Sept tués et plusieurs blessés. Tel est le bilan macabre enregistré dans les rangs du Hezbollah qui, depuis 36 heures, mène un combat acharné contre des éléments de l'opposition syrienne à la frontière libanaise. Un bilan que l'on peut considérer comme extrêmement lourd pour la résistance chiite, aguerrie aux combats les plus ardus, tous terrains confondus.
La zone des combats se situe entre Ersal et la région syrienne du Qalamoun, d'où l'armée de Bachar el-Assad, appuyée par le Hezbollah, avait chassé les insurgés à la mi-avril après des mois de violents combats. Il s'agit d'un espace désert à la frontière, une sorte de no man's land où sont nichés les groupuscules de l'opposition syrienne que le Hezbollah tente, depuis quelque temps, de déloger. Et à défaut, de les empêcher d'avancer un tant soit peu en direction de la frontière libanaise qu'ils cherchent à rendre complètement imperméable aux incursions des islamistes en provenance de Syrie.
Le week-end dernier, les affrontements se sont déclarés après une embuscade tendue aux combattants du parti chiite, postés en plusieurs points de cette étendue. C'est ce qu'affirme à L'Orient-Le Jour une source militaire qui suit de près ce qui se passe dans cette région.
« Lorsque le Hezbollah perd autant d'éléments en un laps de temps aussi court, cela signifie qu'il a été victime d'une embuscade. Personne ne sort vivant d'une embuscade », précise la source.
Au moins 16 combattants du Hezbollah et des rebelles syriens ont péri en moins de deux jours dans ces combats, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). « Sept membres du Hezbollah ont été tués et 31 autres ont été blessés durant les combats qui se sont poursuivis jusqu'à la nuit de dimanche à lundi », a affirmé Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH. Les rebelles, qui comptent dans leurs rangs le Front al-Nosra, branche syrienne d'el-Qaëda, ont enregistré au moins neuf morts et 23 blessés, dont trois graves qui ont été transportés dans un « hôpital de campagne » à Ersal au Liban, a-t-il ajouté.
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Une source proche du Hezbollah estime que les éléments du parti chiite ont effectivement affronté des éléments d'al-Nosra. « Les éléments d'al-Nosra étaient majoritairement présents. Cependant, il ne faut pas exagérer leur nombre ni leur puissance », insiste la source, en réponse à une question sur l'intensité des combats et le potentiel des rebelles syriens.
« Ce sont les survivants de l'opposition syrienne que nous avions combattus dans le Qalamoun et qui ont été par la suite boutés hors des villages du Qalamoun pour se replier dans cette zone désertique, poursuit la source. Depuis, ils se livrent à des actions de subversion contre les éléments du Hezbollah, qui n'ont jamais quitté cette région. »
Selon M. Abdel Rahmane, dont l'observatoire s'appuie sur un vaste réseau de militants et de sources médicales, le Hezbollah a lancé une offensive samedi soir pour tenter d'en finir avec les rebelles dans cette zone, après des combats quotidiens. « Mais ils sont tombés dans une embuscade tendue par les rebelles qui leur ont infligé des pertes, avant que des renforts du Hezbollah n'arrivent et que les combats ne s'intensifient », a-t-il précisé.
Une information qui rejoint l'avis exprimé par la source militaire. Celle-ci explique que le parti chiite est désavantagé par le fait qu'il se trouve en territoire étranger. « Il connaît mal le relief et la géographie de cette région. L'opposition syrienne est en ce sens plus favorisée et plus confiante parce qu'elle est chez elle et connaît les lieux », commente la source, dans une tentative d'expliquer les lourdes pertes infligées au Hezbollah, un parti qui a démontré une invincibilité à toutes épreuves.
Il reste que le parti chiite a quand même fait 14 prisonniers parmi les rebelles, toujours selon l'OSDH.
« La bataille était très féroce et de très près », a déclaré à l'AFP un membre blessé du Hezbollah, sous le couvert de l'anonymat, en faisant état de huit morts parmi ses camarades.
(Pour mémoire: Le Hezbollah appelle à une coopération entre les armées syrienne et libanaise à la frontière)
Évaluant la situation sur le terrain, le directeur de l'OSDH a indiqué que l'armée syrienne et le Hezbollah qui mènent de pair ces combats maîtrisent la localité. « Cependant, ils ne peuvent pas contrôler chaque grotte et l'ensemble de la région montagneuse où se dissimulent les rebelles », précise-t-il.
Pour Ahmad Moussalli, professeur universitaire et expert dans les mouvements islamistes, l'agitation que connaît cette région frontalière s'explique par le fait que Ersal est désormais la seule porte d'accès restante pour les formations jihadistes. « Ces dernières, estime-t-il, tentent par tous les moyens de faire une incursion en direction de ce village-allié, majoritairement favorable aux rebelles syriens, pour tenter de s'y implanter et mener, à partir de là, leurs opérations. » Le professeur reste convaincu que c'est à partir de Ersal que les islamistes cherchent à annoncer leur « émirat islamique ».
Un avis que contredit la source militaire, qui estime que ces groupuscules sont nichés dans le jurd depuis un certain temps, assurant que le village de Ersal est bien verrouillé.
Selon l'OSDH, des centaines de rebelles sont toujours cachés dans les collines et les grottes des montagnes du Qalamoun, d'où ils mènent régulièrement des attaques contre les positions du régime et de ses alliés. Et d'après des militants, les rebelles se rassemblent dans les environs d'Ersal, une région montagneuse et assez désertique, « pour se reposer ». Cette zone est aussi le point de passage pour les médicaments, les armes légères et les blessés. Pendant longtemps, elle a servi en outre de lieu de passage aux éléments de l'opposition syrienne, aux membres de l'Armée syrienne libre notamment, qui traversaient le jurd pour se rendre aux combats avant de revenir se reposer à Ersal auprès de leurs familles.
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commentaires (8)
Il faudrait créer un badge : "LIBAN D'ABORD" au centre de l'image du cèdre qui est notre plus beau symbole Je ne suis pas fanatique mais c'est le pays de mes aïeux et je l'aime en paix avec tout le monde
FAKHOURI
15 h 35, le 15 juillet 2014