sur cet atout de taille dans le contexte actuel. »


Mais selon les chiffres de Jean Beyrouthi, Jounieh n'a pas su profiter de ce contexte. « 90 % de nos touristes venaient à Jounieh par voie terrestre, mais depuis la fermeture de la route partant de la Syrie, il ne nous reste plus que 10 % de touristes, quelques Irakiens et Européens en majorité. »
Jean Beyrouthi estime la baisse du chiffre d'affaires du secteur touristique à Jounieh à -35 % par an depuis le début de la guerre en Syrie. En parallèle, les prix des chambres d'hôtel ont également diminué de 35 à 45 %.
L'hôtel Acropolis et le Century Park, deux établissements emblématiques de la ville de Jounieh, ont d'ores et déjà fermé leurs portes. « Si la classe politique ne se réveille pas et que rien ne change, les choses ne sont pas prêtes de s'arranger », conclu Jean Beyrouthi.

 

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En plein mois d'août, des rabais impressionnants habillent les vitrines des magasins de la rue principale de Jounieh : -50 %, -60 %, parfois jusqu'à -80 %. Pourtant, les offres alléchantes et inhabituelles pour la saison ne suffisent pas à attirer les clients au grand dam des commerçants de la ville.« Nos ventes reposent à 80 % sur les touristes, s'insurge Élias, propriétaire d'un...

commentaires (2)

en plus la démagogie du Jean Beyrouthi est assez épaisse...un téléphérique qui conduit à Jeïta ...qui a perdu son label 7ème merveilles du monde ...! quand à la baie de Jounieh... j'en connais plus de 50 plus belles en Méditerranée et avec au moins des plages blanche et avec moins de pollution en mer ...Quand au Casino ses spectacles baisses de niveaux depuis un certain temps et ses restaurants sont banaux ...Alors faudrait arrêter de rêvasser ...!

M.V.

18 h 58, le 18 août 2014

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Commentaires (2)

  • en plus la démagogie du Jean Beyrouthi est assez épaisse...un téléphérique qui conduit à Jeïta ...qui a perdu son label 7ème merveilles du monde ...! quand à la baie de Jounieh... j'en connais plus de 50 plus belles en Méditerranée et avec au moins des plages blanche et avec moins de pollution en mer ...Quand au Casino ses spectacles baisses de niveaux depuis un certain temps et ses restaurants sont banaux ...Alors faudrait arrêter de rêvasser ...!

    M.V.

    18 h 58, le 18 août 2014

  • Jounieh un havre de paix seulement en temps de guerre mais commercialement en temps de paix elle laisse toujours à désirer.

    Sabbagha Antoine

    11 h 08, le 18 août 2014

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