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Sport - Alpinisme

Quand l’ego atteint des sommets au Mont-Blanc

La réputation internationale du Mont-Blanc attire chaque année près de 25 000 personnes à la belle saison. Selon les gendarmes français, une quarantaine de personnes en moyenne perdent annuellement la vie sur le massif. Jean-Pierre Clatot/Getty Images/AFP

A l'instar de ce père américain partant à l'assaut du Mont-Blanc avec ses deux enfants, certains alpinistes ont fait du sommet des Alpes françaises un « terrain de jeu » pour assouvir leur soif d'ego, une dérive désolante et parfois dangereuse, déplorent des professionnels de la montagne.
Denis Crabières, président du syndicat français des guides de montagne, n'en peut mais : « Sur le Mont-Blanc, on a tout vu. » De la tentative avortée de descente en voiture à celle dans une poêle à paella en passant par les risque-tout en vélo tout-terrain et le développement du trail, M. Crabières ne semble presque pas étonné par la vidéo choc mettant en scène un père de famille américain, Patrick Sweeney, et ses deux enfants de 11 ans et 9 ans, à l'assaut du couloir du Goûter (vers 3 700 m). Diffusée sur la chaîne américaine ABC News, on peut y voir les enfants, attachés à leur père, être emportés par le début d'avalanche et commencer à glisser dans la pente.
Cette mésaventure médiatisée a déclenché l'ire du maire de la commune proche de Saint-Gervais, Jean-Marc Peillex, qui a déposé plainte contre le père pour mise en danger de la vie d'autrui : « On siffle la fin de la récréation. » Surpris par la polémique, le père qui se présente comme un « adrenaline junkie », a précisé avoir voulu « battre le record du monde des plus jeunes alpinistes atteignant le sommet » pour « récolter des fonds pour un orphelinat local »...

Record de stupidité
« Il a surtout battu un record de stupidité », ironise Denis Crabières.
« C'est choquant, mais cela reste un cas très isolé », entend souligner Christophe Boloyan, président de la Chamoniarde, une association de prévention et de secours en montagne. Pour lui, « les règles sont généralement suivies par les alpinistes car personne n'a envie de mourir ». M. Boloyan convient cependant que la réputation internationale du Mont-Blanc, qui attire chaque année près de 25 000 personnes à la belle saison, a transformé le sommet en objet de « consommation », une « cour des miracles », selon Jean Annequin, un guide reconnu. « Il a une dimension symbolique forte et on y trouve des alpinistes qui perdent le sens des réalités et la raison », complète Olivier Obin de la « coordination Montagne », un collectif d'associations françaises, suisses et italiennes.
Ces professionnels s'étonnent ainsi du niveau de préparation physique ou d'équipement de certains alpinistes ne sachant par exemple peu ou pas s'encorder, voire mettre leurs crampons. Ces cas de figure restent cependant « une minorité », insistent les professionnels. « Le vrai visage de la montagne, ce n'est pas ça. L'alpinisme ne se résume pas à la bêtise d'une minorité », plaident-ils.

Nombreux sont les hurluberlus
« Mais il existe aussi des alpinistes expérimentés qui, devant le symbole Mont-Blanc, abdiquent tout esprit critique, et parce qu'ils viennent de loin ou parce qu'ils constatent la présence d'autres cordées, refusent de faire demi-tour alors que les conditions météo l'exigeraient », reconnaissent-ils.
Sur la voie normale d'ascension du Mont-Blanc, 74 alpinistes sont morts entre Tête Rousse et le refuge du Goûter de 1990 à 2011, selon un décompte de la fondation Petzl. Et la grosse centaine de secours réalisés l'été par l'unité spécialisée de gendarmerie de haute montagne de Chamonix sur le plus haut sommet d'Europe est à rapporter aux 200 personnes qui y crapahutent quotidiennement. Selon les gendarmes, une quarantaine de personnes en moyenne perdent chaque année la vie sur tout le massif. Un environnement extrême où le risque zéro n'existe pas.
Citant le cas de cet alpiniste polonais, qui pour son confort personnel a demandé aux secours en montagne à être redescendu en hélicoptère dans la vallée depuis le Mont-Blanc, le maire de Saint-Gervais estime pourtant que les « hurluberlus sont de plus en plus nombreux ». « Ils devraient être attaqués au portefeuille, en rendant payants les secours de confort ou en instaurant une taxe avant l'ascension. »
« Historiquement la haute montagne n'est pas administrée. Est-ce que cela serait une solution ? Je ne sais pas, s'interroge Olivier Obin. Mais cet espace est tellement grand que ça serait très compliqué. »

(Source : AFP)

A l'instar de ce père américain partant à l'assaut du Mont-Blanc avec ses deux enfants, certains alpinistes ont fait du sommet des Alpes françaises un « terrain de jeu » pour assouvir leur soif d'ego, une dérive désolante et parfois dangereuse, déplorent des professionnels de la montagne.Denis Crabières, président du syndicat français des guides de montagne, n'en peut mais :...

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