La menace jihadiste hante les esprits et mobilise l’armée et le Hezbollah aux frontières

Depuis un certain temps, les yeux sont rivés sur Ersal, ce village de la Békaa-Nord situé à proximité de la frontière syrienne. Cette localité s'est fait connaître dans des circonstances dramatiques lors de l'agression meurtrière qui avait visé, il y a un an et demi, une unité de l'armée libanaise, faisant plusieurs victimes parmi les soldats.

Depuis, les habitants du village ont œuvré assidûment à se réconcilier avec la troupe, conscients du poids que font peser sur eux les réfugiés syriens, désormais plus nombreux qu'eux. Conscients également du danger que constituent les combats qui grondent à leurs portes. À moins de 17 kilomètres de là, des opérations de guérilla se déroulent depuis plusieurs semaines entre des éléments du Hezbollah postés en plusieurs points du jurd et des éléments jihadistes d'al-Nosra, affirment certains, ou des membres de Daech, assurent d'autres. Depuis que les affrontements par intermittence opposent les deux organisations, sunnite et chiite, la peur collective s'amplifie et les craintes de voir le portail de Ersal s'ouvrir devant des éléments indésirables qui ne rêvent que de s'infiltrer dans des régions chiites environnantes se multiplient. Hier, la troupe a arrêté six Syriens soupçonnés d'appartenir à des groupuscules armés, voire islamistes.

Entouré de villages à majorité chiite et de quelques villages chrétiens, Ersal est, une fois de plus, dans le point de mire. La sympathie exprimée par nombre de ses habitants pour l'opposition syrienne, dont quelques-uns des éléments sont venus trouver refuge dans ce village, suscite des inquiétudes en dépit de l'assurance donnée à plusieurs occasions par les habitants du village qui craignent la réaction des forces de l'ordre face à la menace salafiste qui pointe à la lisière du village.

(Pour mémoire : Le neveu de Nasrallah aurait été tué dans les combats contre l'ASL)

Hier, c'est une véritable apologie qu'ils ont adressée à la troupe, saluant ses martyrs et rendant hommage à son rôle. « Les habitants sont prêts à protéger les soldats de l'armée en payant de leur sang s'il le faut », précise un communiqué officiel publié à l'occasion de la fête de l'Armée par les membres de la municipalité de Ersal.
Ces derniers ont même lancé un appel aux habitants les invitant à ne pas se rebiffer et à accepter les mesures draconiennes imposées dans la localité.
Déployée en force dans le village et ses alentours, l'armée y a érigé 13 barrages, et les opérations de perquisition sont plus rigoureuses qu'ailleurs.

Selon le président de la municipalité, Ali Houjeiri, ces mesures ne reflètent pas la hantise d'une infiltration via Ersal, d'autant que les accès au Liban sont nombreux, notamment du côté de Laboué, du Qaa, jusqu'à Baalbeck. « Les éléments armés ne sont pas intéressés par Ersal », dit-il, dans une réponse explicite signifiant que leur cible est bien les régions chiites et non sunnites, et qu'ils peuvent y aller directement sans passer par là. La cible des jihadistes pourrait tout aussi bien être les villages chrétiens si les menaces des « Brigades des sunnites libres » se vérifiaient. Hier, ce groupuscule, dont on ne sait toujours pas s'il est réel ou fictif en dépit des assurances données par le ministre de l'Intérieur, est revenu à la charge, appelant, par le biais d'un compte Twitter, les chrétiens à quitter la Békaa au plus tôt.
Le groupuscule présumé annonce à ce propos « la fin des préparatifs pour commencer les opérations d'épuration de l'émirat de la Békaa », soulignant que le jour J est proche.

Les assurances contre ces mises en garde sont venues d'un membre du bloc du Hezbollah.
« L'État libanais a pris les mesures nécessaires pour protéger les localités de la Békaa. La résistance mène des combats contre des groupuscules armés dans le jurd de l'Anti-Liban pour les empêcher d'avancer », a affirmé Walid Succariyé qui rappelle par ailleurs que personne ne sait encore si les « Brigades des sunnites libres » existent réellement.

(Pour mémoire : Ersal redoute l'extension de la bataille du Qalamoun jusqu'à ses portes)

Entre-temps, les rumeurs circulent et se relaient par médias interposés sur le danger jihadiste et le risque de le voir pointer à l'horizon, reflétant une inquiétude générale croissante.
Au cours des derniers jours, des informations ont circulé sur un complot fomenté par des jihadistes qui viserait à prendre en otages des officiers de l'armée, voire des citoyens ordinaires en grand nombre, pour les échanger contre les islamistes détenus à Roumieh. L'information, qui serait parvenue aux services de renseignements libanais par le biais de services occidentaux, met en garde contre une telle opération et son impact sur la situation générale. L'armée aurait déjà alerté ses effectifs dans plusieurs coins du pays, les sommant de prendre toutes les mesures de précaution possibles.
Des nouvelles tout aussi alarmantes ont circulé sur un groupuscule de près de 100 combattants takfiristes qui effectueraient des entraînements dans une localité du Nord, à Wadi Jehannam, une information que l'armée – qui s'est immédiatement mobilisée dans les localités environnantes – aurait prise très au sérieux, s'abstenant toutefois de commenter ces données.

Une chose est certaine : face à la montée des appréhensions, la vigilance s'est accrue et les services de l'ordre sont désormais en état d'alerte maximale, conscients de ce danger rampant qui risque d'emporter tout le monde dans son sillage.

Lire aussi

L'ouverture du front du Sud n'est pas envisagée..., l'éclairage de Scarlett Haddad

Geagea : Si Daech se maintient, il va venir à bout de l'islam et du M-O

Réseau de communication du Hezbollah : Harb promet de prendre les mesures nécessaires

Ahmad el-Assaad appelle à une action concertée, religieuse et politique, contre l'expansion de l'EI