« Now this is not the end. It is not even the beginning of the end. But it is, perhaps,
the end of the beginning. »
Cette phrase combien prophétique, les briscards blanchis sous le harnois des années 39-45 s'en souviennent ; elle fut prononcée par Winston Churchill en 1942, alors que venait de prendre fin l'épopée d'el-Alamein. Elle mériterait d'être rappelée au moment où s'engage la bataille – certes point ultime – des régions sunnites d'Irak, marquée par la chute en début de semaine de Mossoul, aujourd'hui sous la coupe des hordes d'Abou Bakr al-Baghdadi.
À la vérité, la débâcle subie par les forces demeurées fidèles au pouvoir central, aussi rapide qu'elle paraisse, n'en était pas moins attendue. Les affrontements faisaient rage depuis plusieurs jours, et l'emprise sur la ville, la deuxième du pays avec son million et demi d'habitants, devenait de plus en plus évidente, militaires et policiers choisissant d'ôter l'uniforme pour mieux se fondre dans la foule et gagner avec leur famille des lieux plus sûr. En fin de journée hier, des affrontements étaient signalés entre insurgés et forces de sécurité aux abords de Samarra dans le même temps que l'on annonçait la chute de la ville emblématique de Tikrit, qui vit naître Saddam Hussein – « le ciment qui maintenait l'unité de l'Irak », écrit un internaute.
Les hommes de l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL, Daech) disposent maintenant d'un butin inespéré : les avoirs des banques et l'équipement militaire abandonné par les Américains avant leur retrait en 2011, des installations étatiques flambant neuves, quelque 2 500 détenus libérés par eux et incorporés dans leurs rangs.
À ces développements s'ajoute la sécurité assurée dans une large zone proche de la frontière turque et la disparition de facto de ce qui fut la frontière avec la Syrie voisine. Il leur a suffi pour cela de mettre en branle quelques dizaines de véhicules tout-terrain (des Humvee principalement – merci encore, Oncle Sam) et d'exécuter, pour achever de terroriser la population, quelques malheureux policiers retardataires.
Pour Nouri Kamal al-Maliki, qui vient de remporter de justesse les élections législatives, le coup est dur. L'ennemi peut se vanter d'avoir, en un temps record et avec un minimum de pertes dans ses rangs, ridiculisé les forces gouvernementales et sanctuarisé la presque totalité des provinces sunnites de Ninive, Anbar et Salaheddine, centres de la violente contestation contre la Coalition. Avant d'amorcer leur mouvement de repli, les Américains s'étaient dépêchés d'annoncer qu'el-Qaëda avait été défait « stratégiquement ». Les Liddell Hart des temps modernes relativisaient alors, notant que, quand même, 30 pour cent des pertes US en vies humaines avaient été enregistrées dans cette zone, de loin la plus dangereuse du pays.
Impensable hier, l'idée d'une coopération sur le plan sécuritaire entre Bagdad et Erbil fait son chemin. Des unités de peshmergas kurdes, dit-on, se tiennent aux côtés des gardes-frontières irakiens au point de passage de Rabia. Mais, précisait il y a peu Nechirvan Barzani, Premier ministre du Kurdistan, toutes nos tentatives d'établir une forme de collaboration avec les autorités fédérales sont demeurées sans réponse. Ce n'est donc pas de ce côté-là, ni demain, que viendront les secours, à moins que, aux yeux des Kurdes, le danger ne devienne imminent et plus forte l'odeur du pétrole.
C'est plutôt à Damas que l'on craindrait de voir se préciser les risques. D'autant plus que les unités de l'EIIL, disposant d'un matériel de choix, mieux entraînées à la guerre urbaine, à la rapidité et à la mobilité portées à un niveau jusque-là inégalé et surtout peu sujettes aux états d'âme, représentent un ennemi autrement plus redoutable que les groupes opérant dans le rif de Damas et d'Alep. Quant à leur nombre, il dépasserait, à en croire les chiffres avancés par les services de renseignements étrangers, le chiffre de 30 000 hommes. En outre, la chute de Mossoul pourrait bien signifier que la jonction avec le groupe syrien s'est effectuée sans encombre et que là aussi, on devrait assister dans les mois à venir à un changement en profondeur dans le cours des événements.
Les États-Unis se disent « profondément inquiets » et ils ont tout lieu de l'être. À quoi ont donc bien pu servir une coûteuse expédition (mars 2003-décembre 2011), des milliards de dollars engloutis pour mettre sur pied une police et une armée valables, un prestige mis à mal depuis si la construction que l'on s'est ingénié à édifier s'effondre comme un château de cartes ?
Se rappeler à ce propos de relire Le livre de Jonas...
Moyen Orient et Monde - Le point
Souviens-toi de Saddam Hussein...
OLJ / Par Christian Merville, le 12 juin 2014 à 00h00
commentaires (7)
A présent on appelle les USA au secours…Le pétrole du MO / golfe n’est pas menacé alors pourquoi voulez-vous que les USA interviennent?. Pour faire la guerre au régime syrien sans foi ni loi et à l'Iran et à la Russie et à la Chine et à la Corée!!! Ils ont appris la lecon en Irak. La Russie a signé les accords gaziers qu’elle veut avec la Syrie et c’est bon et pourtant elle ne fait rien pour arrêter la destruction… par ce que plus on détruit plus elle aura à reconstruire ! .Et bien sure si les Assad tombent la Syrie se mettra dans le giron des sunnites des pays du golfe… Il est temps que ces populations se libèrent de leurs colonisateurs économiques et apprennent à coexister dans leurs diversités, à s’entendre et à se respecter, et surtout à se gouverner eux même, et à se soulever contre leurs oppresseurs… Peut être faut-il aussi revoir le système du Veto au Conseil de Sécurité de l'ONU en tout cas pour ce qui concerne les aides humanitaires avant tout! Et pour tout le reste…
Bibette
10 h 54, le 14 juin 2014