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Liban - L’éclairage

Des législatives, pour briser le clivage 14/8 ?

La vacance présidentielle serait partie pour durer. C'est en tout cas ce que pensent nombre d'observateurs, en l'absence de tout espoir augurant d'un éventuel déblocage de l'échéance, mis à part la dynamique orpheline initiée par les institutions maronites en direction des quatre leaders de leur communauté. La délégation des institutions doit se rendre aujourd'hui à Bnechii chez le chef des Marada, Sleimane Frangié, dans le cadre de sa tentative visant à pousser les faucons maronites à se retirer de la course au profit d'un candidat consensuel qui bénéficierait de leur aval. Les membres de la délégation pourraient également visiter Bkerké à la fin de la semaine afin d'évaluer les résultats de leurs réunions et mettre au point un plan d'action pour lancer un appel aux différents pôles islamo-chrétiens afin d'en finir le plus rapidement avec la situation de vacance.

 

(Lire aussi: Sleiman : Nul ne peut imposer au patriarche maronite ses positions ou ses initiatives)


L'ancien président de la Chambre, Hussein Husseini, appelle, lui, à des élections législatives au plus vite pour sortir de l'impasse et de la polarisation actuelle, sur base de la loi de 1960. De telles élections, dit-il, auraient pour effet de générer un nouveau panorama politique. Et c'est la nouvelle Chambre qui prendrait l'initiative d'élire le nouveau président de la République, dans la mesure où les députés actuels ont perdu toute légitimité du fait de la prorogation de leur mandat. De plus, la Chambre actuelle est profondément divisée et incapable de se réunir pour élire un nouveau président, estime M. Husseini.

Partant, les législatives pourraient être, selon l'ancien président de la Chambre, la seule issue à l'impasse actuelle, et devraient être la feuille de route à suivre pour régénérer le pouvoir : l'élection d'un nouveau président entraînerait la formation d'un nouveau cabinet, qui relancerait l'action des institutions pour satisfaire aux doléances des citoyens et aux revendications sociales, à commencer par la question de l'échelle des salaires. Sans compter, estiment des observateurs, que de nouvelles élections seraient le moyen de briser le clivage entre 14 et 8 Mars né de l'assassinat de Rafic Hariri, le 14 février 2005.

Cependant, certaines parties au sein du 8 Mars réclament déjà un package deal préalable avant les législatives, comme ce qui s'était produit à Doha en 2008, au terme de sept mois de vacance présidentielle. Pour le 8 Mars, cet accord préalable devrait englober la présidence de la République, la loi électorale, les législatives, ainsi que la nouvelle présidence de la Chambre, la présidence du Conseil, les quotes-parts au sein du nouveau cabinet et la déclaration ministérielle.

Ces parties du 8 Mars fondent leur logique sur le fait que la vacance présidentielle risque d'être longue. Sacrément longue, même. Et des sources diplomatiques craignent que le blocage ne s'étende au Parlement et au gouvernement, ce qui pourrait mettre le sort de la Chambre sur la sellette en l'absence d'un accord sur la présidence de la République, et à l'ombre du fossé qui continue plus que jamais de séparer 8 et 14 Mars. Une telle situation pousserait les députés à autoproroger une fois de plus leur mandat, ce que le président de la Chambre, Nabih Berry, avait pourtant écarté lors de la dernière réunion de dialogue à Baabda, appelant, comme le chef du CPL Michel Aoun par le suite, à la tenue d'élections législatives anticipées.

Pourtant, au sein du 14 Mars, l'on refuse cette volonté de détourner les regards de la présidentielle au profit des législatives. De même, l'idée d'un package deal similaire à celui de Doha est écarté, tout comme l'est la perspective d'une Constituante souhaitée par le Hezbollah pour obtenir enfin la chute de Taëf et les trois tiers. La priorité va au dossier présidentiel, souligne le 14 Mars.

Des sources bien informées estiment cependant que l'ouverture du CPL sur Saad Hariri sera centrée, à partir de maintenant, sur la perspective des législatives, le général Aoun ayant reçu des indications pas très encourageantes de l'Arabie saoudite et du Futur concernant une éventuelle adoption de sa candidature. Partant, la mise en place d'une coordination politique et électorale entre les deux courants constituerait un signal clair d'une redistribution de cartes au niveau des alliances, afin de briser la polarisation 14/8. Cependant, cette orientation continue de se heurter à des résistances à l'intérieur des deux camps qui jugent qu'il est encore trop tôt pour se livrer à ce genre d'expériences.

Si les leaders en général, et maronites en particulier, n'ont pu assurer la tenue de l'échéance présidentielle, comment donc réussir le déroulement de législatives? L'accord de Doha découlait d'une volonté régionale et internationale, et d'un parrainage franco-qatari, appuyé par l'Arabie saoudite et les États-Unis. Tout cela n'existe pas à l'heure actuelle, et la communauté internationale n'a qu'une seule préoccupation s'agissant du Liban : en préserver la stabilité, et le laisser en état de cryogénisation à l'ombre de dossiers régionaux plus importants.

Il reste à savoir si l'axe Damas-Téhéran partage cette opinion. La dernière démonstration de force des partisans de Bachar el-Assad autour de l'ambassade syrienne à Yarzé pourrait ainsi se répéter, dans une volonté manifeste du régime baassiste d'étaler sa musculature au Liban pour montrer qu'il est toujours capable d'influer lourdement sur la scène libanaise, même près de dix ans après son retrait militaire du pays en 2005. D'où l'intérêt que certains responsables commencent à porter au dossier des réfugiés, dont une partie, acquise au régime, se comporte comme une nouvelle force d'occupation. Une carte que l'axe irano-syrien entend garder en main dans la perspective de négociations à venir avec l'Arabie saoudite, mais qui restera vraisemblablement plus entre les mains de Téhéran que de Damas.

 

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La vacance présidentielle serait partie pour durer. C'est en tout cas ce que pensent nombre d'observateurs, en l'absence de tout espoir augurant d'un éventuel déblocage de l'échéance, mis à part la dynamique orpheline initiée par les institutions maronites en direction des quatre leaders de leur communauté. La délégation des institutions doit se rendre aujourd'hui à Bnechii chez le...

commentaires (1)

"Cependant, les parties du 8 Mars réclament déjà un package deal préalable avant les législatives, comme ce qui s'était produit à Doha en 08, au terme de sept mois de vacance présidentielle. Pour le 8 Mars, cet accord préalable devrait englober la présidence de la République, la loi électorale, les législatives, ainsi que la nouvelle présidence de la Chambre, la présidence du Conseil, les quotes- parts au sein du nouveau cabinet et la déclaration ministérielle." ! Une loya jirga levantine, quoi ! Äâl pays civilisé, äaâl.

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

01 h 54, le 04 juin 2014

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Commentaires (1)

  • "Cependant, les parties du 8 Mars réclament déjà un package deal préalable avant les législatives, comme ce qui s'était produit à Doha en 08, au terme de sept mois de vacance présidentielle. Pour le 8 Mars, cet accord préalable devrait englober la présidence de la République, la loi électorale, les législatives, ainsi que la nouvelle présidence de la Chambre, la présidence du Conseil, les quotes- parts au sein du nouveau cabinet et la déclaration ministérielle." ! Une loya jirga levantine, quoi ! Äâl pays civilisé, äaâl.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    01 h 54, le 04 juin 2014

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