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Liban - Reportage

Seul le Mondial éloigne brièvement les Libanais de la politique

Foisonnement de drapeaux, de couleurs et de ballons...

Les Libanais sont des drogués de politique, mais avec la Coupe du monde, l'ivresse du football prend le dessus et durant un mois ils oublient leurs querelles partisanes pour s'identifier aux équipes en compétition au Brésil. Comme le pays du Cèdre ne possède pas un palmarès sportif reluisant, ses habitants n'ont pas l'esprit chauvin et ils s'enthousiasment pour les pays ayant une chance de l'emporter ou ceux qui abritent une importante communauté libanaise. Et pour que personne n'ignore leur préférence, ils fixent le drapeau du pays choisi à leur voiture, aux rétroviseurs, sur leur balcon ou le tendent en travers des ruelles.

« J'aime l'Allemagne et sa manière de jouer », lance Élias Nohra, 19 ans, interrogé par Sara Hussein de l'AFP et qui a dépensé « sans regret » 50 dollars pour pouvoir accrocher un drapeau sur le toit de sa voiture. D'ailleurs, les chauffeurs ne manquent pas d'imagination : l'un d'eux a fixé sur son pare-brise un autocollant transparent avec le drapeau italien, un autre la photo du slip d'un bikini au couleur du Brésil et un troisième le soutien-gorge noir-rouge-jaune de l'Allemagne.

Cette football-mania est un moyen d'échapper à la crise politique récurrente et représente une bonne nouvelle pour les commerçants. Ali Nasrallah, 23 ans, vend des fanions sur un stand dans le camp palestinien de Sabra à Beyrouth et constate que « ce sont ceux du Brésil, d'Allemagne et d'Italie que nous vendons le mieux ». Ces trois pays, ayant déjà remporté la Coupe du monde, ont la faveur des Libanais, toutes confessions confondues.

Sans pressions
Que Rayan Moussalem, journaliste sportive de 23 ans, soit une supportrice du Brésil n'est pas étonnant. Elle appartient au club des fans qui organise avec l'ambassade du Brésil des réunions pour regarder les matches. « Depuis que je suis petite, j'aime le Brésil, peut-être parce que ma famille m'a surnommée Rio. Pour être honnête, j'adore ce pays, son football et par-dessus tout sa manière de jouer », dit-elle. Élie Sarkis, lui, a hérité de l'amour du Brésil de ses père et grand-père : « Ils ont toujours aimé le Brésil parce qu'ils ont été impressionnés par les joueurs qui se signent quand ils marquent un but pour remercier Dieu. Ma famille est très religieuse et elle aime le Brésil, car même si le peuple est pauvre, il a la foi », souligne-t-il.

Les liens, par le biais de l'immigration, sont une des raisons que les Libanais avancent pour expliquer leur choix. « Je suis avec la France, parce que toute ma famille y vit », confie Aïda Qassis, 50 ans, qui tient un magasin de jouets dans un quartier à majorité chrétienne de Beyrouth. « Le Liban a obtenu son indépendance de la France et ce pays nous soutient toujours. J'espère qu'il va bien jouer », dit-elle.

Pour d'autres Libanais, c'est la notoriété des joueurs qui détermine leur choix. Ainsi, l'Argentine a ses partisans grâce au virtuose Lionel Messi et le Portugal a la cote grâce au prodige Cristiano Ronaldo. Quant à Tony Rizk, 24 ans, son cœur a définitivement basculé en faveur de l'Allemagne grâce à l'ancien gardien de but Oliver Kahn. L'an dernier, il a réalisé son rêve en se rendant à Munich, où jouait son idole. Comme beaucoup de ses compatriotes, il explique l'engouement des Libanais pour la Coupe du monde comme un des seuls événements non politiques dans un pays où tout est vu au travers du prisme de la politique et du confessionnalisme. « Notre club (de supporteurs de l'Allemagne) compte des musulmans et des chrétiens. La Coupe unit les Libanais », explique-t-il.

Enfin, Élie Sarkis estime que le Mondial est une occasion unique pour les Libanais d'afficher le soutien de leur choix, sans pression de la famille, de la communauté ou d'un groupe politique. « Je connais beaucoup de cas où le dirigeant politique soutient un pays et ses partisans un autre. Ainsi, le dirigeant politique que je soutiens est pour l'Allemagne alors que moi, je suis pour le Brésil », assure-t-il.
« Bien sûr que les Libanais sont excités par la Coupe du monde. Les temps sont durs et on veut un peu de plaisir », résume Aïda Qassis.


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Les Libanais sont des drogués de politique, mais avec la Coupe du monde, l'ivresse du football prend le dessus et durant un mois ils oublient leurs querelles partisanes pour s'identifier aux équipes en compétition au Brésil. Comme le pays du Cèdre ne possède pas un palmarès sportif reluisant, ses habitants n'ont pas l'esprit chauvin et ils s'enthousiasment pour les pays ayant une chance de...

commentaires (1)

C'est étonnant qu'il n'y ait pas des morts et des blessés parmi les supporteurs libanais des équipes de footbal des différents pays au Mondial, les Libanais étant les plus grands spécialistes du monde dans les disputes et les guerres des autres sur leur territoire.

Halim Abou Chacra

17 h 12, le 14 juin 2014

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Commentaires (1)

  • C'est étonnant qu'il n'y ait pas des morts et des blessés parmi les supporteurs libanais des équipes de footbal des différents pays au Mondial, les Libanais étant les plus grands spécialistes du monde dans les disputes et les guerres des autres sur leur territoire.

    Halim Abou Chacra

    17 h 12, le 14 juin 2014

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