En dépit des appels répétés de différentes parties et notamment de Bkerké en faveur de l'élection d'un nouveau chef de l'État dans les plus brefs délais, le dossier de la présidentielle ne devrait pas bouger de sitôt. Des sources parlementaires sont convaincues que, sauf développement imprévu, le Liban ne devrait pas avoir un nouveau président avant plusieurs mois et peut-être pas avant 2015. Selon ces sources, le dossier de l'élection présidentielle est plus que jamais lié à l'évolution de la situation régionale et à un éventuel dialogue entre l'Arabie saoudite et l'Iran qui, pour l'instant, ne se fait que par pions régionaux interposés. Les sources parlementaires précisent que ce n'est pas tant la personne du futur président qui compte, que l'ensemble des questions qui touchent ce dossier et qui doivent être réglées. Le Liban n'étant pas une démocratie comme les autres, l'élection d'un président, surtout depuis l'accord de Taëf, ne peut pas être dissociée d'autres questions tout aussi importantes. Dans la période actuelle, il s'agit de s'entendre sur le futur gouvernement, ou à tout le moins l'identité du nouveau Premier ministre qui devrait succéder à Tammam Salam, une fois le nouveau président entré en fonctions. Il faut aussi s'entendre sur les contours de la nouvelle loi électorale et sur le mode de scrutin, ainsi que sur l'identité du nouveau commandant en chef de l'armée qui devrait succéder au général Jean Kahwagi, dont le mandat expire en septembre 2015. À ces dossiers, il faut ajouter celui de l'énergie qui est devenue un secteur essentiel pour l'économie et pour l'avenir du Liban, notamment sur le plan de son rôle régional.
Les sources parlementaires sont ainsi convaincues que s'il ne s'agissait que d'élire une personne, la question serait plus facile à régler. Mais depuis l'accord de Taëf et le départ des troupes syriennes du Liban, la fragilité du système politique exige une entente sur un package pour pouvoir finaliser l'élection présidentielle. C'est ce qui s'était passé en 2008 à Doha, lorsque les contours de la loi électorale (qui a été appliquée en 2009) ont été dessinés dans les salons et les chambres de l'hôtel qui avait accueilli les principaux pôles libanais pour un dialogue sous couverture qatarie et en présence de représentants de l'Onu et d'autres diplomates occidentaux.
Pour l'instant, les pays régionaux et occidentaux sont trop occupés par d'autres crises régionales et autres pour avoir le temps de régler les dossiers libanais en suspens. D'autant que la situation au Liban a été plus ou moins verrouillée par la formation d'un gouvernement rassembleur, où la plupart des grandes formations sont représentées, mais surtout dans lequel le dossier sécuritaire prime. Celui-ci est d'ailleurs entre les mains de figures de premier plan, comme les ministres Nouhad Machnouk et Achraf Rifi, qui ont instauré une coopération étroite entre les différents services de sécurité, indépendamment des conflits politiques entre le groupe qu'ils représentent et les autres partenaires au sein du gouvernement. Les derniers attentats kamikazes qui ont secoué le Liban il y a quelques semaines ont d'ailleurs montré que la stabilité interne du Liban est une ligne rouge et qu'aucune partie n'est autorisée à instaurer le chaos en prenant prétexte des divisions politiques ou régionales. La coopération des services de renseignements occidentaux, en particulier américains et allemands, avec les services libanais a porté ses fruits et a permis d'adresser un message ferme et clair à tous ceux qui seraient tentés de jouer avec la carte de la sécurité au Liban.
À partir de là, il devient clair, toujours selon les sources parlementaires, qu'il ne faut pas s'attendre à un règlement rapide du dossier présidentiel. Celui-ci devra attendre que les Iraniens et les Saoudiens décident de dialoguer et s'ils le font, qu'ils commencent par les dossiers les plus brûlants comme l'Irak et le Yémen. En un sens, les Libanais devraient être satisfaits de voir que leur dossier n'est pas brûlant et qu'ils peuvent donc attendre un peu pour qu'il soit évoqué. Mais le risque c'est que certaines parties ne soient tentées de jouer avec le feu, en voulant créer au Liban une actualité sanglante qui permette de donner à ce dossier le caractère d'urgence... Les sources parlementaires précitées affirment que la réaction rapide et efficace des forces armées à la dernière vague d'attentats montre que ce risque reste contrôlé.
Mais ce sont désormais les dossiers sociaux qui pourraient provoquer une déstabilisation. Les sources parlementaires estiment à cet égard que les parties politiques locales ne devraient pas se livrer à leur sport favori qui est de se lancer des accusations, tout en laissant les dossiers en suspens, sous prétexte que la communauté internationale ne veut pas d'une déstabilisation du Liban, mais profiter au contraire de ce parapluie international pour traiter les dossiers sociaux et éviter la paralysie des institutions. Cela pourrait préparer le terrain à une entente qui finira un jour par avoir lieu. À cet égard, les sources parlementaires estiment que les efforts de Walid Joumblatt pour favoriser un dialogue entre le courant du Futur et le bloc du président de la Chambre Nabih Berry, ainsi que la poursuite du dialogue entre le courant du Futur et le CPL du général Michel Aoun, sont des initiatives louables qui devraient se concrétiser dans des ententes sur des dossiers sociaux ou institutionnels ponctuels. Le problème c'est qu'au Liban certaines parties restent convaincues que les dissensions sont leur seul moyen de montrer qu'elles existent et elles ne voient la situation qu'à travers le prisme étroit de leurs intérêts directs. Sauf que le tableau est beaucoup plus grand et la situation régionale beaucoup trop confuse pour se livrer à de petits calculs...
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commentaires (7)
articles un peu plus objecif, pardonner moi, que d'habitude... mais domage pour une partie des libanais qui n'ont pas jouer le jeu de la democratie
Bery tus
21 h 12, le 18 juillet 2014