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Économie - Liban

Ibrahim Najjar : La libéralisation des loyers anciens est désormais acquise

Professeur de droit à l'Université Saint-Joseph, ancien ministre de la Justice, Ibrahim Najjar avait déjà tenté de réformer le régime des anciens loyers. La loi de libéralisation, votée le 1er avril dernier, s'inspire directement de son projet de loi. Il revient aujourd'hui sur la décision du Conseil constitutionnel qui met un terme aux loyers anciens.

La décision du Conseil constitutionnel sonne-t-elle la fin des lois exceptionnelles portant sur les loyers anciens ?
Oui, sans aucun doute. La décision du Conseil constitutionnel est fortement articulée et explicite : elle consacre définitivement le droit de reprise des lieux par leur propriétaire. La loi entrera donc en vigueur à la fin de l'année 2014, soit six mois après sa publication au Journal officiel, qui a eu lieu le 3 juillet 2014. C'est une bonne nouvelle : cette loi de libéralisation inaugure enfin une « sortie de crise ». Elle propose une solution à une situation intolérable qui a très longtemps affecté les relations entre propriétaires et locataires, et durablement freiné la rénovation du parc immobilier. On peut même dire que, durant près de 70 ans – période pendant laquelle les lois exceptionnelles se sont appliquées –, les propriétaires ont subi une forme d'expropriation indirecte de leurs droits sans que pour autant les locataires se trouvent assurés de leur sort sur le long terme.

 

Le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions relatives à la nomination et aux pouvoirs de la commission spéciale, que la loi instituait. Qu'en pensez-vous ?
Le Conseil constitutionnel s'est appuyé sur deux arguments juridiques pour censurer des dispositions relatives à la commission spéciale. Il a estimé d'abord que la loi ne donnait pas suffisamment de précisions ni de garanties quant à la procédure de désignation des personnalités qui devaient y siéger. Au nom de quoi, par exemple, tel ministère pouvait-il désigner tel représentant des locataires ou des propriétaires ? En fonction de quels critères pouvait-on nommer les juges, censés dirigés ces commissions ? Le second argument, utilisé par les sages, repose sur le fait que cette commission devait rendre des décisions en « dernier ressort ». Les juges ont estimé que l'absence de contestation possible des décisions de cette commission devant la justice était anticonstitutionnelle. À titre personnel, je pense que leur décision aurait pu être plus nuancée. Il est vrai cependant que lors de l'examen parlementaire de la loi, ces points auraient pu être mieux justifiés et approfondis.

Est-ce que cela pourrait remettre en cause des mécanismes que la loi institue comme l'évaluation de la valeur locative ?
Non, car le Conseil n'a pas censuré les dispositions relatives à l'évaluation des biens, que la loi entérine selon une progression graduelle, afin de rendre désormais plus juste le montant des loyers perçus par les propriétaires. Ce sera donc ici au droit commun de s'appliquer. Et aux juges des loyers de se déclarer compétents lorsqu'ils seront saisis pour trancher les litiges.

 

Pourrait-on imaginer que l'application de la loi soit suspendue dans l'attente de nouvelles dispositions législatives pour remplacer celles que le Conseil constitutionnel a retoquées ?
Non, la loi est définitive et son application ne peut pas être suspendue. Les tribunaux n'ont pas le droit d'invoquer une « loi incomplète » pour ne pas l'appliquer : ce serait un déni de justice ! Pourtant, je crois que le législateur devra encore intervenir pour compléter cette loi, mais sans que cela altère son entrée en vigueur. Désormais, ces lois exceptionnelles appartiennent au passé !

 

Lorsque vous étiez ministre de la Justice, vous aviez proposé différentes nouveautés législatives pour accompagner la fin des loyers anciens...
En effet, si on doit réparer l'injustice commise vis-à-vis des propriétaires, il est tout aussi évident qu'il faut aider les locataires les plus défavorisés. De fait, j'avais déposé deux projets de lois pour contrebalancer la fin des loyers anciens. Le premier portait sur l'extension du crédit-bail aux biens immobiliers. Actuellement, le leasing est, en effet, réservé aux seuls biens mobiliers. Cette initiative devait permettre aux locataires de devenir propriétaires sans apport initial. On aurait pu aussi imaginer que les banques construisent des logements, laissant aux locataires une option d'achat possible. J'avais également proposé l'instauration d'un impôt sur les plus-values immobilières lors de la vente ou la revente d'un bien-fonds. Aujourd'hui, les bénéfices immobiliers restent encore soumis à une taxation timide, vétuste, voire même injuste. Les fonds ainsi dégagés auraient servi à attribuer des prêts à taux bonifiés aux locataires de loyers anciens. Ces deux projets de lois sont toujours dans les tiroirs de l'Assemblée.

 

Pour mémoire

Loyers anciens : le Conseil constitutionnel censure des articles de la loi

Le sort de la loi sur les loyers entre les mains du Conseil constitutionnel

Voir aussi, le dossier spécial du Commerce du Levant : Que dit la loi sur la libéralisation des loyers ?

 

La décision du Conseil constitutionnel sonne-t-elle la fin des lois exceptionnelles portant sur les loyers anciens ?Oui, sans aucun doute. La décision du Conseil constitutionnel est fortement articulée et explicite : elle consacre définitivement le droit de reprise des lieux par leur propriétaire. La loi entrera donc en vigueur à la fin de l'année 2014, soit six mois après sa publication...

commentaires (2)

Une grande pensée pour cet avocat, qui pour des raisons, inavouables, me loue un appartement de 120M2 à Dékouaneh 250000 LL annuellement, je dis bien 250000 ll et qui tente systématiquement de négocier un règlement en 2 fois...

C…

23 h 07, le 12 août 2014

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Commentaires (2)

  • Une grande pensée pour cet avocat, qui pour des raisons, inavouables, me loue un appartement de 120M2 à Dékouaneh 250000 LL annuellement, je dis bien 250000 ll et qui tente systématiquement de négocier un règlement en 2 fois...

    C…

    23 h 07, le 12 août 2014

  • Un grand pas pour l'humanite! A quand la loi sur la libéralisation des loyers anciens a type commercial??

    Raspoutnikof

    09 h 52, le 12 août 2014

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